Les entreprises, premières assistées de France

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Modérateurs : superuser, Yves

superuser
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Les entreprises, premières assistées de France

Message par superuser »

Ces fortunes du CAC 40 qui se bâtissent sur le dos des contribuables

Le cas Henri Proglio est l’arbre d’indécence qui cache une forêt de cupidité. En toute discrétion, vingt patrons et dirigeants de société du CAC 40 viennent d’encaisser une partie de leurs gains en stock-options : près de 20 millions d’euros. Ces énormes plus-values ne doivent rien à l’utilité sociale de ces « élites » mais reposent plutôt sur l’accaparement de richesses produites par d’autres.

La crise, quelle crise ? Vingt PDG et hauts dirigeants de grandes entreprises ont perçu près de 20 millions d’euros de plus-values grâce à la vente de leurs stock-options fin 2009. Sur le podium de ces heureux gagnants : le PDG d’Alstom, Patrick Kron, avec 2,5 millions de gains, arrive largement en tête, devant le PDG de Vinci, Xavier Huillard, avec 2 millions, talonné par le directeur financier de GDF-Suez, Gérard Lamarche, avec plus de 1,9 million d’euros (la plus-value de son supérieur, Gérard Metrallet, PDG de GDF-Suez, s’élève plus modestement à 1,3 millions). Ces impressionnants revenus – qui s’ajoutent à leurs salaires, primes et retraites complémentaires – viennent-ils récompenser leur capacité à avoir créé et construit ces grands groupes industriels ?

Les trois PDG ont grandi dans le cocon de la haute fonction publique : Xavier Huillard au sein de la Direction départementale de l’équipement, Patrick Kron dans les méandres du ministère de l’Industrie puis de Pechiney, alors nationalisée, Gérard Mestrallet à la direction du Trésor puis au sein de Suez, elle aussi nationalisée. Bref, ils savent administrer mais n’ont rien créé. Leurs revenus reflètent-ils alors leurs incomparables compétences de gestionnaires qui savent allier performances économiques, bonnes pratiques sociales et politiques environnementales ? Que nenni. Ces bonus illustrent plutôt leur étonnante capacité à gérer une organisation qui s’accapare les bénéfices que génèrent l’entreprise, en partie grâce à l’argent des contribuables, sans pour autant en faire profiter leurs salariés. Une pratique qui dépasse largement le cas très médiatisé d’Henri Proglio, premier double PDG de l’Histoire de France.

Les contribuables embobinés

Au printemps 2007, avant la crise, la plus-value potentielle accumulée par les patrons du CAC 40 dépassait le milliard d’euros ! Patrick Kron avait accumulé 14 millions de plus-values en 2008. Après avoir encaissé son pactole de 2009, il lui resterait toujours 10,5 millions d’euros potentiels à empocher avec les actions qu’il n’a pas encore vendues. Ces revenus s’ajoutent bien évidemment à son salaire de dirigeant et à ses primes. Le PDG s’était augmenté de 33% en 2006, portant son salaire annuel à plus de 2,2 millions d’euros. Une augmentation moins médiatisée que les 4 millions d’euros de parachute doré que son prédécesseur Pierre Bilger s’était accordé en laissant, en 2003, une entreprise exsangue. Sous la pression, l’ancien PDG y avait finalement renoncé.

Si le PDG d’Alstom gagne autant, c’est que ce polytechnicien a accompli des « miracles ». En 2006, Alstom vient tout juste d’éviter la faillite grâce à un plan de sauvetage de l’Etat et à des milliers de suppressions d’emplois. L’Etat signe au groupe industriel un chèque d’un demi milliard d’euros en rachat d’actions et en prêts. Quatre ans plus tard, grâce aux contribuables, Alstom est sauvé et ses performances boursières sont au top. A l’automne 2009, l’entreprise emploie moins de 15 000 personnes en France contre 27 000 cinq ans plus tôt ! Elle va continuer de réduire ses « coûts », en supprimant notamment 2 000 emplois. Le « miracle » de Patrick Kron, c’est d’avoir su multiplier chômeurs et subventions.

Les salariés précarisés

La stratégie des dirigeants de Vinci, géant du BTP, est plus roublarde. Son ancien PDG, Antoine Zacharias, en a d’ailleurs fait les frais. Au printemps 2007, celui-ci avait accumulé près de 255 millions de plus-values potentielles sur ses stock-options ! Poursuivi pour « abus de bien sociaux » par le tribunal de Nanterre, il sera jugé les 25 et 26 mars prochains. Les émoluments de son successeur paraissent aujourd’hui bien modestes. Les profits de Vinci, et donc la fortune de ses dirigeants, s’appuient en partie sur les « délégations de service public » et les « partenariats public privé » conclus avec l’Etat ou les collectivités territoriales.

