D'après ce que j'ai pu lire sur la dépression, on ne sait toujours pas grand-chose. Il semblerait qu'il y ait une prédisposition génétique, c'est à dire que chaque personne arrive avec une prédisposition de résistance aux accidents de la vie + ou - élevée. Comme toujours, rien n'est déterminé et les premières années de la vie, l'environnement social, familial, affectif, renforcent les mécanismes de résistance au stress psychique ou les diminuent. Il semblerait aussi que la dépression, plus qu'une maladie, soit un mécanisme de défense face à "une surdose" de stress. Il peut y avoir usure psychique suite à un petit stress mauvais en continu (comme le harcèlement moral au boulot) ou rupture psychique suite à un stress intense (ce que l'on appelle les accidents de vie : deuil, violence).
Généralement, lorsque la résistance au stress d'une personne arrive près de ses limites, il y a différents paliers de signes annonciateurs : les maladies psychosomatiques, maladies de peau, mal de dos, etc. les maladies psychosomatiques sont des signaux de détresse d'un organisme surmené, l'indication qu'il faut lâcher du lest et prendre le temps de se reposer.
Dans notre société hyperproductive, les phases de repos, pourtant totalement nécessaires, sont très mal vues : même les vacances doivent être actives, aujourd'hui (
bande de bites!

). Donc, on prend des médocs et on maintient
la pression.
Donc, contrairement au corps médical (et
sur-pharmacisé), j'ai tendance à penser que la dépression est moins une maladie qu'il faut soigner à tout prix et surtout avec beaucoup de psychotropes que
l'extrême mesure conservatoire d'un organisme épuisé dont le propriétaire est resté sourd à tous les signaux.
Une dépression place son sujet hors la vie, le met en retrait du gros des activités physiques et psychiques de la vie quotidienne, peut aussi développer un édredon de torpeur entre le sujet et une réalité qui est devenue brusquement insupportable.
Pour moi et quelques trop rares spécialistes, la dépression devrait se traiter par du repos à haute dose, l'abandon de l'ensemble des responsabilités sociales, du temps et bien sûr de la parole. Les psychotropes ne devraient avoir pour tâche que d'accompagner le repos en gommant les effets secondaires les plus délétères de cette mise au repos forcé, puisque l'aspect mélancolique du truc peut amener des tendances suicidaires.
Seulement, voilà, notre monde qui bouge et qui produit n'a
pas de temps pour le repos des hommes et des âmes. Faut blinder le mec pour qu'il soit
sur pied le plus rapidement possible et qu'il reprenne le collier. Donc il prend des pilules du bonheur et retourne épuiser la carcasse dans le pogo de la vie moderne.
Jusqu'à ce qu'il casse définitivement. Et qu'on le jette. Car nous n'avons pas plus de considération pour nos jouets cassés que pour nous-mêmes. Je pense qu'il doit y avoir beaucoup de gens qui ont poussé la machine au-delà de ses limites au RMI et en ASS...
Je pense aussi qu'il n'y a pas de hasard.
Ce n'est pas par hasard que le pays le plus productif du monde est aussi celui qui consomme le plus de psychotropes.
Ce n'est pas par hasard que plus nous assimilons le repos à la paresse, plus le nombre de dépressions explose dans notre société.
Le culte de la performance marche sur le corps et l'esprit brisés de ceux qui ne peuvent plus soutenir la cadence. La dépression est souvent le dernier refuge avant la mort pour ceux qui n'en peuvent plus.
Nous pourrions pourtant juste réapprendre à nous respecter nous-mêmes. À nous reposer. À faire la sieste.
Mais voilà, les dépressions, avec leur batterie de médecins, de maisons de repos, de médicaments coûteux et de laboratoires avides de profit, cela produit du PIB.
Alors qu'un mec qui fait la sieste pour recharger ses batteries...