Non, en France il n'est pas difficile de licencier !

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superuser
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Non, en France il n'est pas difficile de licencier !

Message par superuser »

Il suffit de savoir écrire et de respecter une procédure simple comportant des délais raisonnables. Il en coûte un entretien avec le salarié, et des frais de lettre recommandée + AR.
Finalement, rares sont les salariés qui vont aux Prud'hommes.

Partout et en toute occasion, on veut faire croire aux Français que licencier est extrêmement compliqué et onéreux, que c'est à cause de cela que les patrons ne veulent pas "prendre le risque" d'embaucher et de créer des emplois... Bruno LABATUT-COUAIRON, Inspecteur du travail et président de la CFTC Ministère du travail, répond pour Actuchomage à cette épineuse question.

Les récents événements sociaux qui ont agité la France à l'occasion de la lutte pour le retrait du Contrat Première Embauche se sont soldés par une victoire de ses opposants. L'article 8 de la loi sur le CPE a été remplacé par un article accroissant les aides publiques aux contrats déjà existants : par exemple, octroi de 400 € par mois pour tout employeur qui embauchera un jeune issu d'une ZUS la première année, puis 200 € la deuxième avec exonération totale des cotisations sociales... On peut donc dire que, en ce qui concerne les fonctionnaires, les économies substancielles réalisées par leurs ministères seront reversées au patronat.

Victoire en demi-teinte donc. La France au travail se réveille avec la gueule de bois et le porte-monnaire vide. Mais quelques semaines après, force est de faire un constat : le combat contre la déréglementation sociale voulue par le gouvernement est loin d'être gagné. D'une part, le CNE (qui est la copie du CPE pour les entreprises de moins de 20 salariés, soit plus de 90% des entreprises en France) est toujours bien vivant. Il n'a pas eu les mêmes honneurs et les étudiants ne sont pas montés au créneau contre lui parce que, sans doute, ils pensaient qu'il ne les concernaient pas directement, ou moins directement que le CPE. Il ne reste donc plus aux salariés qui sont sous l'empire de ce contrat "nouvelles embauches" qu'à faire entendre leur voix devant les tribunaux.

Peut-on dire que les contre-pouvoirs ont abdiqué ? On peut légitimement se le demander. Comment en effet concevoir, dans un Etat de droit, que les parties à un contrat (fut-il un contrat de travail) puissent rompre ce contrat sans motif ? C'est une absurdité totale qui va en contradiction avec tous les principes du Droit civil français, et a fortiori du Droit du travail qui n'a été institué qu'en vue de rétablir l'équilibre rompu entre les parties au contrat de travail. Le Droit du travail vient protéger partiellement une des deux parties, la plus faible dans la négociation puisqu'elle est demandeuse d'un emploi. Le CNE vient insidieusement introduire dans le Droit du travail une disposition qui est encore moins protectrice que le Droit civil commun. Cette verrue juridique s'est justifiée par l'exigence de "souplesse", de "flexibilité", la "séparabilité" que voudrait voir consacrée Laurence Parisot, présidente du MEDEF.

Sur le fond, qu'en est-il ? Est-il si difficile de se séparer d'un salarié en France, qu'il faille le priver du droit le plus essentiel de toute personne : la motivation des actes qui vous concernent, qu'ils soient privés ou publics ?

Le droit du licenciement individuel est essentiellement réglé par les articles L.122-14 et suivants du Code du travail. L'employeur qui envisage de se séparer d'un collaborateur doit le convoquer à un entretien préalable par lettre RAR ou remise en main propre qui ne peut avoir lieu moins de 5 jours après la présentation au salarié de la dite lettre. Au cours de cet entretien, le salarié peut se faire assister d'un conseiller du salarié (liste préfectorale) ou d'un salarié de l'entreprise si cette dernière a des délégués du personnel. L'employeur expose les griefs au salarié et recueille ses observations. Il ne lui reste ensuite qu'à respecter au moins un jour franc entre l'entretien et la notification du licenciement qui se fait également par lettre RAR en exposant les motifs précis du licenciement.

