C'est agréable de constater parfois qu'on n'est pas seul à prêcher dans le désert et qu'avec un minimum de clés de compréhension correctes et surtout plein de bon sens critique et d'analyse d'autres arrivent aux mêmes conclusions!
Monolecte, ton raisonnement est 200% exact.
Tu as relié en quelques phrases tout un train de mesures récentes qui prises séparément ne semblent pas faire sens (au contraire même, quand on dit au séniors "travaillez", que dans les faits les séniors ils trouvent quasi rien mais qu'on dit en plus qu'il faut repousser l'âge de la retraite!) . Mais ces mesures trouvent TOUTES leur cohérence par une analyse en termes de "réserve de main d'oeuvre" et de "pression exercée" sur un marché du travail qui doit être fait (et c'est la leçon que toute personne pigeant un minimum ce qu'est le NAIRU) de concurrence (entre salariés) mais "non libre et faussé" pour reprendre en le détournant le vocable du TCE. La découverte historique de Phillips en 58 sur la relation chômage anglais/salaires à l'origine du NAIRU (ça va forcer à réviser ses bases
http://lenairu.free.fr/pages/lenairuvitepag.html et
http://lenairu.free.fr/nairu_article_fi ... age001.gif )
ne disait rien d'autre: l'existence d'une main d'oeuvre non "utilisée à plein" (et donc ayant des difficultés pour subvenir à ses besoins dans un société majoritairement devenue salariale) influe historiquement sur le niveau des salaires et sur la docilité des salariés! Certains eurent tôt fait de comprendre que plutôt qu'être un simple résultat de sortie, le chômage pouvait devenir un FACTEUR DE PILOTAGE en ENTREE DU SYSTEME...
Toute l'évolution du pilotage par le haut de l'économie par le système monétaire, l'avènement des banques centrales et du système bancaire basé sur le crédit lui même reposant sur la création d'argent ex nihilo (à partir de RIEN) allaient permettre in fine de parvenir à ce but: transformer ce chômage en paramètre contrôlable et non en résultante involontaire fluctuante au gré des crises et des révoltes (toujours dangereuses!) comme ce fut le cas dans le premier siècle suivant l'avènement du capitalisme (à partir de 1850).
Le but est bien de recréer des clivages (une DUALITE pour reprendre le terme de l'OCDE) entre "castes" salariées, il faut donc des "intouchables" (au sens Indien) et des gueux pour donner à des "moins gueux" l'impression de pouvoir devenir des Bling Bling (et accessoirement leur expliquer lorsqu'ils ne parviennnent pas à devenir Bling Bling pour de vrai que c'est parce que les gueux sont des privilégiés rentiers assistés qui parasitent la société...).
Pour info, la relation Inflation/chômage est devenue moins claire depuis plus de 10 ans (en raison de la mondialisation des échanges et des capitaux, les prix chez nous dépendant en fait aussi désormais -et entre autres- du taux de chômage... chinois ou tchèque par exemple! ) mais le NAIRU continue d'être utilisé car ce qui se cache derrière c'est l'idée de pression pour fausser le marché du travail qui ne doit SURTOUT pas être libre! En revanche, l'OCDE (toujours elle!) a développé en interne un concept qui lui est beaucoup plus "robuste" et qui relie chômage et SALAIRES (et non "inflation" ou hausse des prix) et qui s'appelle le NAWRU: le W pour Wage (salaire) à la place de I pour Inflation. On retombe en fait sur la découverte unitiale et fondamentale -bien qu'évidente!- de Phillips: salaires et chômage sont inversement liés...
http://fr.wikipedia.org/wiki/NAWRU
Ainsi toute les mesures qui visent depuis disons 3-4 ans à anticiper ce recul prévu de la "population active mobilisabable" (pour aller se vendre aux employeurs) rentrent dans cette logique de maintenir cette pression sur le marché du travail.
Dit de manière un peu crue, il faut remettre désormais en rayon ce qu'on avait délibérément gardé au chaud en arrière boutique depuis 20 ans côté main d'oeuvre. Après avoir acheté la paix sociale en finançant les "dégazages" de main d'oeuvre agée et couteuse (et moins docile!) de l'industrie (pré-retraites, CASA, et j'en passe), ou en indemnisant à peu près les chômeurs pour éviter qu'il ne s'agrégent et deviennent une force organisée poussée par le manque de ressources, il faut désormais les remettre en rayon et SURTOUT les dociliser en les FORCANT à reprendre un emploi comme s'en vante Sarkozy. Il faut aussi éviter que l'Etat ne pique cette main d'oeuvre dispo (il y a deux ans 80 des jeunes voulaient encore fonctionnaires! L'horreur pour un MEDEF ça....) , ce qui explique la casse du statut de fonctionnaire, le recours au privé, le non remplacement des départs, etc, tu l'as parfaitement expliqué Monolecte!
Je passe sur la schizophrénie qu consiste à lutter contre l'immigration clandestine (pour ramasser les électeurs de Le Pen disons le) MAIS à encourager l'immigrationn CHOISIE pour raison éco qui vise la même chose: scier par le bas les salaires et les avantages des INSIDERS... Pompidou l'avait déjà écrit paraît-il dans ses mémoires à propos de immigrés des années 60/70, si quelqu'un sur le forum retrouve la source au cas où...
Sans parler des possibilités de délocalisation et du chantage associé qui sont apparus comme un nouveau et puissant facteur substitutif (et complémentaire en fait) à la peur de la précarité et et du chomage. Je rajoute aussi le taux d'endettement des ménages, qui boucle les menottes de la servitude: qui s'endette à mort DOIT accepter ce qu'on lui donne (cf et désormais France...).
Bref tout cela s'appelle du contrôle social et oui le NAIRU n'est qu'une expression de cette vélléité de contrôle social par une partie dominante de la société. C'est une clé de compréhension qui quand on la possède fait gagner beaucoup de temps à piger les trucs. On peut zieuter les infos de loin en étant plus distant car les images confuses qui se succèdent laissent la place à un film dont le scénario est connu d'avance...
Il y a 5 ans je participais à un forum de DRH régionaux sur le supposé choc démographique et de main d'oeuvre de 2006, organisé par LES ECHOS . Le directeur de l'APEC a dit: "je me rappelle qu'il y a pas mal d'années, le "chomage incompressible" était à 2% (on prenait alors en référence celui du Japon). Il serait aujourd'hui à plus de 9% (il faisait bien sûr référence au NAIRU français calculé). A un tel niveau je ne crois pas qu'il y aura de vraie conséquence salariale sérieuse en raison de ce choc".
Clair non?
GdB