Appel contre la gauche de la honte

Réagir sur l'actualité ou la vie quotidienne, faire part de son humeur, lancer un débat... Ce forum généraliste est dédié à tous les thèmes qui vous préoccupent (en dehors des Dossiers ci-dessous).

Modérateurs : superuser, Yves

toit_de_chôme

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par toit_de_chôme »

Trinita a écrit : Les fausses sourdes muettes, à Paris, qui demandent des autographes (puis de la tune), c'est des roms ? Si oui :
Un dimanche de juillet*, du côté de l'Hôtel de Ville, il y en a une jeune qui vient vers moi pour son truc. Je lui dis que j'ai déjà signé. (Oui, en novembre, sur le Champs de Mars, j'avais signé pour une bonne femme. J'ai marqué des conneries, et je lui ai rendu son papier quand j'ai vu la dernière colonne, dans laquelle il faut marquer la somme qu'on donne. Elle avait râlé en sourd-muet. Je l'ai croisée un peu plus tard et - miracle ! elle parlait. Plus loin, une jeune ayant tenté sa chance, je lui ai dit que j'avais déjà signé et elle s'est barrée pas mécontente). Donc, là, à cette jeune, je ne mens pas vraiment en lui disant que j'ai déjà signé. Et elle me dit, en ni sourd ni muet, sans chouiner et avec le sourire "Mais il faut signer pour moi aussi". Je lui réponds gentiment que je n'vais pas signer pour tout le monde, et elle part, compréhensive, et avec le sourire.
Bon, je n'ai pas prouvé que les roms étaient des gens bien, mais en tous cas, c'est pas prouvé non plus que ce sont des gens mal.
ce ne sont pas forcement des Rom à mon avis. On peut aussi citer les faux manchots qui entrent dans le RER avec un bras, en ressortent avec deux. Ils sont embêtant aussi. Il sont pas forcement des Rom. Ils jouent sur la pitié.
Je pense aussi que des Roms cherchent à s'intégrer, s'ils pouvaient s'intégrer, prendre un logement et envoyer leurs enfants à l'école, cela me poserai pas de probleme quand à leurs origine.
Trinita

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par Trinita »

toit_de_chôme a écrit :On peut aussi citer les faux manchots qui entrent dans le RER avec un bras, en ressortent avec deux.
C'est le RER de Lourdes, non ? :)
tristesir

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par tristesir »

La semaine dernière une journaliste de France-Info a promené son micro dans un camp de Roms. Je n'ai pas retrouvé les 5 émissions qu'elle a faites

Mais j'ai trouvé cette émission:

http://www.franceinfo.fr/europe/micro-e ... 2012-09-16
lupita83

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par lupita83 »

Je vous avoue que moi aussi, avant j'avais un discours très tolérant et très ouvert mais depuis que j'ai été confrontée à eux quotidiennement j'ai changé de regard !
Pendant 2 ans j'ai bossé dans le centre ancien de ma ville, qui était leur QG : Tous les matins, pour aller travailler je ne pouvais pas faire autrement que de passer devant et entendre leur supplique "madameuuu..." .Au début, j'ai suivi mes principes et mon éducation car il m'a été transmis qu'il fallait aider plus pauvre que soi, il m'est arrivé de donner mais très vite j'ai saturé de les voir le matin en arrivant au taf, puis de trébucher sur eux à midi car il prenaient leur pause casse croûte sous un porche que j'empruntais pour aller et revenir vers mon boulot , il fallait louvoyer pour passer entre eux, assis ou couchés et quand je revenais à 13h30 il avaient laissé tout leurs détritus sur place, puis rebelote les revoir le soir en sortant. Le distributeur de billet de la rue à côté, je l'ai oublié car il y en avait toujours une, avec ou sans bébé dans les bras, pour attraper le client. Même chose pour le parking souterrain où notre boite nous payait un abonnement, le mois de mon arrivée j'avais pas encore ma carte donc je devais payer à la borne et là, rebelote..."Madameuuu.."Et pas la peine non plus d'aller dans l'agence postale du quartier car une d'entre elle y avait pris se quartiers et vous ouvrait la porte puis vous criait des trucs pas très sympas dans le dos quand vous ne donniez pas la pièce.
Au fil des mois j'en suis arrivée comme ça à ne plus supporter leur simple vue, je vous assure !!..c'est terrible car je n'ai vraiment pas été élevée comme ça, mes parents sont à gauche et militent à la LDH et en plus je bosse dans le social, donc des gens en galère j'en vois et j'en aide toute la journée. Mais là, j'étais arrivée à saturation.
Je me suis souvenue des propos de Patrick Timsit à un moment dans le film "La crise", quand il explique à un bourge que c'est bien de vouloir aider tous les pauvres, mais que ce sont pas les riches qui se poussent pour leur faire de la place et les accueillir chez eux, non, c'est toujours aux pauvres de faire l'effort de les accueillir alors ils en ont marre, et bien j'avais trouvé ça très...juste !
superuser
Messages : 13116
Inscription : 29 juin 2004
Localisation : Paris