Il n'y a donc rien de plus simple que de se séparer d'un salarié quand on a des bons motifs de le faire. Seulement, c'est là que le bât blesse : il faut avoir un motif ! L'arbitraire n'a pas cours. En effet, en cas de motifs erronés, discriminants ou abusifs, le licenciement sera qualifié "sans cause réelle et sérieuse" par les Conseils de Prud'hommes qui pourront condamner l'employeur à verser des dommages-intérêts au salarié abusivement licencié.

IL N'Y A DONC AUCUNE DIFFICULTÉ À LICENCIER EN FRANCE…

Ce qu'à voulu imposer le gouvernement c'était non pas la simplification de la procédure, mais surtout la disparition de la motivation. De ce fait, l'employeur n'aura même plus à rechercher des motifs valables, il peut se séparer de son collaborateur à son gré. Les premiers jugements sont édifiants : le motif réel de la rupture du contrat va de la discrimination au licenciement économique déguisé. Dans le principe, l'absence de motivation sous-entendait probablement que l'employeur n'aurait à justifier ce que la jurisprudence antérieurement appelait la "perte de confiance". Jurisprudence qui a toujours consacré le principe selon lequel l'employeur choisit librement ses collaborateurs. Mais le texte est allé très loin en permettant tous les abus possibles.

Il n'y a donc en France pas de "rigidités", d'"immobilismes". Les travailleurs français sont dans le peloton de tête quant à la productivité. Rendre le marché du travail "dépressif" permet d'imposer de telles mesures qui sont aberrantes dans notre pays. La déconstruction du Code du travail est en marche : recodification du Droit du travail en cours (qui permettra, avec de simples décrets, de retirer des pans entier de mesures protectrices qui avant étaient de l'ordre de la loi), casse de l'Inspection du Travail qui va sous peu être "mise au pas" par la hiérarchie du Ministère du travail, etc… Il semble hélas que toutes ces mesures n'intéressent que peu les médias, plus attentifs aux combats de coqs entre les têtes du gouvernement.
Dernière modification par superuser le 09 mai 2006, modifié 1 fois.
superuser
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Message par superuser »

Bruno LABATUT-COUAIRON s'est spontanément proposé pour nous écrire des articles au fil de l'actualité concernant le droit du travail et son métier d'Inspecteur. Nous ne manquerons pas de faire régulièrement appel à lui, y compris pour le forum "Posez vos questions".
chris

Message par chris »

suffit de savoir écrire et de respecter une procédure simple comportant des délais raisonnables. Il en coûte un entretien avec le salarié, et des frais de lettre recommandée + AR.
Finalement, rares sont les salariés qui vont aux Prud'hommes.
oui ,avec un bon motif ,les 3 recommandés et l'entretien peut etre classé dans la semaine ,il me semble !

applaudissement pour le sieur LABATUT-COUAIRON en tout cas :wink:
chris

Message par chris »

et d'en profiter pour signaler que l'article vient d'etre repris sur le rezo.net .

actuuuuu toujours a la pointe de l'info :wink:
Invité

Non, en France il n'est pas difficile de licencier !

Message par Invité »

superuser a écrit :Il suffit de savoir écrire et de respecter une procédure simple comportant des délais raisonnables. Il en coûte un entretien avec le salarié, et des frais de lettre recommandée + AR.
Finalement, rares sont les salariés qui vont aux Prud'hommes.
Merveilleux, merci du tuyau, donc je ne file plus d'indemnités de licenciement, et des que notifié il ne rentre plus dans l'entreprise. Je m'asseois sur leS conventionS collectives
Quand on simplifie ...
Elle est pas belle la vie. C'est quand que l'inspecteur du travail en question se présente aux elections : il a ma voix.

Le coût du licenciement : une lettre AR MDR :lol:
Arrêtez, faut être sérieux !!

ps ; Qui a écrit "Il en coûte un entretien avec le salarié, et des frais de lettre recommandée + AR. "
C'est pas l'inspecteur, c'est la rédaction ?
Si oui, mes excuses auprès de l'inspecteur. :)
superuser
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planète Ribouldingue

Message par superuser »

C'est ça, il faudrait se débarrasser de ses "collaborateurs" sans que ça coûte un kopeck : pas de congés payés, pas d'indemnités légales, rien ? Ouste, dehors et tais-toi !

