«J’ai un bon salaire pour le travail que je fais», «Mon manager m’aide», «J’ai des opportunités pour évoluer», «Mon environnement et mes conditions de travail sont bons»… Depuis quelques semaines, ces assertions s’affichent
sur des grands panneaux de 2 mètres sur 3 dans les espaces réservés au personnel des hypermarchés Carrefour en France.
(...) Carrefour userait-il de la méthode Coué, en jouant sur l’ambiguïté de l’affirmatif ? «On est dans de la com, tranche le délégué central FO Michel Enguelz. Ils se foutent de notre gueule.»
Sur le terrain, les syndicats de salariés ne retrouvent pas la vision idyllique présentée par le plan. Pour eux, les projets de restructuration détériorent les conditions de travail. «L’absentéisme progresse», assure Enguelz. Il est passé de 2,3 millions de jours en 2007 à 2,5 millions en 2009. «Nous manquons de personnel», poursuit Jérôme Biava, délégué CFE-CGC. En 2009, 4.400 salariés (sur 120.000) ont quitté Carrefour France, pour un nombre d’hypermarchés constant. «Chez les cadres, la baisse des effectifs atteint 10%», avance Biava. Cet aspect pèse sur les perspectives de carrière alors qu’on peut lire dans le «plan personnel» : «J’ai des opportunités pour évoluer.»
«Il y a un phénomène de déqualification», pense Michel Enguelz. Avec, d’un côté, la baisse des effectifs d’encadrement et, de l’autre, la perte de responsabilités affectant ces postes : «Aujourd’hui, tout est formaté, standardisé, dit Enguelz. Dans les points de vente, on applique des process décidés au niveau national. On attend moins des compétences et plus de l’exécution des tâches.» Même constat désabusé autour des salaires. Sandrine Viaud est déléguée CFDT. Les panneaux à la gloire du climat social ont été installés dès avril dans les réserves de son hyper, à Angers. Assistante de caisse, elle a dix ans de boîte et gagne 1.070 euros net par mois. En 2010, la hausse des salaires tourne autour de 1%. Une réalité en décalage avec la com du groupe.
«C’est choquant», juge Dominique Beltrand, de la CFE-CGC. Miguel Enguelz craint, lui, la réaction des salariés. «Derrière ce plan, il n’y a rien, regrette-t-il. Ce sont des hommes de marketing qui nous dirigent. Le seul projet d’Olofsson, c’est 4 lignes d’objectifs financiers.» En Italie, en Espagne, en Belgique, c’est pire : le groupe a dénoncé les conventions collectives dont profitaient ses salariés pour s’aligner sur ses concurrents, moins-disant socialement.
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