Non, les Tsiganes ne sont pas des nomades

Message par superuser »

Octobre 2012- Le Monde Diplomatique

INVENTION D’UNE IDENTITÉ TRANSNATIONALE

par Henriette Asséo, historienne, professeure à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS), auteure de l'ouvrage Les Tsiganes, une destinée européenne, Gallimard coll. «Découvertes», Paris - 2010, et coauteure, avec Idit Bloch et Juliette Jourdan, du film documentaire Mémoires tsiganes, l'autre génocide, Kuiv Productions - Mémoire magnétique 2011, primé aux Rendez-vous de l'histoire (Blois).

Démantèlement de campements roms en France, discriminations en Hongrie ou en Roumanie... Partout, les Tsiganes sont montrés du doigt. Et l'image d'une ethnie sans attaches nationales, valorisée par les institutions européennes, a paradoxalement conduit à les priver de certains de leurs droits. Toutes représentations qui méconnaissent l'histoire, la culture et les réalités romanis.

VIEUX CONTINENT différencié, l'Europe ne saurait se définir comme une association de tribus juxtaposées. Mais les crises nationales favorisent la montée de l'irrationalisme politique, en élargissant les frustrations réciproques. Les clichés de la vieille psychologie des peuples reviennent en force : l'Allemand serait «discipliné», le Français «chauvin», le Grec «méditerranéen» et le Rom «nomade».

Nomade ? Depuis quatre siècles, les Roms de l'Europe centrale ou balkanique sont… sédentaires. Les familles ont des attaches territoriales stables et anciennes. Elles ne se sont pas multipliées par génération spontanée au milieu de campements erratiques. Pourquoi alors le mythe du nomadisme tsigane (1) connaît-il un tel succès politique ? Par quel diabolique mouvement les occupants de «campements illicites» — au demeurant, autorisés par les préfectures depuis une décennie — sont-ils devenus des «Roms migrants», des «nomades administratifs» qui seront demain assignés au cantonnement ? Pourquoi ne voit-on pas le danger à laisser refermer sur des familles ainsi concentrées la tenaille asphyxiante de l'identification et des fichiers collectifs ?

Le passé de l'Europe rappelle combien la classification ethnique est dangereuse lorsqu'elle devient un principe organisateur. Or, la construction artificielle à l'échelle européenne d'une question rom recèle les prodromes d'une exclusion globale.

Pourtant, l'effondrement du bloc communiste était censé offrir un champ illimité de possibilités démocratiques aux anciens pays de l'Est. Les directives européennes considéraient le modèle du pluralisme ethnique comme une forme supérieure de la démocratie — les collèges électoraux étant même formés à travers des déclarations ethniques. Dans chaque Etat, un droit des minorités reconnu par les lois constitutionnelles devait permettre de combiner émancipation sociale et politique. Dans cet esprit, l'adoption d'une citoyenneté multiculturelle (multicultural citizenship) allait harmoniser naturellement le droit des minorités et favoriser l'épanouissement de la démocratie (2). Dès lors que l'idée même d'une résurgence totalitaire était éliminée, la «démocratie ethnique» apparaissait comme un programme politique cohérent et idéal. Que les deux seuls Etats fédéraux, la Yougoslavie et la Tchécoslovaquie, n'y aient pas résisté ne troubla pas longtemps les chantres de cette conception.

