Le RSA, ça ne marche pas !

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Modérateurs : superuser, Yves

superuser
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Le RSA, ça ne marche pas !

Message par superuser »

Un an après le vote de la loi sur le revenu de solidarité active, les trois quarts des « travailleurs pauvres » n'ont pas fait valoir leurs droits. Beaucoup refusent de devenir des salariés « assistés ».

Surtout ne lui parlez pas du revenu de solidarité active (RSA). Delphine, 35 ans, un doctorat de droit en poche et une petite fille à charge, bouillonne de colère : « Je cherche du boulot dans un cabinet d'avocats à Perpignan mais on me propose 1.300 euros; alors, pour moi, c'est niet !» Le complément de salaire que pourrait lui apporter son inscription au RSA ? « Jamais ! rétorque-t-elle. Je ne veux pas être une assistée, je ne veux pas de carte de CMU, et je n'ai pas envie de rendre des comptes aux travailleurs sociaux… Je suis écœurée de vivre dans un pays où, quand on a bac + 8, on ne peut pas gagner sa vie décemment. Je demande juste un salaire convenable ! »
Delphine n'est pas la seule irréductible à refuser les quelque cent euros mensuels de RSA (Martin Hirsch estime à 110 euros en moyenne le montant du « RSA activité »). Six mois après l'inauguration du dispositif, le nombre de « travailleurs pauvres » percevant un complément de salaire est très loin des promesses avancées par le haut-commissariat aux Solidarités actives : seulement un salarié sur quatre pouvant bénéficier du RSA « activité », soit 370.000 foyers, a pour l'instant fait valoir ses droits.

Si le RSA « activité » est un complément de salaire versé aux travailleurs à revenus modestes ou à temps partiel, le RSA « socle » remplace le RMI et l'allocation parent isolé (API). Il est d'environ 450 euros mensuels pour une personne seule, et versé à 1,2 million de foyers. Un nombre qui pourrait exploser en 2010 avec l'arrivée dans les minima sociaux des chômeurs en fin de droits.

« Au départ, le RSA avait pour objectif de sortir de la pauvreté deux millions de salariés. Désormais, Martin Hirsch espère toucher 1,6 million de travailleurs à revenu modeste : il vaut mieux en effet revoir les objectifs à la baisse plutôt que d'avouer qu'on ne les a pas atteints ! » relève Antoine Math, chercheur à l'Institut de recherches économiques et sociales (IRES). Il ne faut donc pas se fier au satisfecit de Martin Hirsch, qui concédait récemment « un démarrage un peu lent » du dispositif. Car la surprise est générale. Par exemple, en Île-de-France, l'écart constaté entre les estimations et le nombre d'inscrits est édifiant. Dans le département des Hauts-de-Seine, seulement 800 « travailleurs pauvres » sur les 33.000 attendus se présentaient à la caisse d'allocations familiales (CAF) au mois de juin. En Seine-Saint-Denis, on comptait à la même période 6.000 allocataires du RSA « activité » pour une estimation de 40.000 dossiers.

Qu'est-ce qui ne tourne pas rond dans le RSA ? Le département des Pyrénées-Orientales, où la montée en charge du RSA « activité » atteint moins de 15% de l'estimation initiale, est le seul à ce jour à s'être penché sur la question. Une opération phoning a été lancée par le conseil général auprès de 170 allocataires potentiels pour tenter d'éclaircir le mystère. Il en ressort, outre un manque d'information, une réticence à remplir tous les trois mois le dossier d'inscription. Un formulaire de 6 pages où il faut notamment déclarer les revenus de son épargne... mais aussi de celles de son conjoint et de ses enfants. Avec possibilité pour la CAF d'accéder au Livret A ou au plan d'épargne logement de ces petits épargnants. De quoi dissuader bon nombre d'allocataires potentiels, peu enclins à sacrifier leur secret bancaire pour quelques kopecks... « Beaucoup de personnes touchent un complément de salaire de moins de 50 euros par mois, rappelle Bruno Grouès, directeur de l'action sociale à l'Uniopss, qui fédère les organismes sanitaires et sociaux. Elles n'ont pas envie de réaliser des démarches complexes, qui peuvent sembler intrusives pour si peu. »

