Un conseiller à l'emploi Anpe révolté

[superuser]

Un message de libegafra :


Je suis conseiller à l'emploi Anpe depuis plusieurs années, et j'ai parfois mauvaise conscience. Je me dis que je vais trop loin avec les demandeurs d'emploi. Que je leur mets trop la pression.

Je croyais "à l'abri" de tels remords. Par exemple, je mets un point d'honneur à ne JAMAIS radier un chômeur, même s'il ne vient à aucune de mes convocations et qu'il ne répond à aucun de mes coups de fils.
Mais n'empêche.
Je me dis que parfois j'infantilise les demandeurs d'emplois. J'oublie qu'ils en bavent et que ce qui se joue lors d'un entretien avec moi, c'est leur gagne pain. Je devrais savoir qu'ils n'ont pas demandé à être licenciés, virés, jetés.
Je devrais me souvenir que quand j'étais jeune, je travaillais juste ce qu'il faut pour avoir droit aux allocs', et que je me la coulait douce.

DE QUEL DROIT devrais-je faire la morale aux chômeurs, sachant qu'en plus IL N'Y A PAS DE BOULOT ? Je suis syndiqué, et dès le 1er janvier 2006, à la mise en place du suivi mensuel, je me suis battu contre cette bêtise. A l'Anpe, on fait du social, et c'est incompatible avec le contrôle.

DE QUEL DROIT CONTRÔLONS-NOUS LES CHÔMEURS alors qu'on se prosterne devant les employeurs, qui parfois traitent leurs salariés comme des chiens, et demandent systématiquement qu'on leur propose des profils surqualifiés pour le Smic, parfois en CDD, et parfois à mi-temps ? Je suis en colère contre le gouvernement qui nous fais prendre des vessies pour des lanternes, je suis en colère contre les collègues qui trouvent normal le "rapprochement" avec l'Assedic.

Et je suis en colère contre moi-même pour les bêtises que je dis parfois en entretien. Je veux garder cette colère, pour rester vigilant.
Pour être fin et diplômate, toujours, avec des chômeurs qui parfois n'osent pas dire qu'ils veulent juste un peu de temps pour "souffler".
Pour respecter mon prochain, toujours.
Pour continuer à faire du social, car je crois en l'homme, et je crois malgré tout en mon boulot.

[tristesir]

Heureusement que les agents ANPE n'ont pas (encore) d'arme de service car sinon, comme dans la police, le taux de suicide à l'ANPE serait probablement largement supérieur au taux de l'ensemble de la population française.

[Mallo]

Lors de mes stages, je vois pas mal de précarité ... Lors de mon dernier stage, j'étais en maternité et un couple au chômage venait d'apprendre que Madame attendait un heureux événement ...


Ils se posaient la question de garder ou pas l'enfant... Ca m'a fait un mal de chien de les écouter se confier ...

Mais pour rien au monde je ne passerai le concours pour bosser à l'ANPE ... C'est trop pour moi ...

Vous avez du courage de garder votre coeur ... Bravo et merci !!!

[Chris37]

Beaucoup de gens qui bossent dans ces ANPE deviennent vite inhumains. Le management y est pour beaucoup...

[Urbane]

J'aurai préféré te rencontrer libegafra lors d'un entretien quand j'étais enceinte de 6 mois de ma petite fille !! Pas encore en congé mat mais au chômage (licencié enceinte... hé oui), j'ai dû me rendre à l'anpe.

Je suis tombée sur une dame doucement dingue qui me regarde, me dit de m'asseoir et qu'on ne sortira pas de son bureau tant qu'on ne m'aura pas décroché un rendez-vous (ohhhhhh)...pianote sur son clavier mon numéro d'identifiant et me dit " ah bah non, c'est dommage, vous avez accepté un CDI, on pourra pas vous donner de contrat avenir !" et puis elle m'a demandé interloquée si j'avais de l'aérophagie ou si j'étais enceinte (je tiens à dire que j'étais énooooooorme à 6 mois, ça n'aurait pu échapper à personne).

Voilà. Sinon, y en a qui essaient de faire leur job. Comme partout.

[geneve]

Libegafra

et bien l'on connait peu de gens comme toi où que ce soit je le pense tr authentiquement
il est tr rare d' accepter de se regarder avec une telle honnëteté et de se remettre en cause de la sorte
je te souhaites de rester telle que tu es et de ne plus souffrir de tt ce que tu perçois autour de toi