LE MODÈLE HONGROIS, à cette époque, était cité en exemple. La loi de 1993 sur les droits des minorités nationales et ethniques poussait jusqu'au bout la logique du «tout minoritaire». Elle reconnaissait l'existence de treize minorités «autochtones», dont la minorité rom. Elle autorisait la représentation ethnique à tous les échelons, ce qui revenait à subordonner les petits groupes à des groupes plus puissants.

La nature politique d'un nouvel ostracisme anti-tsigane fut donc sous-estimée. Les vagues d'agressions physiques et d'assassinats des années 1995-1998, en Autriche ou en Tchécoslovaquie, furent attribuées à des «skinheads», selon l'euphémisme langagier de l'époque !

Dès 1991, la technocratie bruxelloise s'était entichée des Roms comme métaphore de la liberté de circulation dans l'espace pan-européen. L'idéologie partagée sur les vertus de la démocratie ethnique explique comment la découverte de la cause romani (3) par des dirigeants des institutions européennes conduisit à l'élaboration de programmes spécifiques. Des organismes non gouvernementaux comme la Fondation Soros accueillirent aussi les représentants de l'élite intellectuelle rom, rassemblée entre autres dans l'Union romani, un mouvement politique créé à Londres en 1971, pour fédérer les organisations nationales à l'échelle internationale.

La Commission européenne et le Conseil de l'Europe adoptèrent au début des années 2000 le concept de «minorité européenne transnationale» comme modèle unique d'affirmation identitaire. Le but était de justifier, au regard du droit international et communautaire, l'interventionnisme financier du programme de la Décennie d'intégration des Roms (2005-2015), au nom de la lutte - nécessaire - contre les discriminations. La minorité transnationale devenait une entité politique abstraite dont nul ne se souciait de vérifier la conformité avec les réalités historiques et sociales.

Cette vision bureaucratique de surplomb déconnectait les sociétés romanis des terroirs historiques. Les gouvernants de l'Est y virent aussitôt un double intérêt. D'un côté, ils percevaient la manne financière ; de l'autre, il leur suffisait de traduire l'idée de transnationalité par «nomadisme atavique» pour justifier… des expropriations (4). Sur le modèle de la Russie toute proche, qui multipliait les transplantations de villages roms.

En 2007, l'élargissement de l'Union européenne aux pays d'Europe centrale et orientale (PECO) rendit cette ligne politique incohérente. En Roumanie, en Bulgarie, les Roms représentaient entre 6 et 11% de la population, selon diverses estimations. Et ils n'avaient rien à voir avec l'itinérance des «voyageurs» de l'Ouest (gypsies anglais, «gens du voyage» français...). Ils appartenaient en majorité à la classe ouvrière des grands complexes industriels de l'ère communiste à l'abandon. Très vite, le regard européen glissa de l'exaltation de la liberté romani à la découverte dérangeante de l'immense misère de ghettos urbains.

Les critères de Copenhague en vue de l'adhésion comprenaient entre autres l'adoption par les pays candidats d'un code de bonne conduite à l'égard de leurs concitoyens romanis. En contrepartie, Bruxelles jeta en l'air une pluie d'euros attrapés au vol par les gouvernants de l'Est, habiles à capter les fonds structuraux réservés à l'intégration des Roms. Des sommes vertigineuses furent distribuées sans que les commissions financières, qui observent à la loupe les déficits budgétaires occidentaux, n'aient été bien regardantes sur leur distribution. De fait, rien ou presque n'est allé aux familles romanis. Et le rapport de la Banque mondiale pour 2012 (5) établit que 40% d'entre elles ne disposent pas du minimum alimentaire vital. Il reste alors le sentiment général d'un immense gâchis humain.

Le refus de l'historicité se trouve au cœur de la construction des Roms comme «minorité transnationale». A la notion légitime de peuple européen, tissé par la culture et l'histoire, on a substitué une ethnicité intemporelle de «nomades». Cette phraséologie politique contribue à une dénationalisation et à une mise à l'écart de ces populations, ce qui renforce les discours d'exclusion, à l'Est mais aussi à l'Ouest.

