Chômage : un monceau de "truanderies" !

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Yves
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Chômage : un monceau de "truanderies" !

Message par Yves »

Une série d'articles piochés dans L'Humanité

• « Truanderies » autour du déficit

Le MEDEF dramatise l’état financier de l’UNEDIC qu’il estime à près de 14 milliards d’euros fin 2005.
Où le régime d’assurance chômage doit-il trouver l’argent nécessaire à l’indemnisation des chômeurs ? Avant la séance de négociation d’hier sur la nouvelle convention UNEDIC, les organisations syndicales se sont montrées à peu près d’accord entre elles sur l’idée d’une pénalisation du recours aux contrats précaires et donc favorables à une hausse des cotisations, mais elles ne réussissent pas à infléchir la position du MEDEF qui veut, lui, continuer de faire les poches des chômeurs en rétablissant la dégressivité des allocations ou en réduisant les durées d’indemnisation.

Dans ce contexte, le patronat dramatise à mort le déficit du régime, estimé à près de 14 milliards d’euros fin 2005, et, dans son édition datée du 7 décembre, le Monde lui file un étrange coup de main par la bande. Sur la base d’"informations" déjà publiées dans l’Expansion, il y a un mois et demi, et immédiatement démenties par l’UNEDIC, le quotidien du soir désigne l’assurance-chômage comme la "nouvelle cible de l’escroquerie organisée". En une et dans les pages intérieures, le journal s’empresse de reprendre le montant faramineux de cette fraude mise en place par des réseaux de "caïds" évoqué par le mensuel : 3 à 4 milliards d’euros ! Citant cette estimation non sourcée qui "circule" d’après l’Expansion, le Monde se trouve quand même contraint de la "recalibrer" tout de suite : le 28 octobre, l’UNEDIC a publié un communiqué de presse cinglant selon lequel "cet ordre de grandeur n’a aucune réalité" et pour ces fraudes détectées par les ASSEDIC, "les montants concernés n’atteignent pas le centième du préjudice prétendument invoqué dans la presse", soit, rappelons-le, 30 à 40 millions d’euros. Au bout du compte, le Monde parle, de son côté 250 millions d’euros depuis 1998. Dans un second papier, le quotidien fait observer que "la brusque réapparition de ces affaires intrigue" particulièrement les syndicats.

Depuis le début de cette négociation, la CGT suggère de s’intéresser aux montants desdites "admissions en non-valeur", les cotisations patronales non payées par les entreprises sous le coup de procédures collectives. D’après un administrateur d’une ASSEDIC régionale, ces "admissions en non-valeur" représenteraient, chaque année, 3 à 4 milliards d’euros de ressources non perçues par le régime.

T. L.

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• Offres non pourvues : une manipulation pour faire culpabiliser les chômeurs

Les offres d’emploi non satisfaites ne sont en fait pas très nombreuses et ne concernent que des métiers alliant conditions de travail difficiles et bas salaires.
Pour justifier l’accroissement des contrôles et des radiations, le gouvernement et le MEDEF font tout pour accréditer l’idée que le chômage est dû aux chômeurs eux-mêmes, qui passeraient leur temps à refuser des offres d’emploi de l’ANPE. Fin 2003, le ministre du travail, François Fillon, avait lancé une offensive en déclarant qu’il était "paradoxal, presque inacceptable", que "malgré l’existence d’un chômage important, certains secteurs d’activité rencontrent des difficultés persistantes pour embaucher". À l’époque, il avançait le chiffre de 300.000 offres non satisfaites par an et se proposait de le réduire de 100.000. En juin dernier, le premier ministre Villepin a repris ce thème en sortant un nouveau chiffre de son chapeau : "Alors que le chômage touche 2 millions et demi de personnes, 500.000 emplois ne trouvent pas preneurs", a-t-il déploré.

D’où sortent ces chiffres ? À quelle réalité correspondent-ils ? "À l’époque de Fillon, la direction générale de l’ANPE avait diligenté une enquête interne et abouti au résultat de 180.000 offres non pourvues par an", tempère Christophe Moreau, secrétaire départemental du SNU ANPE dans les Hauts-de-Seine.

Manipulation de chiffres

Un article du Monde expliquait à l’époque que le ministère du Travail avait relevé 120.000 offres d’emploi non pourvues à l’ANPE, et l’avait multiplié par 2,5 en tenant compte du fait que l’ANPE ne canalise que 40 % des offres du marché du travail, pour arriver à 300.000. Une extrapolation très contestable. Quant aux 500.000 de Villepin, ils semblent relever de la simple invention.

Sur le terrain, les agents ANPE ne savent pas comment ces statistiques sont produites. Une chose est sûre pour eux : les manipulations de l’outil informatique sont faciles et courantes pour satisfaire la course aux objectifs chiffrés de l’ANPE. Par exemple, l’agence veut collecter le plus d’offres d’emploi possible, et se targue d’en proposer 3 millions par an, ce qui peut paraître énorme. Mais plusieurs combines existent pour gonfler les statistiques : une même demande d’un employeur peut apparaître sous plusieurs formes s’il passe par une ou plusieurs agences d’intérim, la chambre des métiers, l’ANPE elle-même. Une même offre, si elle n’est pas satisfaite à temps, peut être annulée puis reformulée plusieurs fois. Un employeur qui fait tourner des CDD sur un même poste va déposer plusieurs offres dans l’année. Or, 30 % des offres seulement concernent des contrats à durée indéterminée. Les 3 millions d’offres correspondent donc à beaucoup moins de postes de travail réels, et encore moins de créations d’emplois. En 2004, l’INSEE a relevé un solde de 17.200 créations dans l’année !

