Des émeutes de la faim sans précédent

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Modérateurs : superuser, Yves

Eschyle

Des émeutes de la faim sans précédent

Message par Eschyle »

Un article à lire ici :
http://www.letemps.ch/template/tempsFor ... cle=229513 ( Des émeutes de la faim sans précédent ) dans le journal Le Temps (Suisse)

Mais n'oubliez pas aussi de lire : http://fabrice-nicolino.com/biocarburants ( La faim, la bagnole, le blé et nous )

Et aussi : http://www.kokopelli.asso.fr/articles/n ... rants.html ( Mettez du sang dans votre moteur ! La tragédie des nécro-carburants, de l'association Kokopelli )

C'est de plus en plus important à connaître et à faire connaître.
tristesir

Message par tristesir »

Alors que quelques pantins s'agitent frénétiquement dans l'arène électorale, l'arène véritable (au sens latin du terme: “arena”, “sable”) recouvre inexorablement la terre de son linceul stérile. Ces démagogues, de tous bords, promettent toujours plus de croissance: plus de salaires, plus de vacances, plus de travail, plus de consommation et bien sûr, plus de sécurité contre un ennemi inexistant: le seul terrorisme étant alimentaire et ce sont eux qui l'ont mis en place.
Campagnes d'intoxication
Au Salon de l'Agriculture 2007, une partie du hall 2 s'était transformée en salon de l'automobile! Ils étaient tous là, Peugeot, Ford, Renault, etc. Avec des grosses planètes qui pendaient du plafond et des petites fleurs peintes sur les portières des voitures. Emouvant: ils clament haut et fort qu'ils vont sauver la planète avec l'éthanol et les huiles de colza!

Les grands slogans sont lancés: biodiesels, biocarburants, or vert, carburants verts, "le carburant qui voit la vie en vert"... L'édition spéciale Ford des Cahiers de l'Automobile titre "Bio-Carburants", Bio faisant 7 cm de hauteur et carburants faisant 1,5 cm de hauteur: les grands pièges de la sémantique pour endormir le peuple. Le même magazine en page 7 titre "le bio en 40 questions". Quel "bio"? Est ce une nouvelle abréviation pour "biocarburant"? Plus l'intoxication est grosse, mieux elle passe! Pourquoi se gêner?

Les 40 questions sus-dites concernent les agro-carburants et nous apprenons que l'éthanol ne se boit pas (aucun risque d'accroître l'alcoolisme dans ce pays!), que l'utilisation des pesticides baisse depuis 10 ans (témoin l'accélération du nombre de cancers!) et que la baguette de pain ne va pas augmenter! Il est vrai que si la baguette augmentait de 100 % comme la tortilla au Mexique, les Français tortilleraient du nez. Il ne faut mieux pas toucher à la baguette!

Nous apprenons également que les carburants végétaux n'ont pas été développés plus tôt parce que "le contexte économique, politique, énergétique n'était pas jusqu'ici favorable". En clair, parce que les pétroliers ne l'avaient pas encore décidé!

Mais le contexte politique a évolué. Un candidat présidentiable propose même en France une "pastille bleue", bleue comme la Terre (vue de très haut, sinon, c'est moins bleu!) pour favoriser les véhicules au "biocarburant" avec une petite ristourne au péage et des stationnements gratuits. C'est bien mignon, tout cela!

L'attribution du terme "bio" pour les nécro-carburants gagne en tout cas du terrain rapidement. Cela nous rappelle le syndrome des yoghourts de chez Danone. On trouve sur internet des publicités pour Volvo "Volvo fera du sport bio" ou pour Ford "Ford et Europcar roulent pour le bio!" ou pour Saab "300 chevaux écologiques". Certaines voitures roulant au carburant végétal ont même la mention "bio" peinte sur la carrosserie.

C'est le coup de grâce pour l'agriculture bio, d'autant plus que la pression des lobbies à Bruxelles cherche à imposer une agriculture bio de "seconde génération" avec une pincée de pesticides par-ci et une demi-pincée de chimères génétiques par-là! Les cahiers de charge de l'agro-bio sont en passe de devenir des cahiers de décharge! Pinçons-nous le nez.