Certains experts en biologie criminelle participent, comme au temps du communisme, à l'élaboration d'un phénotype rom : redoutable mélange de définition raciale de «nomade oriental» et sociale de «groupe marginal». Les fichiers biométriques familiaux (comme le fichier Oscar [Outil de statistique et de contrôle de l'aide au retour], qui enregistre toute une famille, enfants compris) sont progressivement mis en connexion dans tout l'espace Schengen. En Hongrie, la logique du complot a succédé au «tout minoritaire» : les médias pro gouvernement alimentent quasi quotidiennement une rubrique de «criminalité tsigane», tout en dénonçant derrière les faveurs bruxelloises la main invisible d'une «ploutocratie juive» internationale. Ainsi, en mars 2011, l'un des chefs du parti Jobbik déclarait au journal conservateur Magyar Nemzet : «Le temps est venu pour un Ku Klux Klan hongrois». De même, des milices armées terrorisent les villageois roms.

AUCUN ÊTRE HUMAIN ne se résume à la détermination identitaire que l'on prétend lui imposer, ni même à celle qu'il croit devoir imposer aux siens. Car sous le vocable de Roms on confond deux réalités : celle, anthropologique, des sociétés romanis de l'Est, constituées depuis la formation même des Etats sous l'Ancien Régime, et celle de la «politique tsigane» de discrimination juridique constituée au XXe siècle. La confusion entre ces deux réalités opposées écrase la diversité. Et les Tsiganes sont ainsi devenus le seul groupe européen dont l'ancienneté de l'établissement national ne garantit jamais définitivement l'autochtonie.

Les photographies ci-contre représentent les Chaladytka Roma, rassemblés pour un adieu au tabor (6) avant l'assignation finale, dans les années 1966-1967. En les regardant, on imagine l'éternité d'une identité circulante, on ne distingue pas les effets d'une conjoncture de haute politique — celle des accords de déplacements de l'après-guerre, qui entendaient régler la question controversée de la frontière soviéto-polonaise par le rapatriement volontaire des Polonais d'URSS (7). A cette date, des files de voitures s'étirent de la même façon dans la boue des routes non goudronnées. Ces familles quittent l'URSS pour rejoindre la Pologne ; ce ne sont pas des nomades, mais des «Polonais réfugiés» — leur statut officiel. Leur histoire était tragique : décimés par les nazis, puis affectés après la guerre aux kolkhozes de la République de Russie, les Chaladytka Roma eurent le plus grand mal à sauver leurs chevaux des mains des douaniers, des services vétérinaires, des apparatchiks. Ils portaient les vieux noms polonais de leurs ancêtres : Alexandrowicz — fait chef (wojt) par le noble polonais Paul Sanguska en 1732 —, Marcin-kewicz ou Stefanowicz, chefs eux aussi par la grâce des princes Radziwill en Lituanie en 1778. Tous catholiques romains, ils formaient alors une branche des Roms de la nation polonaise, les Polska Roma.

Mais les autorités locales polonaises repéraient, parmi les réfugiés, les «Tsiganes» et pas seulement pendant le passage de la frontière. Ceux-là seront, sitôt franchie la frontière polonaise, considérés comme des Russka Roma, des étrangers venus d'ailleurs. Une dénomination à laquelle ils se sont eux-mêmes habitués.

Leur fidélité à la Pologne historique ne fut guère récompensée. En 1980, plus aucune de ces familles photographiées n'était libre de ses mouvements à l'intérieur de son propre pays. Et si les enfants fréquentaient l'école à plus de 80%, ils ne pouvaient y entendre le romani, interdit — leur si belle langue, celle dite de la Russie du Nord, que l'on parlait jusqu'à la Mandchourie, mise en littérature depuis le début du XIXe siècle, celle de l'intelligentsia romani russe et polonaise décimée.

Depuis 1948, surtout après la signature du pacte de Varsovie en 1955, tous les Etats communistes pratiquaient la ciganska politika, un enregistrement familial séparé de leurs nationaux roms qualifiés de «population d'origine tsigane». L'assimilation dite «douée» puis «répressive» devait supprimer «l'anachronisme du mode de vie primitif des Tsiganes». Cette «passeportisation» collective eut des effets désastreux sur la liberté du travail : en Tchécoslovaquie, où les Roms de Slovaquie furent transférés dans les complexes industriels de la Bohême ; en Hongrie, qui pratiqua le déracinement du colonat tsigane et détruisit les villages ruraux roms homogènes pour constituer la main-d'œuvre des plans quinquennaux. Leur surreprésentation dans l'économie étatisée — consortiums industriels d'Etat et fermes agricoles collectivisées — a par ailleurs exclu une grande partie des Roms des privatisations de la décennie de la transition. Ils sont alors restés concentrés dans des ghettos industriels désormais à l'abandon.