Plus surprenant, 25% des personnes interrogées par le conseil général des Pyrénées-Orientales déclarent refuser de faire une demande « par principe » ou pour des raisons « idéologiques ». « L'extrapolation de ces résultats doit être faite avec prudence, conclut l'enquête. Mais on peut penser qu'au moins 25% des personnes qui ouvrent droit au RSA ne (le) demanderont jamais. » Soit près d'un demi-million de personnes au niveau national. «La preuve que, quoi qu'en disent les libéraux, on n'est pas des êtres rationnels. On n'arrive pas aux guichets sociaux avec notre calculette », ironise Mamadou Martin à la permanence d'Agir ensemble contre le chômage (AC!).

Que recouvrent au juste ces « principes » ? Certains y voient un sentiment grandissant de méfiance envers le gouvernement. D'autres un processus, conscient ou non, d'autolimitation du recours aux prestations sociales. Quoi qu'on en pense, le mélange inédit entre les revenus de l'aide sociale et ceux du travail, qui est au fondement même du RSA, explique sans doute ces réticences. « En mêlant le travail et l'assistance, le RSA change la nature même du contrat républicain : désormais, il est acté que le salaire ne suffit plus pour vivre », souligne Roland Giraud, directeur général adjoint des services au conseil général des Pyrénées-Orientales. Un changement qui ne va pas de soi, explique Antoine Math : « Il faut comprendre que, pour un salarié, toucher le RSA, c'est accepter de changer de statut.» C'est se confronter à sa propre dégringolade dans l'échelle sociale - que celle-ci soit réelle ou non. « Jusqu'à présent, les salariés gagnant mal leur vie s'étaient construit une identité sociale dans un mouvement de différenciation des allocataires de minima sociaux, analyse Nicolas Duvoux, sociologue à l'université Paris-Descartes. Peut-être plus dans ces populations que pour les "habitués" des minima sociaux, le recours à "l’assistanat" a un coût psychique et identitaire. »

Ce changement majeur n'a pas échappé au gouvernement, qui n'a pourtant de cesse de stigmatiser les « assistés » en même temps qu'il encourage le développement des working poor. « On ne peut que regretter ce genre de discours [sur l'assistanat], qui s'est d'ailleurs intensifié au cours de la campagne présidentielle par l'un et l'autre candidat !, affirme Bruno Grouès. Dans ce contexte, le RSA apparaît complètement schizophrénique... » Et le refuser, une tentative désespérée de résister à ce monde un peu fou.


Eva Delattre pour Politis
superuser
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Avec le RSA, on y perd sur toute la ligne !

Message par superuser »

Un témoignage d'une ex RMIste chopé sur le site d'AC!

http://www.ac.eu.org/spip.php?article2046
Ci-après lettre que j’ai envoyée à Martin Hirsh. A ce jour, 23/12/2009, pas eu de réponse. A ce jour aussi, réponse de la CAF qui me certifie n’avoir pas droit cette année à la prime de Noël. Il est vrai que cette année je dois être plus riche avec leur RSA. Un 3/4 de smic pour vivre à deux. Merci PAPA SARKO NOEL !

le 7 décembre 2009

Monsieur le haut Commissaire,

Par la présente, je vous expose ma situation. Je suis divorcée depuis 6 ans et élève seule un fils de 13 ans, sans aide financière de son père, qui étant atteint d’alcoolisme chronique, ne travaille plus, donc ne participe plus du tout à son éducation, ni même ne souhaite rencontrer mon fils.

Je suis âgée de 47 ans, ai trois fils de 27, 26 et 13 ans. Les deux ainés sont indépendants depuis 3 ans.

Après une longue période de chômage, et ayant une reconnaissance de travailleur handicapé, j’ai obtenu un contrat d’avenir dans une école, premier contrat signé le 1er juin 2006, puis reconduit 2 fois. Au 1er juillet 2009, grâce à ma reconnaissance de travailleur handicapé, j’ai été reconduite jusqu’au 30 juin 2010.