L'industrie de l'automobile s'auréole, ad nauseam, d'une surenchère de slogans verdoyants. Saab vante une de ses voitures avec le logo suivant "Les forces de la nature auront toujours besoin de s'exprimer. Libérons-les." Koenigsegg présente une voiture comme "sa fleur à la tige puissante". Les rallyes deviennent "bios". Les voitures et les pneus "écolos". Les voitures deviennent "propres". C'est la "passion verte". Etc.
Inversion des valeurs. Perte de sens. Double langage. Dérives sémantiques.
Et si on proposait un moratoire sur les carburants végétaux!
Les carburants végétaux ne sont pas bios: ils sont issus de plantes cultivées avec toute l'artillerie lourde des intrants de l'agro-chimie et des pesticides. Les termes "biodiesel" , "bioéthanol" et "biocarburants" sont passés en un temps record dans le langage commun, suite à un énorme matraquage publicitaire et médiatique. Ces carburants végétaux sont obtenus grâce à des processus d'extraction industrielle très complexes. Le terme "bio" signifie "vie". On voit difficilement ce qui permettrait à ces carburants végétaux de mériter le préfixe bio. Parle-t-on de bioblé, ou de biotomate ou de biomaïs?

Nous sommes là au coeur d'une gigantesque arnaque sémantique. C'est bien plutôt de "nécrocarburants" , de "nécroéthanol" et de "nécrodiesel" qu'il faudrait parler. Nécro signifie mort et ce préfixe seul peut qualifier les aspects techniques, écologiques et humains de cette sinistre farce.

Les carburants végétaux ne sont pas verts, ils seraient même plutôt rouges, de la couleur du sang. Ils vont accroître l'immense tragédie de la sous-nutrition, de la mort de faim, de la misère sociale, du déplacement des populations, de la déforestation, de l'érosion des sols, de la désertification, de la pénurie en eau, etc.
(...)[Cliquer pour lire la suite]
tristesir

Message par tristesir »

KOKOPELLI est une association qui , entre autres, possède une banque de graines de semences héritées du passé.

Ils ont été condamnés en justice pour la vente de celles-ci.
Yves
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Le pire Crime contre l’Humanité a commencé

Message par Yves »

Un être humain meurt toutes les 5 secondes de malnutrition, 720 par heure, 17.000 par jour, plus de 6 millions par an. Le pire Crime contre l’Humanité a bien commencé !

Alors qu’un peu partout dans l’hémisphère sud et sous les tropiques, les estomacs crient famine et poussent les affamés à piller commerces et entrepôts, en Mauritanie, au Cameroun, au Burkina Faso, en Éthiopie, Indonésie, Égypte, au Maroc, en Côte d'Ivoire, au Sénégal, à Madagascar, aux Philippines, à Haïti, au Pakistan et en Thaïlande ; alors que sur les 55 économistes sondés par le Wall Street Journal, 73% estiment que la première économie du monde, celle des USA, va s'affaiblir et que le pire de la récession est devant nous ; alors que les experts évaluent le coût de la guerre en Irak à 3.000 milliards de dollars ; alors que les «résolutions» du Grenelle de l’environnement sont bafouées, et que les paysans de France et du monde entier seront livrés d’ici peu à la dictature des semenciers d’OGM ; alors que partout sur la planète s’érode la biodiversité ; alors que nous serons 10 à 12 milliards d’êtres humains à vivre sur Terre d’ici une quarantaine d’années… les chantres de l’ultralibéralisme continuent à prôner l’accélération de la consommation comme moteur de développement dans un monde voué, à terme, à la pénurie de ses ressources. Ainsi voudrait-on nous faire croire que nous n’avons pas d’autre alternative que de poursuivre sur la voie d’un système qui, partout, se lézarde et n’annonce que chaos sociaux, désastres écologiques, pénuries alimentaires, «guerres de civilisations», pollutions néfastes et réchauffement climatique. Charmantes perspectives !

Le début de la faim… mondialisée

Une multitude de voyants clignotent dans le rouge. Pendant ce temps, les inconscients au nombre desquels nous comptons, continuent à se goinfrer, à consommer tant et plus et à dilapider les ressources naturelles… comme si de rien n’était. Et les mêmes s’ingénient à promouvoir, et même à imposer par la force, un système qui ne fait qu’accroître les inégalités rendant les riches encore plus riches et les pauvres toujours plus pauvres… y compris dans leurs propres pays.
Si le développement économique de ces 20 dernières années a sorti quelques centaines de millions d’individus du sous-développement, plus de deux milliards d’êtres humains survivent avec moins de deux dollars par jour, quand le prix de certaines denrées alimentaires de première nécessité, comme le riz, le blé et le maïs, a doublé ces dernières années. Les uns consomment plus, gaspillent plus, se nourrissent plus, quand les autres, beaucoup plus nombreux évidemment, ne trouvent même plus à se nourrir.