POUR DES NATIONS européennes amnésiques, la présence pluriséculaire et les sacrifices des générations passées ne garantissent plus la citoyenneté de plein exercice. Que des associations romanis se mêlent de vouloir obtenir de leur propre pays, celui de leurs ancêtres et de leurs souffrances, une reconnaissance publique, alors elles ne bénéficieront d'aucun soutien ! En Allemagne, l'organisation Zentralrat Deutscher Sinti und Roma a fait campagne, sans succès, pour faire reconnaître en tant que minorité ethnique germanique (deutsche Volksgruppe, «partie de la nation allemande») les Sinti et Roma. Un groupe ethnique avec son héritage de six cents années d'histoire, de culture et de langue allemandes ! De plus, au sortir de la guerre, les deutsche Zigeuner (Tsiganes allemands) rescapés des camps de concentration n'ont pu recouvrer la nationalité allemande — le Land de Hesse reprenait même, pour ses fichiers de «voyageurs», la numérotation du Reichskriminalpolizeiamt (RKPA), la police criminelle de l'ère hitlérienne. Deux poids, deux mesures.

Alors, considérer l'ethnopluralisme comme la panacée pour l'épanouissement démocratique des pays d'Europe centrale laisse pour le moins perplexe. Ainsi, par un étrange retournement, les défenseurs les mieux intentionnés retrouvent-ils les accents des savants de la Renaissance, qui parlaient déjà de «nation errante» ! Mais comment convoquer la raison historique si nul ne se soucie d'imaginer l'avenir ? Adossée à une longue et patiente érudition, elle se voulait fille de Jules Michelet et de Walter Benjamin, des grands récits. De l'imagination messianique, elle acceptait le partage qui, vers 1600, sépara divination et entendement cartésien. L'exercice de l'imagination ne permettrait plus de relier la perception et la raison mais deviendrait un art dangereux, susceptible de produire de la fiction, de l'erreur. Le moment «égyptien» ou «bohémien» de la culture de cour — à la Renaissance, on appelait les Tsiganes «Egyptiens» (gypsies) car on les croyait venus d'Egypte — passa du règne de la prédiction à celui de l'illusion. Et plus tard, quand une Bohémienne prédit à l'archiduc François-Ferdinand d'Autriche qu'il serait prochainement la cause d'une grande guerre, celui-ci s'en amusa : en aucun cas il ne voudrait être le responsable d'un tel désastre. Ses deux fils déportés à Buchenwald par les nazis y retrouveront les Tsiganes de l'Empire austro-hongrois, tandis qu'à Ravensbrûck la résistante Germaine Tillion rassemble un vocabulaire romani auprès d'une déportée française, Manouche de Lille. Des lambeaux de Mitteleuropa ont remplacé la cartographie «ethnique» profuse du XIXe siècle — l'itinéraire de l'Orient-Express dévié pour Auschwitz.

Alors si le cœur nous manque, rentrons vite au pays quand monte le goût des fêtes et des compagnies manouches dont parle si bien Patrick Williams dans "Les Quatre Vies posthumes de Django Reinhardt" (8), allées et venues dans le Paris populeux d'avant, et allons pêcher à Samois-sur-Seine : «Nous avons bu le premier café-maison dans des bols de porcelaine décorés d'une scène de genre représentant un campement de Bohémiens, si petits qu'ils tiennent dans le creux de la main». Dans cette France tant aimée et connue par cœur, et pourtant si inconstante qu'elle enferma en 1940, à la demande allemande, les Français soumis au «régime des nomades» dans quarante camps d'internement familiaux. Ces familles françaises ne furent libérées qu'en mai 1946 et furent contraintes aussitôt de reprendre le statut administratif de «nomades», avant devenir en 1969 «gens du voyage».

Ainsi, nous laisserions venir sans réagir la destruction imbécile du maillage de civilité tissé au fil des siècles ? nous accepterions ces assauts contre des familles pacifiques, parce qu'elles maintiennent la tradition familiale de la culture et de la langue romanis, «un monde dans le monde», selon l'expression de l'anthropologue Leonardo Piasere (9) ? Comme dit le proverbe romani, «chacun a droit à sa place dans l'ombre».