Rien que pour l’année 2009, Vinci a obtenu la construction du Pont du Levant à Bordeaux (125 millions d’euros), l’édification des campus Paris rive gauche (273 millions) et de celui de l’école polytechnique (100 millions), la mise en place d’une station d’épuration sur l’île de La Réunion (21 millions), la gestion des aéroports de Rennes et Dinard (45 millions de chiffre d’affaires annuel) tout en augmentant sa participation dans ses filiales administrant déjà les aéroports de Grenoble, Chambéry, Clermont-Ferrand et Quimper. Vinci, ancienne Société générale d’entreprises, ne fait que reproduire les pratiques de son ancien propriétaire, Vivendi (ex Compagnie générale des eaux), qui a bâti sa fortune sur la rente de l’eau.

Côté politique sociale, le groupe s’enorgueillit d’avoir recruté 10.000 « emplois durables » en France. Précisons que les contrats de 18 mois – qui peuvent être des CDD - sont considérés comme « durables ». La situation sociale de l’entreprise semble très loin d’être paradisiaque. La précarité y est largement développée. Le turn-over des salariés est de 32% selon le bilan social de l’entreprise. La grande majorité des départs sont des fins de CDD ou de contrats en alternance, sans compter un recours important à l’intérim (équivalent à 10% des effectifs). Autant de salariés qui ne participent pas aux bénéfices. Le taux d’absentéisme y est important. Dans l’activité « route », qui comprend une partie des autoroutes anciennement publiques aujourd’hui privatisées, il atteint plus de 17 jours d’absence (plus de trois semaines de congé maladie) par an et par salarié. Soit le double du taux d’absentéisme moyen dans le privé. « En 2007, chacun d’entre nous a rapporté en moyenne 9 000 euros de plus-value annuelle au groupe qui s’endette par sa boulimie de croissance externe par le rachat d’entreprises », s’indignait la CGT, demandant, au vu des millions d’euros de primes et parachutes dorées que se sont accordés les membres du conseil d’administration fin 2008, à ce qu’il n’y ait aucun salaire en dessous de 1600 euros.

Les consommateurs floués

Quant à GDF-Suez, l’entreprise est en situation de quasi-monopole. Depuis 2004, alors que la privatisation progressive de Gaz de France commence, la multinationale ne cesse de critiquer le tarif réglementé du gaz, fixé par l’Etat. Le tarif réglementé lui aurait fait perdre 1,6 milliards d’euros entre 2004 et 2008. Cela n’a pas empêché l’entreprise de réaliser en 2008 le plus gros bénéfice de son histoire : 6,5 milliards d’euros, dont les trois quarts ont été reversés aux actionnaires (dont l’Etat). Ces « pertes » n’ont pas gêné outre mesure le PDG Gérard Mestrallet qui, en plus de la vente de ses stock-options fin 2009, s’était accordé en 2008 une augmentation de 15% avec un salaire supérieur à 264 000 euros mensuels. Étrange coïncidence : l’année 2008 s’est soldée pour le consommateur d’une hausse de 15% de sa facture de gaz, sans que le service rendu se soit amélioré.

La fédération de consommateurs UFC-Que Choisir pointe la dégradation des réseaux de distribution, de GDF comme d’EDF : « Ces réseaux se dégradent insensiblement depuis des années. Les transformateurs sont moins bien entretenus, les canalisations tardent à être remplacées (…). Le niveau de sécurité reste largement acceptable, mais l’ensemble devient plus fragile et les pannes plus fréquentes. » En parallèle, un mouvement social mené au printemps 2009 dans les filiales de distribution de GDF et d’EDF, dénonçait les inégalités de salaire, la dégradation des conditions de travail ou le recours de plus en plus massif à une sous-traitance aux dépens de la qualité. Ces grèves ont été brutalement réprimées en interne. La prédation des richesses publiques par la nouvelle oligarchie au pouvoir se poursuit en toute impunité, sous la protection du bouclier fiscal.