Une Troisième Guerre mondiale encore plus meurtrière

Certains, comme Jean Ziegler, Rapporteur spécial de l'ONU pour le droit à l'alimentation, auteur de «L'Empire de la Honte», n’hésitent pas à parler de Crime contre l’Humanité pour qualifier la situation actuelle et plus encore celle qui se dessine à l’horizon de 5 ans. Une personne meurt des conséquences directes ou indirectes de la malnutrition toutes les 5 secondes dans le monde ! 12 personnes chaque minute, 720 chaque heure, 17.280 chaque jour, plus de 6 millions chaque année, soit plus que pendant la Seconde Guerre mondiale ! Et pendant ce temps, plutôt que de réduire leur consommation de carburants fossiles, les pays occidentaux s’apprêtent à planter des millions d’hectares pour produire des biocarburants afin de réduire leur facture pétrolière, limitant d’autant l’aide alimentaire d’urgence qu’ils pourront accorder aux pays de la faim. Concomitamment, le FMI (Fonds monétaire internationale) contraint les pays où sévit la famine à cultiver fruits et légumes d’exportation qui viendront garnir les supermarchés occidentaux, comme ces fraises et ces cerises proposées au beau milieu de l’hiver. Et on en arrive à la situation absurde où le kilo de pommes est vendu 2,5€ chez nous au mois de décembre, quand le kilo de litchis est proposé à 1,5€, après avoir parcouru en avion-cargo les 10.000 kilomètres qui nous séparent de Madagascar… où des millions de personnes ne mangent pas à leur faim !

La Troisième Guerre mondiale motivée par la pénurie des ressources de subsistance alimentaire a bien commencé. Elle est et sera plus meurtrière que les précédentes !

www.renovation-democratique.org
Dernière modification par Yves le 13 avr. 2008, modifié 1 fois.
Satya

Message par Satya »

franchement 30 pays avec des émeutes alimentaires c'est plus qu'un clignotant amha !!

mais qui sera assez puissant pour les arrêter?
en fait, chacun de nous dans nos choix quotidien.

le grenelle de l'environnement était de la foutaise, il en sera de même avec celui soit disant de l'insertion. en attendant les surfaces cultivables sur la planète se réduisent de façon considérables et les industriels ne sont surtout pas dérangés par les politiciens véreux de tous bords.

on ne pourra jamais dire qu'on ne savait pas !!
maguy

Message par maguy »

Paul Krugman : Tempête sur les grains

9 avril 2008

« Les terres consacrées aux cultures de biocarburants de synthèse ne sont plus disponibles pour les cultures vivrières, ce qui fait que les subventions aux biocarburants sont un facteur majeur dans la crise alimentaire. On pourrait décrire les choses de cette façon : les gens meurent de faim en Afrique afin que les hommes politiques américains puissent gagner des voix dans les Etats agricoles des USA. » Fidel Castro l’avait prédit, Paul Krugman le confirme : les biocarburants provoquent la famine.


Par Paul Krugman, New York Times, 7 avril 2008

On entend beaucoup parler de la crise financière ces jours-ci, mais n’oublions pas qu’une autre crise mondiale est en cours, et qu’elle concerne beaucoup plus d’hommes et de femmes.

Il s’agit de la crise alimentaire. Au cours des dernières années, les prix du blé, du maïs, du riz et d’autres denrées alimentaires de base ont doublé, voire triplé, et la majeure partie de ces augmentations ont eu lieu uniquement durant ces derniers mois. Si les prix plus élevés des produits alimentaires sont une gêne pour les Américains, même relativement aisés, ils ont un impact réellement dévastateur dans les pays pauvres, où la nourriture compte souvent pour plus de la moitié des dépenses d’une famille.

Il y a déjà eu des émeutes de la faim dans le monde. Les pays producteurs, de l’Ukraine à l’Argentine, limitent leurs exportations pour tenter de protéger leurs consommateurs nationaux, ce qui conduit à des protestations de la part des agriculteurs en colère - et aggrave encore la situation des pays qui ont besoin d’importer des produits alimentaires.

Comment est-ce arrivé ? La réponse tient en une combinaison de tendances à long terme, de circonstances défavorables - et de politiques inadaptées.

