Usine d'un monde en crise, la Chine a décidé de soutenir sa demande intérieure, désormais stratégique pour son développement.
La session annuelle de l'Assemblée nationale populaire de Chine, autrement dit le parlement, revêt cette année un caractère particulier puisqu'à l'issue des travaux qui ont débuté ce mardi et dureront deux semaines, une page de l'histoire de la Chine sera tournée. […] Des projets de réformes vont être discutés qui prévoient des changements majeurs.
[…] Sur le plan économique, le cap décidé par les deux derniers plans quinquennaux est plus que jamais maintenu : dégager une croissance économique annuelle à un taux de 7%, même si chaque année il est supérieur à ce seuil (+7,8% en 2012), mais surtout rééquilibrer cette croissance, tirée par les exportations, en favorisant la consommation intérieure.
Car depuis la crise de 2008, Pékin a compris que son développement était trop dépendant des marchés extérieurs. En outre, la hausse du niveau de vie d'une grande partie de la population va se transformer en un gigantesque marché dont les entreprises chinoises comptent bien bénéficier pleinement. «Nous devons nous focaliser sur la hausse de la demande intérieure qui est notre stratégie à long terme pour le développement national», a martelé Wen Jiabao à l'ouverture de la session, pour son dernier discours en tant que Premier ministre. Dressant le bilan de son mandat de dix ans, il a aussi montré ce que devait être le chemin à suivre à l'avenir.
Améliorer les revenus des personnes
Le développement de cette consommation intérieure est en effet devenu une obsession. «Pour augmenter la consommation individuelle, nous devons améliorer les revenus des personnes, nous assurer que leurs attentes seront satisfaites, susciter leur envie, améliorer l'environnement pour consommer et faire dépendre davantage la croissance économique de cette consommation», a insisté Wen Jiabao.
Mais pour cela, le nouveau gouvernement va devoir mettre en place un ambitieux plan en matière sociale. En effet, pour le moment, les Chinois préfèrent épargner une partie de leurs revenus pour faire face aux imprévus : problèmes de santé ou perte d'emploi. D'ores et déjà, le gouvernement a promis d'apporter quelques 42 milliards de dollars au développement de la couverture de santé, soit un montant en hausse de 27% sur un an, et les dépenses publiques consacrées à l'emploi et à la protection sociale vont augmenter substantiellement.
Des mesures en faveur des immigrés de l'intérieur et des paysans
Plus spécifiquement, les autorités veulent que les travailleurs immigrés de l'intérieur, qui ont assuré durant les deux dernières décennies le boom de l'économie chinoise grâce à leurs bas salaires et leur flexibilité, puissent eux aussi bénéficier d'une couverture de santé et sociale.
De même, les droits de propriété devraient clairement être établis pour assurer aux paysans la jouissance du sol. De nombreux scandales ont en effet secoué le pays depuis des années, liés à l'expropriation manu militari de paysans par des pouvoirs locaux voulant spéculer sur le boom immobilier. Ce secteur reste d'ailleurs un sujet de préoccupation central, à la fois pour la corruption qu'il génère mais aussi pour la spéculation à l'origine d'une bulle qui se fait menaçante. Les crédits généreusement accordés durant des années font craindre de nombreux défauts dans les remboursements en cas de chute des prix.
Des prix de l'immobilier trop élevés
En outre, la persistance de prix élevés est un facteur de fracture sociale, une large partie des Chinois ne pouvant pas accéder à la propriété. Pour calmer cette spéculation, les autorités ont pris des mesures comme la restriction du crédit et une remontée des taux. Depuis la semaine dernière, une taxe de 20% est appliquée sur les bénéfices réalisés sur les ventes d'immobilier.
Pour autant, la tendance haussière ne faiblit pas. A Shanghaï, ville certes très prisée, les prix ont augmenté en moyenne de quelque 40% sur un an. Pékin est obligé de piloter ce secteur avec précaution car, selon les calculs du Fonds monétaire international (FMI), le BTP pèse plus de 12% du PIB.
[…] L'inconnue reste le calendrier de ces réformes, qui touchent la société mais pas le parti communiste, toujours seul détenteur du pouvoir. Un parti qui, lui, n'a pas prévu de réformer son fonctionnement.
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