... Et puis quoi encore ???

Payer les jours de congés non pris, c'est normal !
Payer des indemnités légales, c'est normal ! Payer des indemnités transactionnelles, ce n'est pas obligatoire et ça se négocie. On n'hésite pas à licencier des gros directeurs qui ont décimé des boîtes avec des parachutes en or (J2M), alors pourquoi un salarié qui a 10 ans de maison devrait-il partir sans l'indemnisation minimum prévue par sa convention collective ?

Je rêve.

Si la plupart des patrons font le choix de licencier leurs salariés les plus anciens pour faire des économies sur leur masse salariale en les remplaçant par des plus jeunes moins chers, c'est que ça va dans leurs intérêts.

Le chômage est le prix que paient des millions d'actifs sur l'autel de la prospérité économique. Dommage qu'on n'applique pas plus le principe du pollueur-payeur à ces bouffons qui nous prennent pour des variables d'ajustement.
Invité

Message par Invité »

superuser a écrit :C'est ça, il faudrait se débarrasser de ses "collaborateurs" sans que ça coûte un kopeck : pas de congés payés, pas d'indemnités légales, rien ? Ouste, dehors et tais-toi !

... Et puis quoi encore ???

Payer les jours de congés non pris, c'est normal !
Payer des indemnités légales, c'est normal ! Payer des indemnités transactionnelles, ce n'est pas obligatoire et ça se négocie.
Je rêve.
Certainement, tu rêves.
J'ai JAMAIS dit que les indemnités de licenciement c'était anormal.
Par contre , j'ai pas revé, j'ai bien lu :
"Il en coûte un entretien avec le salarié, et des frais de lettre recommandée + AR. "

Et bien merci de me le confirmer, il y a quelques indemnités aussi. Et j'irai même plus loin, le coût d'un licenciement ne se limite pas aux frais d'AR et des indemnités. Dans certains cas il faut prendre en cause la "perte" du salarié", et ponderer par le coût de son remplacement . Ca se chiffre aussi ça.

Et une nouvelle précision, je lis aussi : "Finalement, rares sont les salariés qui vont aux Prud'hommes."
Si tu as les stats en europe des recours juridique suite à licenciement en Europe, envoie la sauce. Si mes souvenirs sont bon la France occupe la tête du peloton avec l'Allemagne ... Pour le chiffre, je ne m'avance pas, j'ai souvenir d'un 25%, mais là je ne suis pas sur.
La rareté est toute relative.

Tu vois, j'ai du bon.
J'affine tes informations.
superuser
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Message par superuser »

Moins de 20% des salariés licenciés tentent leur chance aux prud'hommes, selon l'inspecteur du travail Gérard Filoche, et 2/3 d'entre eux obtiennent gain de cause.

Il faut croire que la "perte" du salarié et son "coût de remplacement" ne dérangent pas tant que ça. Si licencier coûtait si cher, on aurait moins de chômeurs.
chris

Message par chris »

pour les stats prud'hommale européennes ,ca va etre dur vu que c'est une spécifité francaise heritée de la revolution et fondée en 1806 :idea:

ah ,ces chefs d'entreprises ,aucune dimension culturelle ,le bat blesse :cry:

de toutes façons ,pas besoin de statistiques pour comprendre pourquoi peu de salariés ont recours a la justice :idea:

le recours a un bon avocat est couteux ce qui inflechit le rapport de force en faveur de l'employeur qui lui a souvent les moyens d'un tenor ,les delais et les recours destinés a gagner du temps jouent encore en faveur de l'employeur , la charge de la preuve incombe au salarié ,pas facile d'obtenir des temoignages ni des documents qui sont la proprieté de l'entreprise ( le cambriolage etant interdit :D ) ,le sabotage systematique des audiences par l'entremise des conseillers patronaux du MEDEF :twisted:

et bien ,tout ca concourt a decourager le plaignant car le parcours du combattant infligé et le fait de passer du statut de victime a celui d'assaillant en a a laisse plus d'un dubitatif ;

je rajouterais que la plupart des proces arrivant en audience finale ne le sont que du a des problemes d'ego patronaux ,les branleurs du bizness si on peut dire :twisted:

les grands groupes pratiquant a cet effet la negociation ,facile car un avocat specialisé connait parfaitement les tarifs en cours ,donc negocier represente toujours une economie a tout point de vue pour l'entreprise .
Invité

Message par Invité »

superuser a écrit :Moins de 20% des salariés licenciés tentent leur chance aux prud'hommes, selon l'inspecteur du travail Gérard Filoche, et 2/3 d'entre eux obtiennent gain de cause.

