Je n'ai pas manifesté…

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auxi

Je n'ai pas manifesté…

Message par auxi »

…parce que :

http://www.article11.info/spip/spip.php?article386.

Évidemment, quand on est né à poil, cette société n'offre d'autre issue que le travail salarié. Ce qui fait qu'on se retrouve le cul entre deux chaises : rechercher un emploi que par ailleurs on abhorre. Et c'est justement cela qui doit être dénoncé, combattu et, à terme, abattu, cette injustice fondamentale, originelle, qui est la mère de toutes les autres. Qui porte cette contestation, sinon des courants de pensée ultra-minoritaires ? Et pourtant, c'est que se situe la ligne de fracture entre conservateurs et progressistes, entre révolutionnaires et tenants de l'ordre établi, entre "gauche" et "droite". Radical : qui prend le mal à la racine. La racine de tous les maux, c'est le dogme du travail : Sarkozy ne s'y est pas trompé, il a axé sa campagne là-dessus, en désignant à la haine de la populace ces chômeurs-fraudeurs-profiteurs qui ont l'audace de vivre, malgré tout. Et il a gagné parce qu'il a visé juste : les travailleurs ne s'avoueront jamais à eux-mêmes qu'ils haïssent leur vie, il leur faut un objet sur lequel se revancher, de préférence sans défense. Le chômeur fait parfaitement l'affaire.

Quand on combat la tyrannie du boulot, on n'est pas confronté à un simple débat d'idées, à une classique empoignade idéologique : on est face à un conditionnement pluri-millénaire, tant individuel que collectif, contre lequel les arguments les plus travaillés, les raisonnements les plus logiques, les exemples les plus concrets ne pourront jamais rien. Un aliéné ne pense pas, il fonctionne par réflexes.

Alors, oui, on pourra combattre collectivement et même, parfois, gagner. Et alors ? Alors, ce ne seront que des aménagements provisoires, précaires, perpétuellement remis en cause, et qu'il faudra sans cesse défendre, protéger, reconquérir en une lutte épuisante, gourmande en vies humaines, en existences, pour toujours retourner à la case départ. Même les conquêtes sociales peuvent se retourner contre nous. Les congés payés, par exemple, ont généré toute une industrie du loisir qui a conduit au massacre du littoral, entre autres. Cela, parce que la lutte n'a pas été menée à son terme : on s'est contenté d'un aménagement de l'esclavage salarié, un très court temps de loisir obligatoire dans un océan de temps de travail obligatoire : quarante ans de cotisations pour éventuellement – très éventuellement – "jouir" d'une retraite à un âge où l'on n'est plus en état de jouir de grand'chose, surtout après une vie de labeur quotidien avec tout ce que cela comporte de frustrations, de vexations et d'avanies.

QUARANTE ANS !!! En clair, l'existence toute entière. Comment ose-t-on sans rougir se prétendre humaniste et tolérer sans ciller pareille horreur, voire la négocier ? La guillotine est un traitement plus doux, par comparaison : on en a vite fini.

L'Histoire – et pour certains, les expériences personnelles – nous enseigne qu'il est parfaitement vain de compter sur "les masses", comme si la propagande consumériste n'avait pas exercé ses ravages depuis cinquante ans et modelé les esprits. Les "masses" ne précèdent jamais, elles suivent toujours. Les "masses" votent Sarkozy, ou Royal, ou Besancenot, ce qui revient strictement au même et n'a, en soi, aucune importance : le mandat représentatif implique que l'on abandonne son destin aux mains de gens qui en feront ce qu'ils voudront, et aucun d'entre eux – pas fous ! – ne portera le fer dans la plaie.

J'aimerais bien manifester avec les amis d'Actu, ne serais-ce que pour faire connaissance, et, qu'on me comprenne bien, j'ai le plus grand respect pour ceux qui le font. Mais auprès de "syndicats" depuis belle lurette vendus au patronat et surtout – surtout – vecteurs de la "valeur travail", c'est au dessus de mes forces : j'aurais l'impression de manifester contre moi-même. Au demeurant, les détenteurs du pouvoir réel – l'argent – se contrefichent de nos inoffensives manifs. Si défiler Bastille-Nation pouvait changer fondamentalement les choses, ça se saurait, non ?