Commençons par les circonstances que l’on ne peut attribuer à une faute de quiconque.

Tout d’abord, il y a la progression du nombre de chinois consommateurs de viande, le nombre croissant de personnes dans les économies émergentes qui sont pour la première fois suffisamment riches pour commencer à se nourrir comme les Occidentaux. Il faut environ 700 calories de nourriture végétale pour produire 100 calories de viande bovine, et ce changement de régime alimentaire entraîne une augmentation de la demande globale de céréales.

Deuxièmement, il y a le prix du pétrole. L’agriculture moderne est très intensive en énergie : elle en consomme une grande quantité pour la production d’engrais, l’usage des machines agricoles, sans oublier le transport des produits de la ferme au consommateur. Avec la persistance du pétrole au-dessus de 100 dollars par baril, les coûts de l’énergie sont devenus un facteur important poussant à la hausse les prix agricoles.

Le prix élevé du pétrole, soit dit en passant, a également beaucoup à voir avec la croissance de la Chine ainsi que des autres économies émergentes. Directement et indirectement, la croissance de ces puissances économiques entre en concurrence avec le reste du monde pour s’approprier les ressources rares dont font partie le pétrole et les terres agricoles, ce qui entraîne une hausse des prix des matières premières de toutes sortes.

Troisièmement, il y a eu une série de conditions climatiques défavorables dans les principales régions de production céréalière. En particulier, l’Australie, qui est normalement le deuxième plus grand exportateur de blé, a été atteinte par une sécheresse dramatique.

J’ai écrit que ces différents facteurs à l’origine de la crise alimentaire ne sont imputables à quiconque, mais ce n’est pas tout à fait vrai. L’essor de la Chine et des économies émergentes est la principale force motrice des prix du pétrole, mais l’invasion de l’Irak - qui allait selon ses partisans amener un pétrole bon marché - a aussi réduit l’approvisionnement en pétrole à un niveau inférieur à ce qu’il aurait été sans cela.

Et les mauvaises conditions météorologiques, en particulier la sécheresse en Australie, sont probablement liées aux changements climatiques. Donc les hommes politiques et les gouvernements qui ont contrecarré l’action contre les gaz à effet de serre portent aussi une certaine responsabilité dans ces pénuries alimentaires.

Toutefois, là où les effets d’une mauvaise politique sont manifestes, c’est dans la croissance de ces « diables » qui ont pour noms éthanol biocarburants.

Les subventions accordées à la conversion des cultures vers les biocarburants étaient censées promouvoir l’indépendance énergétique et contribuer à limiter le réchauffement de la planète. Mais cette promesse était, comme le magazine Time l’a carrément écrit, une « escroquerie ».

C’est particulièrement vrai dans le cas de l’éthanol produit à partir du maïs : même en se basant sur des estimations optimistes, la production d’un litre d’éthanol à partir de maïs nécessite d’utiliser majeure partie de l’énergie que contient ce litre. Mais il se trouve que même des politiques apparemment « bonnes » en faveur des biocarburants, comme celle du Brésil prônant l’utilisation de l’éthanol produit à partir de la canne à sucre, ont pour résultat d’accroître le rythme du changement climatique, en accélérant celui de la déforestation.

Dans le même temps, les terres consacrées aux cultures de biocarburants de synthèse ne sont plus disponibles pour les cultures vivrières, ce qui fait que les subventions aux biocarburants sont un facteur majeur dans la crise alimentaire. On pourrait décrire les choses de cette façon : les gens meurent de faim en Afrique afin que les hommes politiques américains puissent gagner des voix dans les Etats agricoles des USA.

Et au cas où vous vous posiez la question, sachez que tous candidats restant en course pour la présidentielle ne valent guère mieux sur cette question.

Une dernière chose : l’une des raisons pour laquelle la crise alimentaire a pris aussi rapidement des proportions si dramatiques c’est parce que les principaux acteurs du marché des céréales ont fait preuve d’un coupable laisser aller.

Les gouvernements et les vendeurs de céréales du secteur privé maintenaient habituellement des stocks importants, pour le cas où une mauvaise récolte aurait provoqué une pénurie soudaine. Au fil des ans, toutefois, on a autorisé ces stocks de précaution à diminuer, principalement parce que tout le monde en était venu à imaginer que les pays souffrant de mauvaises récoltes pourraient toujours importer la nourriture dont ils avaient besoin.

