Source : Depêches de l'éducationLa colère monte dans les établissements scolaires où les enseignants, prenant la mesure des suppressions de postes à la rentrée prochaine, avec des classes qui s'annoncent surchargées, réagissent par des grèves, boycotts de bacs blancs ou en observant le silence aux conseils de classe.
Une prof d'allemand dans un collège, deux professeurs de français dans un lycée, jusqu'à une quinzaine d'enseignants dans certains établissements: le budget 2007 supprime 5.038 équivalents temps plein.
La traduction locale de cette décision budgétaire, appelée "carte scolaire", est tombée fin janvier et, depuis, les actions sporadiques se multiplient dans l'attente d'une action nationale après un mois de vacances d'hiver tournantes.
En apprenant qu'elle était concernée, Florence Merceille, 26 ans, prof de philosophie au lycée Henri Darras de Liévin (Pas-de-Calais) a ressenti un "goût amer". "J'ai passé un concours très difficile, l'agrégation, et je risque de me retrouver documentaliste à 150 km de chez moi", explique-t-elle, en ironisant sur "les gens dans le privé qui envient le sort des fonctionnaires". Dernière arrivée dans sa discipline, dans son lycée, elle est contrainte de plier bagage du fait de la disparition d'une terminale ES. "Quand ils sont 20 en philo, les classes technologiques sont très difficiles à gérer, eh bien ils seront 33 l'année prochaine !", soupire-t-elle.
A 52 ans, Jeannine Moreau, va être priée de quitter à la rentrée, pour une destination inconnue, le collège Jules Ferry de Villeneuve-le-Roy (Val-de-Marne), où elle enseignait déjà cette année en partie l'allemand (sa discipline) et le français. "J'ai réussi à convaincre 11 élèves de CM2 de faire de l'allemand l'année prochaine, mais ils (l'administration) ont décidé qu'il n'y aura plus d'allemand en 1ère langue en 6e ni d'ailleurs en deuxième langue en 4e", assure-t-elle, relevant dans un sourire forcé : "Dans le même temps, on nous encourage en revanche à ouvrir une section de chinois".
Déjà furieux qu'un décret dit "Robien" vienne allonger le temps de travail d'environ 50.000 d'entre eux (sur 384.000), les enseignants engagent des actions multiples, la plupart soutenues par les syndicats.
Dans quatre lycées rennais par exemple, les bacs blancs on dû être ajournés, de même que dans une douzaine de lycées de l'académie de Lyon ou dans trois lycées de l'académie de Lille. Les professeurs du collège Pierre-Sémard de Bobigny ont de leur côté organisé une "journée bivalence" (enseignement dans deux matières) pour montrer les difficultés de l'exercice. Esther, professeur d'espagnol, a ainsi donné un cours d'allemand, langue qu'elle n'a "pas pratiqué depuis le lycée, soit une petite dizaine d'années", mais pour cela elle a dû solliciter l'aide des élèves redoublants.
Près de Carhaix (Finistère), les conseillers d'orientation-psychologues ont refusé, d'un commun accord avec les professeurs principaux, de prendre en charge une session de formation devant permettre à ces derniers d'assurer les entretiens d'orientation désormais prévus pour tous leurs élèves de 3e.
Au lycée Montebello de Lille, les professeurs ont décidé de participer "silencieusement" aux conseils de classe, s'en tenant à "une déclaration sur les suppressions de postes au lycée".
A Marseille, qui perd 242 postes à la rentrée, les enseignants des collèges "ambition réussite", en principe mieux dotés que les autres, multiplient les grèves pour protester contre la baisse de l'encadrement, accentuée depuis 2003 et qui, selon eux, encourage la montée de la violence.
On va vers un démantèlement progressif de l'éducation nationale. Le but avoué est de privatiser l'enseignement public. Et dans le même temps, d'abaisser le niveau scolaire, afin de générer une classe d'âge sans esprit critique, donc "corvéable à merci " !
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