C'est par un travail ( :oops: pardon !) de fourmi, ingrat et quotidien, que se fait l'indispensable circulation des idées. Il existe, dans ma banlieue, une antenne du SEL (service d'échanges local) ; j'ignore encore de quoi il s'agit sur le fond, et je serai peut-être déçu, mais l'idée d'échanger des services, des savoirs, des compétences sans que le fric entre en jeu me séduit. Au-delà de l'intérêt matériel immédiat pour les plus démunis, il y a cette idée d'échanger sans rapport de force ni calcul : une application partielle mais concrète de l'anarchie. Évidemment, ce n'est guère cheguevaresque, ce n'est pas spectaculaire ; au moins cela recrée-t-il du lien, loin de la télé, et par les temps qui courent, c'est infiniment précieux.

Amitiés.
tristesir

Re: Je n'ai pas manifesté…

Message par tristesir »

Quand Prévieux écrit « Com com cio co ! Riaire en voche voltradile. Pompiloutruche ? », la boîte répond que sa demande a été étudiée avec attention mais que, malgré toutes les qualités dont il semble doté, elle ne saurait répondre positivement à sa demande.
Quand, après toute une série de divagations sur un ton très familier, il conclut « En plus je dois dire non à ton job. Je suis bientôt dans un meilleur autre job que les croissants. », La Croissanterie s’étonne qu’il ait oublié de joindre un curriculum vitae.
Le manifeste de Krisis semble intéressant.
Le discours peut paraître radical. Il l’est. Mais comment faire autrement « quand un cadavre domine la société » ? Quand « toutes les puissances du monde se sont liguées pour défendre cette institution : le pape et la Banque mondiale, Tony Blair et Jorg Haider, les syndicats et les patrons, les écologistes d’Allemagne et les socialistes de France » ? Quand « tous n’ont qu’un mot à la bouche : travail, travail, travail ! » ? Quand le travail - par le biais de ce darwinisme social qu’a instauré le néo-libéralisme - est responsable de tellement plus de détresse, de souffrance et de morts que la pire des dictatures ou le plus honteux des régimes ? Quand « il ne reste aux hommes qu’à proposer humblement leurs services comme travailleurs ultra-bon marché et esclaves démocratiques aux gagnants de la mondialisation plus fortunés » ? Quand « les porte-paroles sociaux du camp du travail, depuis les bouffeurs de caviar néo-libéraux, fous de rendement, jusqu’aux gros lards des syndicats » s’entêtent à présenter le travail comme une valeur naturelle, mais se trouvent bien en peine d’expliquer pourquoi « les trois quarts de l’humanité sombrent dans la misère parce que la société du travail n’a plus besoin de leur travail » ?
tristesir

Re: Je n'ai pas manifesté…

Message par tristesir »

les travailleurs ne s'avoueront jamais à eux-mêmes qu'ils haïssent leur vie
C'est pour cela que certains ont une larme à l'oeil quand il voit leur usine désertée en cours de fermeture?
(je ne pense pas que c'est seulement la perspective de la déroute financière qui les attend qui leur fasse verser une larme)
Je pense qu'on ne peut pas décider pour les autres de ce qui leur convient ou pas.

Ce que je critique est l'absence de choix et la normalisation de la société qui en découle avec ses conséquences:
si tu ne suis pas cette norme tu t'exposes à l'opprobre publique que les populistes aiment bien manier pour monter les gens les uns contre les autres, très efficace pour détourner l'attention de leur objectifs inavouables publiquement.
Mais auprès de "syndicats" depuis belle lurette vendus au patronat et surtout – surtout – vecteurs de la "valeur travail", c'est au dessus de mes forces
Il faut bien qu'on chatouille leur mauvaise conscience et leur rappeler notre existence dans la mesure de nos faibles moyens. Je ne suis pas venu pour voir et applaudir le défilé, le carnaval du 1er mai.
Au demeurant, les détenteurs du pouvoir réel – l'argent – se contrefichent de nos inoffensives manifs.
La lutte, même infructueuse a une vertu, rendre leur dignité aux gens.

En outre, au delà de la mascarade apparente cela permet d'échanger, de se rencontrer, un préalable pour pouvoir éventuellement s'organiser pour aller plus loin.