Cet état de fait a rendu l’équilibre des ressources alimentaires mondiales très vulnérable à une crise affectant de nombreux pays à la fois - de la même façon que la commercialisation de titres financiers complexes, censée répartir les risques, a rendu les marchés financiers mondiaux très vulnérable aux chocs systémiques.

Que faut-il faire ? Le besoin le plus immédiat c’est d’aider davantage les familles en détresse : les Programme Alimentaire Mondial des Nations Unies a lancé un appel désespéré pour obtenir des fonds.

Nous avons également besoin de prendre des mesures de limitation contre les biocarburants, qui s’avèrent avoir été une terrible erreur.

Mais il difficile d’apprécier l’impact que pourraient avoir de telles mesures. Les produits alimentaires bon marché, comme le pétrole bon marché, appartiennent peut-être au passé


source
Pili

Message par Pili »

Complement d'info sur Zeigler et L'Empire de la Honte
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Jean Ziegler : "Nous allons vers une reféodalisation du monde"

Dans son nouvel essai, L'Empire de la honte (Fayard), qui paraît le 10 mars, le sociologue et intellectuel subversif genevois - aujourd'hui rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation de la commission de l'ONU pour les droits de l'homme - part à l'attaque des "sociétés transcontinentales privées". Accusées d'entretenir la famine, de détruire la nature et de subvertir la démocratie, elles étendent leur emprise sur le monde et veulent réduire à néant les conquêtes des Lumières. Pour leur résister, il faut retrouver l'esprit de la Révolution française et relever la tête, comme le fait déjà au Brésil le président Lula da Silva.


Votre livre s'intitule L'Empire de la honte. Quel est cet empire ? Pourquoi "de la honte" ? Quelle est cette honte?

Jean Ziegler : Dans les favelas du nord du Brésil, il arrive aux mères, le soir, de mettre de l'eau dans la marmite et d'y déposer des pierres. A leurs enfants qui pleurent de faim elles expliquent que "bientôt le repas sera prêt…", tout en espérant qu'entre-temps les enfants s'endormiront.
Mesure-t-on la honte éprouvée par une mère devant ses enfants martyrisés par la faim et qu'elle est incapable de nourrir?

Or l'ordre meurtrier du monde - qui tue de faim et d'épidémie 100 000 personnes par jour - ne provoque pas seulement la honte chez ses victimes, mais aussi chez nous, Occidentaux, Blancs, dominateurs, qui sommes complices de cette hécatombe, conscients, informés et, pourtant, silencieux, lâches et paralysés.
L'empire de la honte? Ce pourrait être cette emprise généralisée du sentiment de honte provoqué par l'inhumanité de l'ordre du monde. En fait, il désigne l'empire des entreprises transcontinentales privées, dirigées par les cosmocrates. Les 500 plus puissantes d'entre elles ont contrôlé l'an passé 52 % du produit mondial brut, c'est-à-dire de toutes les richesses produites sur la planète.

Dans votre livre, vous parlez d'une "violence structurelle". Qu'entendez-vous par là ?


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==>Zeigler chez Las bas si j'y suis

==>Vidéo TV5


Le site du Film « le marché de la faim » « we feeld the world »


==>Le site du Film « le marché de la faim » « we feeld the world »
Satya

Message par Satya »

Or l'ordre meurtrier du monde - qui tue de faim et d'épidémie 100 000 personnes par jour - ne provoque pas seulement la honte chez ses victimes, mais aussi chez nous, Occidentaux, Blancs, dominateurs, qui sommes complices de cette hécatombe, conscients, informés et, pourtant, silencieux, lâches et paralysés.
très juste, je rajouterais un sentiment d'impuissance mais qui est totalement faux: c'est notre lacheté et notre complicité par pure égoisme qui leur permet de tout se permettre !!

nos ancêtres ont eux eu le courage de se battre, pourquoi ne l'avons nous pas???
Pili

Message par Pili »

le manifeste des enragés de Jean Roux 1789-1794

le manifeste des enragés
Satya

Message par Satya »

Pili a écrit :le manifeste des enragés de Jean Roux 1789-1794

le manifeste des enragés
tout à fait d'actualité ! 8)
Yves
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Quelques chiffres sympathiques !

Message par Yves »

Selon Joseph Stiglitz, Prix Nobel d'économie, la guerre en Irak aurait déjà coûté 3.000 MILLIARDS DE DOLLARS.

