Pour que la voix du peuple soit prise en compte :ribouldingue a écrit : Il y a certainement d'autres solutions que de noyer finalement tout le monde. Le dialogue par exemple.
Hors cet arqueboutage sur cette loi est à mon sens un refus de dialogue la part de certains.
Le référendum demeure un instrument de démocratie sous-employé et mésestimé. Deux pays font exception à ce constat: les États-Unis et la Suisse. Dans ces pays, le référendum et l'initiative populaire sont employés avec une intensité et à une échelle uniques au monde.
Dans la plupart des États américains et en Suisse, le référendum est bien sûr obligatoire pour la réforme de la constitution; il l'est aussi pour l'adoption de certaines lois. On y rencontre aussi l'initiative populaire sous deux formes, directe et indirecte. Dans le premier cas, un groupe de citoyens, s'il recueille dans une pétition un nombre suffisant de signatures d'électeurs, peut soumettre au vote populaire une loi ou une question de son crû. Il peut aussi obliger par ce moyen le gouvernement à soumettre au vote populaire une loi adoptée par son Assemblée. Ordinairement, une loi adoptée à la suite d'un vote populaire ne peut être amendée que par le peuple lui-même. Dans le deuxième cas, la pétition est d'abord soumise au parlement; s'il refuse de la prendre en considération, le contenu de la pétition descend vers le peuple.
En dehors de la Suisse et des États-Unis, on observe que le recours au référendum - le plus souvent à l'initiative des gouvernements - augmente dans les démocraties. En France, le président Chirac a proposé d'élargir le champ du référendum aux questions de société. Le référendum est de plus en plus présent dans la vie politique de l'Italie. Il est assez fréquent en Australie, en Nouvelle-Zélande et en Irlande.
À moyen terme, il faudra envisager d'inscrire le référendum - peut-être l'initiative - dans notre système politique. Depuis quelques décennies, ce système a eu tendance à transférer le pouvoir de décision du Parlement vers des bureaucraties expertes et peu imputables, puis aux juges, non élus. C'est une tendance inévitable, observable dans nombre de pays: un État qui a vocation à régler dans le détail la vie sociale ne peut confier cette mission complexe aux seuls parlementaires. Une façon de rééquili-brer notre système politique, de manière à donner au peuple un pouvoir de contrôle réel sur les décisions des gouvernants, serait de lui faire prendre part au gouvernement par le référendum et l'initiative. C'est une avenue que tous les démocrates devraient prendre la peine d'étudier. Assurément, les oligarques de notre Monde abhorreraient cette idée.
par Marc Chevrier
paru dans L'Agora, volume 3, no 3, décembre 1995, p. 26