Ivan du Roy pour Basta!

http://www.bastamag.net/spip.php?article880
superuser
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20 milliards aux entreprises sans aucune contrepartie

Message par superuser »

L’exonération fiscale des plus values sur les cessions de participations, introduite en 2004 sous l’égide de François Copé et de Nicolas Sarkozy, alors respectivement ministres du Budget et de l’Economie, s’est traduite par une perte de revenu de plus de 20 milliards sur les trois dernières années. Le député Didier Migaud, Président de la Commission des finances de l’Assemblée Nationale, a demandé à Bercy quelles étaient les justifications de ce cadeau gigantesque en des temps difficiles. Dans leur réponse conjointe, Eric Woerth et Christine Lagarde conviennent que leurs services n’ont pas été en mesure de mesurer des résultats tangibles, ni en terme d’emploi ni en terme d’installation d’entreprises en France. « Je continue de penser que l’évaluation produite par le Gouvernement ne justifie pas le maintien d’un tel niveau d’exonération, qui s’apparente plutôt à du dumping fiscal », conclut Didier Migaud. Sans commentaire.


Le projet de loi de finances pour 2010 avait fait apparaître l’explosion du coût de l’exonération des plus-values de cession de titres de participation des entreprises entrée en vigueur en 2007.

Alors qu’il devait initialement être contenu à 1 milliard d’euros, l’impact budgétaire de cette exonération est passé de 3,4 milliards en 2007 à 12,5 milliards en 2008 puis encore 6,1 milliards en 2009, soit un total de 22 milliards de pertes de recettes fiscales en trois ans ! Devant un coût aussi élevé et l’absence d’explication, j’ai sollicité à deux reprises le gouvernement pour obtenir des informations.

Dans un second courrier daté du 5 février et accompagné d’une annexe, les ministres Lagarde et Woerth veulent minimiser l’impact budgétaire et justifier la mesure.

Bercy cherche d’abord à minorer l’impact budgétaire de la mesure en expliquant que le coût est calculé à partir de l’imposition théorique au taux normal. Mais cette objection méthodologique vaut pour toutes les dépenses fiscales, qui sont toutes calculées de la même manière, en référence au taux normal d’imposition. La retenir reviendrait donc à s’interdire tout débat sur la dépense fiscale !

Deuxièmement, Bercy estime que de nombreuses opérations n’auraient pas été réalisées sans cette mesure. On peut en douter d’une part au regard de la conjoncture, qui a été, Bercy le souligne d’ailleurs, favorable à ce type d’opérations ; d’autre part quand on constate que parmi les principales opérations bénéficiaires, figurent des opérations de LBO menées par des fonds d’investissement. Ces opérations, qui impliquent précisément une revente à court terme des parts de sociétés acquises par endettement, auraient de toute façon été soldées. Bercy n’explique d’ailleurs pas pourquoi de très nombreuses opérations de « hedge funds » (fonds d’investissements) ont bénéficié d’une mesure qui ne leur était pas apparemment destinée.

S’agissant de l’évaluation de l’efficacité de la mesure, la réponse reste très lacunaire.

En expliquant qu’il est impossible d’identifier une « délocalisation » ou une « relocalisation », Bercy admet en effet l’impossibilité d’attribuer à cette mesure l’augmentation constatée du nombre de holdings suivies par la Direction des grandes Entreprises (DGE), passé de 1112 en 2007 à 1276 en 2009.

Enfin, Bercy reconnaît qu’il ne lui est pas possible d’apprécier l’impact sur l’emploi de la mesure.

Finalement, je suis tenté de renvoyer au site internet de l’AFII, l’Agence française chargée d’attirer des investisseurs étrangers en France. Cette agence, qui qualifie la France de « véritable paradis fiscal » pour la recherche et l’innovation, vante en effet sans fioritures les mérites de cette exonération de plus-values en parlant de fiscalité attractive.

Je reste convaincu qu’une niche fiscale de cette ampleur aurait dû être votée avec une meilleure information du Parlement quant à son impact budgétaire. Je continue de penser que l’évaluation produite par le Gouvernement ne justifie pas le maintien d’un tel niveau d’exonération, qui s’apparente plutôt à du dumping fiscal.

Je continuerai à soutenir les amendements visant à réduire la portée et l’impact budgétaire de cette mesure.

Didier Migaud, député Socialiste, Président de la Commission des finances de l’Assemblée Nationale

http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2978
maguy

Re: Les entreprises, premières assistées de France

Message par maguy »

Mince, il y a encore des socialisses qui pensent... socialistes ?
auxi

Re: Les entreprises, premières assistées de France

Message par auxi »

Didier Migaud, député Socialiste,
Lequel Migaud, "socialiste", est pressenti pour remplacer Philippe Séguin à la Cour des comptes… À l'heure qu'il est, je ne sais pas où cela en est, mais si cela se fait, ce sera un bel édredon pour étouffer les quelques scrupules que le monsieur pourrait encore avoir…
superuser
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Re: Les entreprises, premières assistées de France

Message par superuser »

Il est nommé, je l'ai posté sur la file consacrée au décès de Séguin dans "Vos infos".
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