C'est-à-dire l'équivalent de 500 dollars par Terrien !

Selon l'état-major français, les USA investissent dans leur défense et les deux guerres menées en Afghanistan et Irak… 21.000 dollars… PAR SECONDE (nuit comprise !).

Ainsi, quand un être humain meurt toutes les 5 secondes de malnutrition dans le monde, les USA - dans le même temps - dépensent 105.000 dollars à faire la guerre.
Satya

Message par Satya »

et oui, et aux usa aussi il y a des gens y compris des familles avec enfants qui ont faim!!

quand on regarde un peu les chiffres on se rend bien compte qu'il y a suffisemment pour nourir correctement les populaations, mais la solidarité et le partage sont grandement mis à mal par ces dominateurs destructeurs !!
tristesir

Message par tristesir »

Ainsi, quand un être humain meurt toutes les 5 secondes de malnutrition dans le monde, les USA - dans le même temps - dépensent 105.000 dollars à faire la guerre.

L'armement est l'un des moteurs de la puissance économique américaine.
La guerre garantie des profits, des emplois etc.


Tant que la guerre sera source de profits, et qu'une civilisation entière sera basée économiquement dessus, elle ne risque pas de s'arrêter.

(Quand on détruit, il faut reconstruire, c'est une façon d'entretenir la croissance économique)
Satya

Message par Satya »

Les fausses explications de la crise alimentaire dans la presse

Depuis plusieurs jours, des manifestations populaires prennent forme dans de nombreux pays du Sud. Les raisons de ce mécontentement sont partout semblables ; les prix de la nourriture de base ont augmenté de manière aussi brutale qu’importante et les populations, déjà paupérisées par la mondialisation, se retrouvent dans l’incapacité d’assumer cette charge supplémentaire. Les peuples ont faim ! Les causes de cette flambée sont multiples mais elles sont globalement issues des jeux économiques. D’une part, une spéculation de replis sur les denrées alimentaires suite à la crise des subprimes, d’autre part la production d’agrocarburants et le réchauffement climatique. Pourtant, certains journalistes pointent dans leurs articles les autorités locales africaines comme responsables des choix catastrophiques en matière de politiques alimentaires, semblant ignorer que les politiques agricoles des pays du Sud sont soumises aux conditionnalités de la Banque mondiale, du Fonds monétaire international (FMI) ou encore aux Accords de partenariat économique (APE). Ceux qui façonnent l’opinion publique font ici preuve d’une légèreté étonnamment orientée. C’est ainsi que l’on peut lire dans la presse écrite belge : « de nombreux pays du continent [africain] importent des aliments au lieu de les produire, parce que les autorités locales donnent la priorité aux cultures d’exportation afin d’en retirer les devises pour acheter ce qu’ils ne produisent pas |1| ». Raccourci étonnant. Aussi étonnant que simplificateur et qui dédouane à peu de frais les politiques néolibérales de privatisation, de plans d’ajustement structurel, imposés depuis bientôt trente ans par les institutions financières internationales (IFI) et les gouvernements du Nord au reste de la planète.

par Eric De Ruest

Les PAS (plans d’ajustement structurel) ont été imposés par les institutions de Bretton Woods aux pays du Sud dans le contexte de la crise de la dette du début des années 1980 |2|. Ces mécanismes, tout droit issus de l’idéologie néolibérale, englobent l’ensemble des secteurs des sociétés visées. En effet, pour les théoriciens du néolibéralisme, la mondialisation déploiera l’ensemble de ses bienfaits quand chaque région produira ce en quoi elle excelle et laissera donc le soin aux autres régions de produire la majorité de ce dont elle a besoin. C’est en substance la théorie des avantages comparatifs datant de 1817. Plus simplement, un pays reconnu comme étant particulièrement adapté à la culture du cacao doit renoncer à produire les céréales, les huiles végétales, les légumineuses nécessaires à l’alimentation de base de ses habitant(e)s et doit échanger sur le marché mondial sa production contre tout ce qui lui manque. Il s’agit donc de se couper des cultures vivrières séculaires et essentielles à la souveraineté alimentaire des peuples pour se plier aux jeux des économistes. Jeux dangereux qui ont montrés leurs limites très rapidement et dont on peut contempler toute la déraison à travers les échecs observés dans de nombreux pays ( Haïti, le Sénégal, le Burkina Faso, etc.). Dangereux car ignorants la destruction de la biodiversité au profit des monocultures d’exportations, ignorants aussi les impacts écologiques désastreux des transports nécessaires pour toutes ces marchandises. De plus, comment imaginer, sans une politique volontariste de contrôle des prix, qu’un pays qui exporte l’arachide dont les cours restent bas pendant 20 ans sur le marché mondial pourra importer les tracteurs et le pétrole nécessaires à son maintien sur ce marché ? Quand on connaît la tendance des cours du Brent à s’envoler toujours plus vers de nouveaux sommets et des prix des biens manufacturés à rester démesurément supérieurs aux cours de cette pauvre cacahuète, on imagine la catastrophe. C’est immanquablement la ruine et la famine pour la paysannerie locale et l’inévitable migration vers les bidonvilles pour une large partie de cette population.