(1) NDLR. A la demande de l'auteure, nous avons adopté l'orthographe «tsigane» - et non «tzigane», graphie popularisée par les joumalistes du XIXe siècle.

(2) Will Kymiicka, La Citoyenneté multiculturelle : une théorie libérale du droit des minorités, La Découverte, Paris, 2001.

(3) L'adjectif «romani» désigne la civilisation de l'ensemble du monde tsigane.

(4) Cf. Michael Stewart (sous la dir. de), The Gypsy "Menace" : Populism and the New Anti-GypsyPolitics, Hurst, Londres, 2012.

(5) «The situation of Roma in 11 EU member states», rapport conjoint de la Banque mondiale, de l'Agence des droits fondamentaux de l'Union européenne (FRA) et du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), Bruxelles, mai 2012.

(6) Tahor est un terme polonais pour qualifier le camp ou campement, y compris le camp militaire ; c'est aussi un terme romani pour qualifier un ensemble de familles.

(7) Prévus en 1944, les accords entre l'URSS et le gouvernement polonais communiste permirent le rapatriement en plusieurs étapes — dans ce cas, entre 1955 et 1960 — des personnes de nationalité polonaise, juives et non juives.

(8) Patrick Williams, "Les Quatre Vies posthumes de Django Reinhardt". Trois fictions et une chronique, Parenthèses, Marseille, 2010.

(9) Leonardo Piasere, "Rom, une histoire européenne", Bayard, Paris, 2011.

Le photographe ANDRZEJ POLAKOWSKI a réalisé en 1966 et 1967 ce reportage sur les communautés tsiganes de la région de Lublin, en Pologne, près de la frontière russe, peu après l'assignation à résidence décrétée par les autoptés communistes. L'ouvrage Pozejpianie Taboru («L'adieu au tabor»), dont sont extraites ces photographies, n'a été publié qu'en 2007, grâce au centre culturel Brama Grodzka - Teatr NN, qui promeut l'histoire multiculturelle de Lublin.
superuser
Messages : 13116
Inscription : 29 juin 2004
Localisation : Paris

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par superuser »

Yves
Messages : 10846
Inscription : 08 sept. 2004
Localisation : Paris

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par Yves »

Oui, il est sympa Daniel Mermet ("Là-bas si j'y suis", sur France Inter de 15h00 à 16h00). Je l'écoute quasiment tous les jours.

Pour cette émission, il a trouvé des Roms sympas, bien intégrés (depuis 10 ans en France), qui bossent et envoient leurs enfants à l'école.

Très bien, il y en a (personne ne le conteste d'ailleurs).

L'émission tente de démontrer qu'avec un peu de bonne volonté, on peut intégrer sans peine les Roms : C'est-à-dire leur fournir un logement et un boulot.

Rien de plus simple ! D'ailleurs, quelques millions de nos concitoyens aimeraient bien aussi "être intégrés", qu'on leur fournisse… un boulot… et pour d'autres tout aussi nombreux… un vrai logement. :mrgreen:

Mais ce que ce premier volet ne dit pas (un autre est diffusé demain) c'est que, une fois qu'on aura intégré les Roms présents en France, combien se présenteront à nos frontières pour obtenir un boulot et un logement ?

Et ceux qui ont écouté l'émission constateront que :

Mermet parle de "seulement" 15.000 Roms présents sur le territoire, alors qu'un de ses intervenants - visiblement bien informé et plutôt favorable à la cause Rom - indique que 15.000 rentrent chaque année sur le territoire. La nuance est de taille ! (même si la plupart font des allers-retours pour toucher la fameuse prime de 300 euros qui gratifie un retour en Roumanie ou en Bulgarie. Prime qui peut s'élever - on l'apprend dans l'émission - à 3.500 euros par famille ! C'est-à-dire un an de salaires moyens en Roumanie).

Voilà encore une info qui réjouira tous ceux qui, en France, ne touchent rien… ou des miettes.