Des gens payent pour faire des stages de désobéissance civile, moi je fais un stage gratuit chez Actu' de militant. Ce 1er mai, c'était initiation au maniement de mégaphone verdict: peut mieux faire 8)
(merci à AC' pour la fourniture de cet outil)
diety

Re: Je n'ai pas manifesté…

Message par diety »

Le manifeste de Krisis semble intéressant.
Robert Kurz, auteur et journaliste allemand, était pendant quelque temps éditeur de Krisis. Il a écrit (entre autre)les livres phares :

- Le livre noir du capitalisme - un adieu à l'économie du marché

- Le capital mondial - mondialisation et limites inhérents du système marchand moderne

les deux livres très intéressants ne sont, à ma connaissance, pas publiés en langue française, mais d'autres de ses livres le sont :

- Avis aux naufragés ; Paris, Lignes Manifeste 2005

- Critique de la démocratie balistique - Paris : Ed. Mille et une Nuits, 2006

et le "Manifeste contre le travail, traduction de l'allemand, groupe Krisis, Robert Kurz, Ernst Lohoff et Norbert Trenkle

Le groupe Krisis s'est divisé plus tard, et il y a fondation du groupe Exit!, où Robert Kurz est membre et publie régulièrement.

La scission de Krisis est moins dûe à une divergence théorique qu'à des conflits entre personnes. Les deux mouvements sont néanmoins proches au niveau de la pensée et très intéressants sur le plan théorique.
Dernière modification par diety le 02 mai 2009, modifié 2 fois.
koala

Re: Je n'ai pas manifesté…

Message par koala »

Je n'ai pas manifesté par tradition, je ne manifeste jamais le 1er mai. Mon combat est permanent, il dure toute l'année depuis 33 ans.
Lorsqu'à 17 ans j'ai commencé à travailler et qu'on m'a dit que ce serait pour 37 ans, j'ai répondu "c'est fou, je serai morte avant !". Je suis encore vie et je me demande aussi en quoi j'ai mérité cette double peine, une vie de misère pour une retraite de misérable.

Le SEL c'est une bonne idée de départ, après il faut voir qui gère le SEL et ce qu'on peut y apporter comme ce qu'on peut en retirer. Tous les services ne rendent pas service.
auxi

Re: Je n'ai pas manifesté…

Message par auxi »

C'est pour cela que certains ont une larme à l'œil quand il voit leur usine désertée en cours de fermeture ?
(Tristesir)

À tort ou à raison, j'y vois une manifestation de la servitude volontaire. Je le répète : il s'agit d'un conditionnement pluri-millénaire, qui s'est transmis de génération en génération par les victimes elles-mêmes.
Je pense qu'on ne peut pas décider pour les autres de ce qui leur convient ou pas.
(Tristesir)

Absolument. On ne fait pas le bonheur des gens contre leur gré ; mais il ne faut pas perdre de vue le fait qu'on ne travaille que par nécessité, contraint et forcé. Ces travailleurs qui aiment leur usine, ont-ils vraiment décidé librement d'y travailler ? Évidemment non. On trouve là une proximité tout de même dérangeante avec le mouvement "J'aime ma boîte" de Sophie de Menthon, égérie télévisuelle du patronat :

http://www.jaimemaboite.com/.

Quant à la mauvaise conscience des syndi-collabos… Je doute qu'elle les ait jamais privés d'une seule seconde de sommeil. Ce sont eux qui signent imperturbablement des "accords" toujours plus défavorables aux chômeurs ; ils nous lisent sans doute et, selon l'expression chère à Chirac, ça leur en touche une sans bouger l'autre.
…je me demande aussi en quoi j'ai mérité cette double peine, une vie de misère pour une retraite de misérable.
(Koala)

Parce que tu n'es pas née du bon côté du manche, et c'est impardonnable ! :mrgreen:
Pour le SEL, en effet, faut voir. Mais que veux-tu dire par : "tous les services ne rendent pas service" ?
tristesir

Re: Je n'ai pas manifesté…

Message par tristesir »

mais il ne faut pas perdre de vue le fait qu'on ne travaille que par nécessité, contraint et forcé.
Une affirmation un peu péremptoire. La question est plus complexe me semble-t-il ou alors il ne s'agit pas seulement de satisfaire à la nécessité d'avoir un salaire et d'être en règle avec le système qui contrôle et sanctionne.
auxi