Jusqu’au 1er juin, je bénéficiais d’une partie de RMI de 110 € en complément de mon salaire d’EVS de 819 €. Je suis ensuite passée dans le système RSA.

Ce que je constate, c’est que cette année 2009 a fait chuter mes revenus.
Mon salaire pourtant est le même depuis 3 ans.

Début juin, je suis tombée malade à 2 reprises. Une première fois une semaine ; j’ai repris 3 jours, puis à nouveau en maladie pendant 20 jours. Sur ces deux arrêts, après 3 jours de carence à chacun de la Sécurité sociale, puis en demi-salaire, je me suis retrouvée le mois suivant avec le quart de mes revenus. A la rentrée scolaire, à ma demande de bourses des collèges, je suis passée en taux 1 alors que jusqu’ici je prétendais au taux 2. En effet, s’appuyant sur mes revenus de 2007 : revenu fiscal de référence 8696 €, il ne m’est à présent versé que 79 € de bourses par trimestre, et le collège après déduction de la part des bourses, m’a réclamé 160 € de demi-pension pour ce premier trimestre.

Courant octobre, je reçois une notification de la CAF pour me prévenir que mon APL était revue à la baisse à compter du 1er novembre car ils se basaient sur l’intégralité de mes revenus depuis la mise en place du RSA. J’ai touché ma prime pour l’emploi qui m’a permis de me renflouer un peu après mes deux arrêts maladie. Cette prime aussi a baissé par rapport à l’année précédente, pourtant sur des revenus et horaires équivalents.

Le mois dernier, j’ai reçu une taxe d’habitation de 196 €, taxe dont je n’étais pas redevable en étant sur le statut RMI. J’ai demandé un recours gracieux auprès des impôts pour cette somme et je ne sais quelle va être la réponse.

A ma dernière déclaration trimestrielle pour le RSA, ayant eu cet arrêt maladie, la CAF m’a notifié ne pas tenir compte des indemnités journalières de la sécurité sociale dans mes revenus, et donc a baissé mon RSA de 30 € par mois pour les 3 mois à venir.

Pour cloturer l’année, je me demande aussi si je vais prétendre à la prime de Noël puisque la CAF n’était pas sûre puisque je suis dans le RSA avec activité.

J’entends dire aussi qu’avec le RSA, je ne devrais plus avoir droit à la prime pour l’emploi, soit disant parce que ce RSA serait une avance sur cette prime.

Il paraitrait aussi qu’avec les nouvelles lois, mon contrat actuel, "contrat d’avenir", ne pourrait pas être renouvelé une dernière fois après le 30 juin 2010. Je pensais pourtant que ce contrat pouvait grâce à ma reconnaissance de travailleur handicapé, qu’en tout mon contrat pouvait durait 5 ans. Je sais que je ne suis pas la seule mère dans cette situation, côtoyant tous les jours d’autres mères dans ce cas, en situation précaire, et très souvent seules à devoir subsister à leurs enfants, les pères si souvent absents comme celui de mes fils.

Je fais partie de ces mères qui sont, à force de porter tout ça toute seule, en essayant de donner une éducation à mon fils aussi descente que possible, fatiguée et déprimée.

Je tiens aussi à vous faire savoir que, parmi ces mères isolées, beaucoup en arrivent à se demander si leurs enfants ne seraient pas plus heureux en famille d’accueil qu’en face de mères à bout et désespérées devant tant de problèmes, qu’elles finissent par trop culpabiliser.

Je vous demande juste de répondre à toutes mes interrogations écrites ci-dessus, que ce soit toutes ces pertes de revenus, que le sort des personnes qui en arrêt maladie n’ont pratiquement plus rien pour subsister, mais aussi si la prime pour l’emploi ne sera plus versée, qu’avec de si faibles revenus nous n’aurons plus de quoi laisser nos enfants manger à la cantine, enfin si mon contrat de travail ne sera pas renouvelé au 30 juin 2010.

Je souhaite le plus de précisions sur ces questions pour savoir à quoi m’attendre sur l’année à venir et vous en remercie,

Je vous prie de croire, Monsieur le haut Commissaire, en mes sincères salutations,
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