Social, santé : le glissement sémantique des mots

Réagir sur l'actualité ou la vie quotidienne, faire part de son humeur, lancer un débat... Ce forum généraliste est dédié à tous les thèmes qui vous préoccupent (en dehors des Dossiers ci-dessous).

Modérateurs : superuser, Yves

maguy

Social, santé : le glissement sémantique des mots

Message par maguy »

Je viens de trouver ce texte très intéressant qui explique comment, nous sommes passés de travailleurs (valeur positive) à salarié (considéré comme une charge) et comment l'état-providence n'est que l'appropriation de notre bien commun.

Extrait :
L’ère industrielle a vu s’identifier plus clairement qu’auparavant la classe des travailleurs. Leur appellation au contenu positif signifiait le caractère actif par nature de celui dont la fonction sociale était de vendre sa force de travail, physique ou intellectuelle. Et, comme « tout travail mérite salaire », nul ne contestait la légitimité d’une rémunération. Tous les économistes, même les plus libéraux savent que seul le travail produit de la richesse, et la question de la répartition de celle-ci est au centre de la question sociale.

Quand le « travailleur » devient le « salarié »

Cette simple évidence que le travailleur était le créateur de la richesse était déjà dérangeante pour ceux qui tirent leur profit du travail d’autrui et nous savons que la part reversée en salaire ne cesse de diminuer au profit des revenus du capital et des actionnaires…À cette appellation trop révélatrice d’évidences, les théoriciens de la pensée libérale ont su opposer une mutation sémantique en stigmatisant un mot que la lutte des classes avait selon eux trop popularisé : le travailleur est devenu « salarié »…

Le « salarié » est donc né, à la fois le même et complètement différent, car on a changé le regard porté sur lui en changeant le nom qui le désignait. Il reçoit un salaire, il est donc un bénéficiaire recevant un avantage ! Lui qui était actif devient passif, et le contenu valorisant de son ancienne nomination a été gommé : plus rien n’indique qu’il est producteur de richesse ! Il reçoit de son employeur, au travers d’un salaire dont le taux comme la légitimité peuvent être interrogés. Ce salaire qui était un dû pour le travailleur est devenu une charge pour l’employeur dont l’augmentation serait un obstacle à la productivité. Cette charge est la première variable d’ajustement des décisions dictées par des intérêts autres que ceux des travailleurs eux-mêmes !
article complet et source

Ca va mieux en le disant, que n'ai-je ce don de transcrire en mots ce qui est si clair :cry:
tristesir

Re: Social, santé : le glissement sémantique des mots

Message par tristesir »

J'aime bien cette idée de veille sur le langage qui est forgé pour suggérer des idées, sans en avoir l'air. Ces idées finissent par s'imposer par ce long travail de sape qui commence par la colonisation du langage.

La plus grande victoire du Sarkozysme c'est son emprise sur le langage.

Rappelez-vous les expressions: "plan social" (qu'est qu'il y a de social à confisquer l'emploi de quelqu'un?)
"charges" utilisé comme synonyme pour cotisations sociales (mais qui n'est pas un synonyme bien sûr) et bien d'autres qu'on n'identifie pas immédiatement et qui passe sous le filtre de notre vigilance.
hubert23

Re: Social, santé : le glissement sémantique des mots

Message par hubert23 »

«Loi de modernisation sociale»
Qu’il faut interpréter comme :

«Ensemble de textes de lois destinés aux salariés et dont l’objectif consiste à diminuer voire supprimer les acquis sociaux des trente glorieuses».

«La plus grande victoire du Sarkozysme c'est son emprise sur le langage.»
Entendu ce jour sur à la radio, le pouvoir du Sarkozysme est caractérisé par la communication à outrance, la «propagande de luxe».
maguy

Re: Social, santé : le glissement sémantique des mots

Message par maguy »

le pouvoir du Sarkozysme est caractérisé par la communication à outrance, la «propagande de luxe».
Ce serait trop simple, même si on n'a jamais eu autant de moyens de communication ou d'information. On dirait que ces moyens modernes empêchent de penser, surtout assénés tous les jours...

"Les minorités intelligentes doivent faire un usage continuel et systématique de la propagande, car elles seules comprennent les processus mentaux et les habitudes sociales des masses et peuvent tirer les ficelles qui contrôlent l'opinion publique. Les dirigeants peuvent embrigader l'opinion publique tout à fait comme une armée le corps de ses soldats. Ce procédé de gestion du consentement est l'essence même du processus démocratique."
Bernays en 1949, cité par Chomsky

Les techniques de propagande, même à l'époque ou n'existaient que les journaux écrits et la radio ne sont pas nouvelles, il faut répéter tous les jours, asséner sur la masse, jusqu'à ce qu'elle croit que l'idée vient d'elle.

Et plus c'est gros, plus ça passe !
diety

Re: Social, santé : le glissement sémantique des mots

Message par diety »

A ce sujet il y a quelques jours, j'ai dressé l'oreille quand un journaliste d'une radio française faisait la différence entre restructuration et plan de licenciement, car en Allemagne, restructuration et plan de licenciement est sémantiquement équivalent depuis quelques années.
Dernière modification par diety le 16 mars 2009, modifié 1 fois.
tristesir

Re: Social, santé : le glissement sémantique des mots

Message par tristesir »

L'emploi du mot "restructuration" seul gomme et dissimule les conséquences sociales (licenciements, vies brisées...)
du processus.
Répondre