Re: Je n'ai pas manifesté…

Message par auxi »

Je saisis mal ta réponse… Je voulais dire, au début de cette conversation, qu'à moins d'être un riche héritier, il faut bien, pour subsister, aller travailler, qu'on le veuille ou non : on n'a pas le choix, donc pas de liberté. Ensuite, en effet, le problème est plus complexe, mais cela ne change rien au constat de base.
On parle d'exploitation de l'homme par l'homme. Cette exploitation n'est rendue possible que par l'absence de possibilité de choix pour le prolétaire, c'est-à-dire celui qui ne dispose que de sa tête et de ses bras pour satisfaire les besoins basiques communs à tous les êtres humains : se nourrir, se vêtir, se loger… Ce dont l'exploiteur profite, c'est cela : le prolétaire devra bien travailler pour lui, ou crever de faim dans la rue.
Une idée fait son chemin : celle d'un revenu de vie, de la naissance à la mort. Je t'avoue qu'à cette heure tardive, je ne me sens pas le courage de rechercher maintenant, mais nous y reviendrons. Cette idée est fort intéressante, et subversive, car, mise en pratique, elle permettrait justement au prolétaire de se soustraire au chantage de l'exploiteur : bosse ou crève ; elle lui permettrait, pour la première fois, de parler d'égal à égal avec l'employeur potentiel. Elle est subversive car, là aussi pour la première fois, elle permettrait de ne plus subordonner la subsistance d'un être humain à la fourniture d'un travail. Bref, elle lui procurerait une liberté qu'il n'a jamais eue : celle de travailler, ou non, et s'il décide de travailler, de choisir pour qui, et dans quelles conditions.
Bien sûr, on est encore loin de l'autogestion, et de l'anarchie encore plus, puisqu'il existe encore un patron ; mais il s'agirait d'un coin enfoncé dans le dogme du travail, d'une avancée considérable. Imagine : le salarié mécontent, la salariée harcelée pourrait sans crainte claquer la porte. Appliquée, cette idée abolirait la peur, si bien entretenue par le patronat et les médias aux ordres ; elle abolirait également la compétition entre salariés et favoriserait donc le retour aux valeurs de solidarité. Il en serait fini du Pôle emploi.

– Si vous n'êtes pas content, prenez la porte !
– Ah ? Eh bien, d'accord, je la prends ! Mes hommages à Madame, et bonjour chez vous.

Elle rendrait le patronat et sa chefferie impuissants. Et si tu n'as pas tort de dire que la lutte rend leur dignité aux gens, elle la leur rendrait encore plus sûrement et plus complètement ! Cessant d'être sur la défensive, nous pourrions alors passer à l'offensive.
diety

Re: Je n'ai pas manifesté…

Message par diety »

Une idée fait son chemin : celle d'un revenu de vie, de la naissance à la mort. Je t'avoue qu'à cette heure tardive, je ne me sens pas le courage de rechercher maintenant, mais nous y reviendrons.
En Allemagne, cette idée, longtemps méprisée comme une utopie de quelques "tarés", fait son petit bonhomme de chemin. Récemment, une pétition a été lancée - il y a une page internet au Bundestag ou on peut lancer des pétitions. Si on obtient 50.000 signatures ou plus, le sujet de la pétition doit être discuté publiquement au parlement, que cela plaise au pouvoir ou non. Ce sujet n'est plus un gros mot non plus dans les médias, et ce virement s'est passé pendant les deux dernières années, très étonnant. La pétition a 52.973 signatures.

L'idée a été lancée il y a une dixaine années (mais elle est plus ancienne encore), et personne ne l'a prise au sérieux ou lui a prêté une attention, mais cela a changé.