Il faut croire que la "perte" du salarié et son "coût de remplacement" ne dérangent pas tant que ça. Si licencier coûtait si cher, on aurait moins de chômeurs.
Merci pour les chiffres.

Le "si cher", c'est toi qui l'écrit. Moi je me contente de dire que cela a un coût ( plus élevé qu'une lettre AR). J'essaie de ne pas avoir de biais qui déforme. La question de savoir si c'est cher, pas assez, ou peu, c'est autre chose, mais avant de débattre de cela il faut avoir une bonne information !

Ce matin ça ne coutait rien, ce soir ça a un coût.
Tu vois quand tu veux :wink:

On pourrais débattre du "rare": 20%. Et remarquer que les 2/3 sont justifiés. Est ce que le chiffre augemnterait si 100% avait recours au prud'hommes ?
Je ne sais pas. Des licenciés n'y vont pas parce que "ça ne vaut pas le coup", alors que le licenciement est abusif.
Est-ce que la proportion serait la même ?
Je pense que la proportion serait plus faible, car lorsque l'on va au prud'hommes, c'est avec des billes, c'est pour ds raisons.
Invité

Message par Invité »

chris a écrit :pour les stats prud'hommale européennes ,ca va etre dur vu que c'est une spécifité francaise heritée de la revolution et fondée en 1806 :idea:

ah ,ces chefs d'entreprises ,aucune dimension culturelle ,le bat blesse :cry:
As-tu besoin systematiquement d'etre cynique ?

Il existe des stats de l'OCDE sur le recours en justice en cas de licenciement dans les pays d'europe.
C'est pour la dimension culturelle.
On arretera là si tu veux. Superuser n'a pas envie de voir sa file se transformer une fois de plus en réglement de compte.
chris

Message par chris »

c'est tout le probleme ..d'avoir des billes !

et comme le sac de billes est en general dans le coffiot de l'entreprise .

donc les 20% ,c'est ceux qui ont eu la chance de voir une bille rouler par terre et d'avoir eu la bonne idée de la ramasser :idea:
Invité

Message par Invité »

chris a écrit : (...) le recours a un bon avocat est couteux ce
(...)les grands groupes pratiquant a cet effet la negociation ,facile car un avocat specialisé connait parfaitement les tarifs en cours ,donc negocier represente toujours une economie a tout point de vue pour l'entreprise .
Merci d'apporter une pierre à l'edifice du "coût d'un licenciement".
chris

Message par chris »

c'est pas du cynisme ,c'est de la constatation :roll:

c'est pas pareil :idea:

culture moyenne du chef d'entreprise niveau pme bien sur ,un petit bac ,pas de langues etrangeres , faible niveau en informatique et peu de culture commerciale :(

d'ailleurs la plupart des boites sont dirigées par le comptable ,c'est lui qui fait la cuisine ,normal 8)

bien sur ,ca participe pas a embaucher moins con que soi :D

c'est pas moi qui le dit bien que je le constate aussi ,c'est les etudes desastreuses realisées par les instituts d'intelligence economique .

y cherchent a comprendre eux aussi ,faut les comprendre :wink:
Invité

Message par Invité »

chris a écrit :c'est tout le probleme ..d'avoir des billes !

et comme le sac de billes est en general dans le coffiot de l'entreprise .

donc les 20% ,c'est ceux qui ont eu la chance de voir une bille rouler par terre et d'avoir eu la bonne idée de la ramasser :idea:
D'accord, mais on ne peut pas aller jusqu'à dire que 100% des licenciement sont injusstifié.
En outre, il est necessaires de poser des garde fou pour éviter la procedure systematique. Dire que lezs garde fou sont trop élevé, là oui, c'est discutable.
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