Quelle est donc cette théorie issue des milieux intellectuels réputés sérieux qui fait fi de la biodiversité, de la souveraineté alimentaire des peuples, des risques de destruction par différents fléaux naturels ou humains accrus par le choix de la monoculture, de l’essence chaotique du marché |3|, de la pollution généralisée ?
Une stratégie délibérée de transformation sociale à l’échelle mondiale

Dans son premier rapport de 1999 consacré aux PAS, M. Fantu CHERU |4| explique que l’ajustement structurel va « au delà de la simple imposition d’un ensemble de mesures macroéconomiques au niveau interne. Il est l’expression d’un projet politique, d’une stratégie délibérée de transformation sociale à l’échelle mondiale, dont l’objectif principal est de faire de la planète un champ d’action où les sociétés transnationales pourront opérer en toute sécurité. Bref, les PAS jouent un rôle de ’courroies de transmission’ pour faciliter le processus de mondialisation qui passe par la libéralisation, la déréglementation et la réduction du rôle de l’Etat dans le développement national. » Réduction du rôle de l’Etat. Et cela vient d’un rapporteur spécial des Nations-Unies. M. CHERU n’est d’ailleurs pas le seul rapporteur des Nations-Unies à avoir évoqué dans ses travaux les conséquences néfastes des PAS. Des critiques détaillées issues des travaux d’autres experts onusiens font feu de tout bois dans les domaines du droit au logement, du droit à l’alimentation ou encore à celui de l’éducation |5|. Là où les IFI imposent la privatisation et ouvrent une voie royale à l’appétit gargantuesque des multinationales. C’est donc à cause d’une dette trop souvent issue de dictatures ou d’emprunts réalisés par les puissances coloniales (l’un n’empêchant pas l’autre) et transférés aux états nouvellement indépendants, que les gouvernements des pays du Sud (d’Afrique en particulier) |6| ont été contraints d’accepter les PAS et ainsi concéder une part importante de leur souveraineté. Si bien qu’avancer aujourd’hui que les choix stratégiques pour l’alimentation seraient encore dans les mains des gouvernements du Sud relève à moins d’un manque d’information indigne du journalisme que l’on est en droit d’attendre en démocratie. Entendons par là que fustiger à tort les Africains est une contre-vérité lourde de sens et qui n’aide en rien à créer un climat fraternel entre les peuples.
Un exemple pour mieux comprendre les impacts négatifs des PAS : Haïti

Les émeutes qui se sont déclenchées la semaine dernière à Port-au-Prince, mais aussi dans d’autres villes haïtiennes, ont été réprimées dans le sang. Une quarantaine de blessés au total dont quatorze par balles et au moins 5 morts. Pourtant, ces manifestations n’étaient que le résultat prévisible d’une flambée subite du prix du riz (de l’ordre de 200%). Quand on sait qu’aujourd’hui 82% de la population vit dans une précarité absolue avec moins de 2$ par jour, on comprend facilement de telles réactions face à cette augmentation. Haïti utilise 80% de ces recettes d’exportations uniquement pour couvrir les importations nécessaires à ses besoins alimentaires |7|. Cependant, il n’en a pas toujours été comme cela. Avant la chape de plomb dictatoriale des Duvalier père et fils (de 1954 à 1986), l’île connaissait l’autosuffisance alimentaire. Mais la tendance qu’ont les IFI’s à soutenir les dictatures s’est encore confirmée ici et le peuple haïtien, en plus des blessures personnelles (tortures, exécutions sommaires, climat de terreur permanent instauré par les tontons macoutes), se voit réclamer le remboursement de la dette externe qui culminait en septembre 2007 à 1,54 milliard de dollars |8| Le secteur agricole aura été le plus durement touché par les exigences des prêteurs et puisque la population était majoritairement rurale, l’ampleur des dégâts n’en a été que plus importante. En cause ? Principalement l’abaissement des droits de douane imposé aux pays du Sud mais rarement respecté entre l’Europe et les Etats-unis. Et l’enchaînement fatal s’est mis en place ; arrivée d’un riz produit à l’étranger à moindre coût (car subventionné) donc exode vers les villes de nombreux paysans ruinés et donc impossibilité de réaction du marché local en cas de flambée des prix sur le marché international. Ici comme ailleurs, les bénéfices de la libéralisation sont inexistants pour la très grande majorité de la population, les dégâts sont par contre considérables.
Un tsunami d’origine bien humaine