Le débat est relancé ! ;-)
jym

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par jym »

Oui les stigmatisations ont de sales relents, pas si lointains d'ailleurs, se rappeler les gaîtés en ex-Yougoslavie :? , donc l'Europe reste ce qu'elle fut et est :l'exportatrice de ses problèmes de "sous" et "surpopulation" avec en prime l'institution de l'extermination à grande échelle.
Les indiens Nord et Sud en savent qqchose :evil: les juifs aussi :(

Pas de souci: :idea: l'Europe vient de recevoir le prix nobel :mrgreen: dans le style autocongratulation, c'est le pompon :lol:
Sauf que les génies d'Oslo (qui se gardent bien d'appartenir à l'UE, faudrait partager le pétrole :!: :mrgreen: ) ont tout compris à l'envers:
c'est pas l'UE qui maintient la paix(sauf en ex-Yougoslavie, bandes d'amnésiques autosatisfaits :o ), c'est la réconcialiation voulue et réalisée par les ETATS et leurs peuples, et non le machin ouvert à tous les abus de la finance. Ce truc a surtout produit une guerre économique et sociale qui va péter en conflit réel :evil:

Les roms ne sont que le problème refilé aux autres par un pays qui ne fait pas face à ses responsabilités:l'Europe déversoir n'est pas la solution , c'est le probleme :twisted:
D'ailleurs le comportement rom tient plus de la razzia que de l'intégration, chez certains, qui nuisent évidemment à ceux capables et désireux d'intégration, ceux-là y arrivent.
La mendicité érigée en profession n'est d'ailleurs pas au point, j'entends encore les insultes du rom assis sur son pliant, auquel je n'avais rien donné, un qui ne sait pas ce qu'est être toléré, moi j'ai pas trop envie d'apprendre le roumain :?
tristesir

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par tristesir »

La chancelière allemande Angela Merkel a inauguré mercredi à Berlin, un mémorial pour les 500.000 Roms et Sinti victimes de l'Holocauste, en présence de survivants.

http://lci.tf1.fr/monde/europe/merkel-i ... 05919.html

(Je ne crois pas que l'Etat français ait fait repentance sur ce sujet, mais je peux me tromper)
jym

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par jym »

Probable que dans 20ans elle inaugurera un mausolée aux grecs espagnols et autres... morts de la crise d'austérité que les allemands prônent pour tous :mrgreen:
superuser
Messages : 13116
Inscription : 29 juin 2004
Localisation : Paris

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par superuser »

A Hellemmes, dans le Nord, la mairie a décidé d'installer un village d'insertion pour 5 familles Rom.

Le chantier a été bloqué par des riverains.
Le maire a organisé une réunion d'information pour tenter d'apaiser les craintes de la population.
Mais cette réunion publique a été clairement sabotée par un groupe de racistes. Des nervis d'extrême-droite et de «simples habitants» ont agressé des militants d'associations de solidarité avec les Roms, puis bousculé et craché sur le maire (vidéo) :

http://luttennord.wordpress.com/2012/10 ... -les-roms/

L'article de Basta! :

http://www.bastamag.net/article2749.html
diety

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par diety »

Quand les enfants Roms trouvent le chemin de l'école

France Culture - Le magazine de la rédaction, 11.06.2011, 83 photos

(Photos sur la scolarisation à partir de la photo n° 38)
cusco

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par cusco »

Video choc de l'expulsion des Roms à Vigneux France le 11-03-2013

merci de relayer

asefrr

http://youtu.be/DdoS2Sd4v_8
naejjm

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par naejjm »

Tout sauf les Roms : de l’assisté, le SDF est devenu le bon compatriote qu’il faut défendre. C’est ce qu’entend très souvent un militant lillois pour le droit des Roms.
http://www.rue89.com/2013/11/12/pourquo ... ais-247447
pirouette

Re: Appel contre la gauche de la honte

Message par pirouette »

à oullins il a été installé des bungalows pour y installer des "réfugiés" albanais soit 146 personnes dont 60 enfants dans un quartier en restructuration sur un site classé seveso!
mais le meilleurs c'est que dans ce quartier il n'existe plus d'école, les enfants sont donc obligés d'être répartis dans d'autres écoles.... sauf pour les albanais à qui ont droit, eux a une école au sein de leur baraquement !
dire qu'il y a des salariés qui vivent dans leur voiture, des femmes et des enfants sans logement qui n'ont pas le statut de "réfugiés" étranger mais qui sont de notre pays. Pauvre france!
Répondre