Extrait ( page 8 ) :
Alors Chérèque, la nouvelle convention, un progrès ? Pas pour tout le monde à priori.La nouvelle convention UNEDIC
Tout d’abord il est remarquable que cet accord soit si court. On n’y parle pas du contrôle des demandeurs d’emploi qui avait fait tant débat lors de l’instauration du PARE en 2000. Sans doute parce que la question est réglée et que les sanctions pour non-recherche significative d’emploi vont être plus fortes, la loi étant passée par là. Pourtant, ce débat sur la recherche constitue une question non négligeable en cette période de fermetures d’entreprises, de licenciements et de croissance du chômage.
Les dessous de la « filière unique »
Cette convention prévoit de remplacer les quatre filières actuelles par une « filière unique », selon le principe d’« un jour cotisé = un jour indemnisé ». Si les primo demandeurs pourront bénéficier d'une indemnisation dès 4 mois de travail au lieu de 6 actuellement, leur nombre reste limité : 70 000 à 98 000 demandeurs d'emploi en plus par an selon l’UNEDIC. Le cliquet exigé par la CGPME qui imposait de justifier de 6 mois d'activité dans les 12 mois pour rouvrir des droits la fois suivante, a été supprimé par l'État. La durée maximale d’indemnisation est portée à 24 mois, contre 23 actuellement. Mais d’un autre côté, 63 % des chômeurs (ceux qui seraient entrés dans les filières B et C, le plus gros contingent d'inscrits soit quelque 900 000 personnes verront leur durée d'indemnisation amputée de 1 à 9 mois, suivant les cas, avec l'ASS ou le RMI pour issue :
• Ceux qui auraient pu entrer dans la filière A
(6 mois cotisés = 7 mois d'indemnisation) perdront 1 mois d'allocations,
• Ceux qui auraient pu entrer dans la filière B
(16 mois cotisés = 23 mois d'indemnisation) perdront jusqu'à 7 mois d'allocations,
• Ceux qui auraient pu entrer dans la filière C
(27 mois cotisés = 36 mois d'indemnisation) perdront jusqu'à 9 mois d'allocations.
Au final, en dépit d'un surcoût de 270 à 700 millions d'euros avancé par le patronat, la « filière unique » pourrait en réalité
permettre à l'Unedic de faire de nouvelles petites économies sur le dos des privés d'emploi.
Précarité et déficit
Jusqu’en 2008, 60 % des entrées au chômage résultaient de la fin de contrats précaires (intérim, CDD…), principale causedu déficit de l’Unedic qui s'élève actuellement à 5 milliards d’euros. En effet, sur les 24 milliards annuels consacrés àl’indemnisation des chômeurs, 7 milliards viennent secourir une partie des salariés précaires, pour qui le chômage esttypiquement récurrent, tandis que le produit des cotisations issues de ces types d’emplois n’atteint qu’1 milliard d’euros.Avant de songer à baisser les cotisations chômage, il faudrait peut-être augmenter celles des employeurs qui, usant et abusant de la précarité, font supporter leurs choix économiques à la collectivité tout entière.
Des milliards ont été dégagés pour les banques, aucun coup de pouce n’est prévu pour l’Unedic. Le montant des allocations etleur mode de calcul restent les mêmes : leur niveau stagnera à 57,4 % de l’ancien salaire brut bien que les syndicats aientsouhaité le porter, modestement, à 60 %.Rien ne changera non plus pour les jeunes de moins de 25 ans : la ridicule « prime forfaitaire » de 300 € (remboursable ! ) envisagée un temps est tombée aux oubliettes, le patronatayant estimé qu’ils seront les premiers bénéficiaires de l’assouplissement des règles d’entrée.
Quelques rescapés du naufrage
Les seniors semblent épargnés : les 50 ans et + conservent une durée d’indemnisation spécifique maximale de 36 mois, mêmesi la période cotisée augmente (36 mois d’activité contre 27). Mais le texte prévoit par ailleurs de reculer progressivement,de 60 ans et demi actuellement à 61 ans début 2010, l’âge à partir duquel l’indemnisation chômage peut être maintenue jusqu’à liquidation de la retraite à taux plein, au plus tard à 65 ans. Ce qui augmente le risque de se retrouver sans allocation en attendant la retraite [1].
Epargnés aussi les travailleurs saisonniers : le seuil des trois saisons au terme desquelles ils ne pouvaient plus bénéficier de l'assurance-chômage est supprimé. L’indemnisation de la CRP (dispositif destiné aux licenciements économiques dans les entreprises de moins de 1 000 salariés, soit 25 % des licenciements actuels), est considérablement améliorée puisqu’elle sera maintenue à 80 % du salaire brut antérieur durant les 8 premiers mois au lieu de trois dans son ancienne version, puis à 70 % durant les quatre mois restant. Mais elle ne concernera que les personnes licenciées à compter de mercredi 1er avril 2009 voire seulement du 9 avril. La prime de 500 € est financée par l'État pour les nouveaux chômeurs qui n'auront cotisé que deux mois dans les 28 derniers mois. Ce dispositif, dont on ne pourra bénéficier qu'une fois, s'appliquera à compter de mercredi 1er avril 2009 et jusqu'au 31 mars 2010.
La baisse des cotisations
Dès le 1er juillet 2009, une baisse des cotisations chômage à hauteur de 0,5 point par an pourra s’appliquer si le résultat d’exploitation de l’Unedic présente un excédent de 500 millions d’euros sur un semestre [2]… En gros, cet accord va permettre aux patrons d’empocher l’excédent de l’assurance-chômage sous forme de baisse des cotisations sans améliorer la couverture des demandeurs d’emploi. Dans un contexte de crise majeure où le chômage explose, les destructions d’emplois salariés se multiplient et donc les rentrées de cotisation baissent de fait, la diminution des cotisations chômage est irresponsable.
Impact de la réforme
Si la crise se poursuit et s’installe, les durées d'indemnisation maximales joueront à plein et le renforcement de la couverturedes plus précaires ne suffira pas à limiter la sortie de nombreux chômeurs du système et le basculement d'une bonnepartie d'entre eux dans les minima sociaux.
[1] L’allocation équivalent retraite (AER), minima social amélioré qui permettait aux chômeurs âgés en fin de droits de ne pas sombrer à l’ASS ou au RMI en attendant de pouvoir bénéficier de leur retraite, est supprimée dès le 1er janvier.
[2] Si les comptes de l’assurance-chômage sont excédentaires depuis trois ans, son déficit cumulé s’élève toujours à 5 milliards d’euros.