Quand les pompiers pyromanes communiquent, partout la presse y fait écho. Le (pas très bon) mot de L.Michel est cité par tous les journalistes de la place européenne : « un tsunami économique et humanitaire ». On pourrait croire par là que la crise a une cause extra-humaine, comme le fruit d’une catastrophe naturelle. Pourtant, comme nous l’avons développé plus haut, les causes de la crise sont par trop le résultat de politiques dictées par les milieux financiers aux gouvernements du Sud. C’est aussi à notre voracité énergétique qu’il faut imputer une des causes de cette crise ; Les agrocarburants rentrent bien en concurrence, sur le marché, avec les denrées alimentaires. La spéculation qui se fait autour de cette nourriture changée en carburant tire le prix des céréales et du sucre vers de nouveaux plafonds. Même Peter Brabeck, patron de la multinationale Nestlé, s’inquiète de la situation dans une interview au journal suisse « NZZ am Sonntag » du 23 mars 2008. Pour lui, si l’on veut couvrir 20% de la demande pétrolière avec des agrocarburants, il n’y aura plus rien à manger |9|

Il est donc plus que temps d’abandonner ce modèle de (sous-)développement néfaste et de laisser le choix aux populations de cultiver prioritairement pour leur marché intérieur. Actuellement, avec les connaissances acquises dans le domaine de l’agriculture respectueuse de l’environnement, nous pouvons viser l’autonomie alimentaire régionale sur l’ensemble de la planète et donc satisfaire à un droit humain fondamental, celui de se nourrir décemment. Les conséquences positives de ces progrès tant attendus seraient de favoriser rapidement la santé dans un premier temps, puis l’éducation, induisant une qualité de vie meilleure sous toutes les latitudes.
notes articles:

|1| p.4 de « la libre Belgique », un article de M.F.C. (avec l’AFP et Reuters) ce jeudi 10 avril 2008

|2| Lire E.Toussaint « la finance contre les peuples : La bourse ou la vie » chap.8 p.187 coédition Syllepse /CADTM/CETIM, 2004.

|3| Benoît Mandelbrot a conçu, développé et utilisé une nouvelle géométrie de la nature et du chaos. On sait moins que la géométrie fractale est née des travaux que Mandelbrot avait consacrés à la finance au cours des années 1960. Pour de plus amples informations lire : « Fractales, hasard et finance », de Benoît Mandelbrot, 1959-1997 en poche.

|4| Expert indépendant auprès de l’ancienne commission des droits de l’homme des Nations-Unies (sur les effets des PAS sur la jouissance effective des droits humains - rapport E/CN.4/1999/50 du 24 février 1999)

|5| Lire à ce propos la brochure éditée par le CETIM « Dette et Droits Humains », décembre 2007.

|6| Pour le Congo par exemple, au 30 juin 1960, jour de l’indépendance, la dette directe s’élève à un total de 921 096 301,44 US$ » (Tiré de l’article de Dieudonné Ekowana).

|7| Ce qui laisse très peu de marge pour tout le reste, tout ce qui est pourtant nécessaire au développement d’un pays. Jamais d’ailleurs le duo infernal FMI/BM ne s’est vanté d’une quelconque réussite de ses politiques sur cette île.

|8| Selon la Banque mondiale et l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (UNODC) Bébé Doc. aurait détourné au total entre 300 et 800 millions de dollars.

|9| Tout comme le Premier ministre italien, Romano Prodi, sceptique sur les bénéfices des agrocarburants et qui a affirmé qu’une transition vers ce type de palliatif au pétrole aurait un impact négatif sur la production alimentaire.

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URL: http://www.cadtm.org
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