Pour la réalisation d'un revenu universel inconditionnel (sans contrôle social), il y a différentes approches, et je suis curieux comment cette idée va évoluer en Allemagne. Cela me fait penser aux Verts qui ont été discrédités pendant des années, et maintenant ils font partie du paysage politique et sont acceptés sans susciter de grandes polémiques.
tristesir

Re: Je n'ai pas manifesté…

Message par tristesir »

Cela me fait penser aux Verts qui ont été discrédités pendant des années, et maintenant ils font partie du paysage politique et sont acceptés sans susciter de grandes polémiques.
Parce qu'ils sont 100% compatibles avec le capitalisme, vert, la couleur du dollar 8)
diety

Re: Je n'ai pas manifesté…

Message par diety »

Tu sais bien ce que j'ai voulu dire, et l'acceptation de la "pensée verte" aujourd'hui est plus que la simple absorbtion de cette pensée par le capitalisme. Même si on est loin de l'action verte au niveau mondial et de son efficacité, on n'est plus considéré comme un débile profond si on se soucie publiquement de la dégradation de l'environnement. Ben moi ça me va si un revenu universel inconditionnel suffisant, accordé sans pression, sans contrôle social et sans contrepartie est, dans quelques années, "compatible avec le capitalisme", mais pour l'instant, on est encore loin de pouvoir discuter sérieusement cette idée. La phrase "on ne le pourra jamais payer" (traduction: quel idiot) clôt illico le débat. Si on ose insister, la deuxième phrase assommante est: mais alors plus personne n'ira travailler !
Dernière modification par diety le 03 mai 2009, modifié 1 fois.
Ongles_noirs

Re: Je n'ai pas manifesté…

Message par Ongles_noirs »

auxi a écrit :Je saisis mal ta réponse… Je voulais dire, au début de cette conversation, qu'à moins d'être un riche héritier, il faut bien, pour subsister, aller travailler, qu'on le veuille ou non : on n'a pas le choix, donc pas de liberté. Ensuite, en effet, le problème est plus complexe, mais cela ne change rien au constat de base.
On parle d'exploitation de l'homme par l'homme. Cette exploitation n'est rendue possible que par l'absence de possibilité de choix pour le prolétaire, c'est-à-dire celui qui ne dispose que de sa tête et de ses bras pour satisfaire les besoins basiques communs à tous les êtres humains : se nourrir, se vêtir, se loger… Ce dont l'exploiteur profite, c'est cela : le prolétaire devra bien travailler pour lui, ou crever de faim dans la rue.
Une idée fait son chemin : celle d'un revenu de vie, de la naissance à la mort. Je t'avoue qu'à cette heure tardive, je ne me sens pas le courage de rechercher maintenant, mais nous y reviendrons. Cette idée est fort intéressante, et subversive, car, mise en pratique, elle permettrait justement au prolétaire de se soustraire au chantage de l'exploiteur : bosse ou crève ; elle lui permettrait, pour la première fois, de parler d'égal à égal avec l'employeur potentiel. Elle est subversive car, là aussi pour la première fois, elle permettrait de ne plus subordonner la subsistance d'un être humain à la fourniture d'un travail. Bref, elle lui procurerait une liberté qu'il n'a jamais eue : celle de travailler, ou non, et s'il décide de travailler, de choisir pour qui, et dans quelles conditions.
Bien sûr, on est encore loin de l'autogestion, et de l'anarchie encore plus, puisqu'il existe encore un patron ; mais il s'agirait d'un coin enfoncé dans le dogme du travail, d'une avancée considérable. Imagine : le salarié mécontent, la salariée harcelée pourrait sans crainte claquer la porte. Appliquée, cette idée abolirait la peur, si bien entretenue par le patronat et les médias aux ordres ; elle abolirait également la compétition entre salariés et favoriserait donc le retour aux valeurs de solidarité. Il en serait fini du Pôle emploi.

– Si vous n'êtes pas content, prenez la porte !
– Ah ? Eh bien, d'accord, je la prends ! Mes hommages à Madame, et bonjour chez vous.

Elle rendrait le patronat et sa chefferie impuissants. Et si tu n'as pas tort de dire que la lutte rend leur dignité aux gens, elle la leur rendrait encore plus sûrement et plus complètement ! Cessant d'être sur la défensive, nous pourrions alors passer à l'offensive.
Oui et cela permettrait de s'orienter vers une organisation sociale basée sur le communisme (le vrai, pas le marxisme ou ses dérivés) où serait appliquée la devise : "À chacun selon ses besoins, de chacun selon ses moyens."
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