"Les offres qui ne sont pas satisfaites sont très rares, et quand cela arrive, c’est que les conditions de travail et les salaires ne sont pas acceptables", témoignent des conseillers ANPE d’Île-de-France. Christophe Moreau cite des exemples d’employeurs cherchant une femme de ménage à trois heures par semaine, ou un serveur ayant de l’expérience, mais au SMIC pour 200 heures par mois. "Les offres non pourvues concernent surtout les métiers dits en tension, qui veulent de la main-d’oeuvre qualifiée mais en la payant au SMIC, pour un travail très pénible", renchérit un conseiller syndiqué à la CGT-ANPE. "Cela concerne le bâtiment, la restauration, l’agriculture, les garages. Comment un patron peut-il demander un maçon qualifié pour 1.000 euros par mois alors que l’emploi en mérite 1.500 ou 1.800 ?" Ces secteurs sont aussi ceux où le travail au noir est important. "Tant que les employeurs ne changeront pas leur façon de faire, ils auront des offres non pourvues", explique une conseillère de région parisienne, qui cite le cas d’offres d’emploi de coiffeuses : "On proposait des créneaux horaires ridicules, donc des salaires très faibles. Nous avions des coiffeuses dans notre fichier, mais elles refusaient et c’était normal, car elles gagnaient mieux leur vie en travaillant au noir. Notre rôle n’est pas de les forcer."

La pression exercée sur les chômeurs pour les orienter vers ces métiers dits en tension sert à "casser les qualifications et les salaires", explique Christophe Moreau. Désormais, les ASSEDIC financent uniquement des formations sur ces secteurs. "Un cuisinier qui a un CAP refuse une offre au SMIC, et l’employeur ne veut pas payer plus. Alors l’ASSEDIC monte une formation de quatre mois pour pourvoir cet emploi. Tout concourt à réduire le coût du travail."

Fanny Doumayrou

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• Pénurie d’emplois dans le bâtiment

Quand le BTP offre 80.000 postes, il peine à recruter 20.000 personnes.
Les fédérations patronales de la construction font état de 80.000 embauches nécessaires par an. Elles n’ont pu en recruter, en 2004, que le quart. Un peu moins de 100.000 apprentis sont formés dans les centres de formation du BTP, mais plus de la moitié n’entrent pas dans la profession ou en sortent dans les deux ans qui suivent la fin de leur apprentissage. Problème de communication, comme l’assurent les employeurs, qui multiplient les campagnes de pub ? À la fédération CGT, Éric Aubin avance d’autres explications. "C’est une explosion de la précarité : nous avons 133.000 intérimaires, contre 61.000 en 1995. Sans compter les CDD et contrats dits à durée de chantier, qui peuvent aller de quelques jours à six mois. Les salaires pratiqués dans la profession sont parmi les plus bas de tous les secteurs : un ouvrier hautement qualifié gagne environ 1.250 à 1.300 euros net. On a donc des jeunes qui préfèrent se diriger vers la métallurgie, la chimie, EDF..."
Côté conditions de travail, la construction se distingue en affichant des taux de gravité et de fréquence d’accidents 2,5 à 3 fois supérieurs à la moyenne des branches. Autre signe de la pénibilité, passés 50 ans, près de quatre salariés sur dix du BTP ne travaillent plus, mais relèvent de l’assurance-chômage, de l’invalidité, la longue maladie ou sont en accident du travail. Contrairement à d’autres branches, les gars du bâtiment ne bénéficient d’aucun système donnant droit à un départ anticipé en retraite à ceux qui sont usés prématurément par le boulot. Comment s’étonner, dès lors, du déficit d’attractivité de ce secteur ?

Y. H.

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• La fausse vitalité de l’hôtellerie et de la restauration

80.000 emplois vacants, mais la pénibilité et une grille salariale non revalorisés depuis 1997 poussent les salariés à ne pas vouloir faire carrière.
L’Union patronale des métiers et des industries de l’hôtellerie, en charge aussi de la restauration traditionnelle, s’enorgueillit de comptabiliser 300.000 offres d’emploi dans ces secteurs. Un nombre "largement supérieur à la moyenne nationale", selon l’Agence nationale pour l’emploi. Or, l’apparent dynamisme de ces métiers cache des réalités de travail moins enviables. "Occultant les besoins de qualification, le gouvernement pousse les chômeurs à occuper les soi-disant 80.000 emplois vacants dans l’hôtellerie et la restauration, mais, préférant fermer les yeux, il ne se pose jamais la question de savoir pourquoi il y a tant de vacations", constate Ange Romiti (CGT). "En plus des inconvénients de travail liés aux métiers (travail les week-ends et jours fériés, morcellement des journées, sollicitation physique - NDLR), la référence salariale dans la convention collective n’a pas été revalorisée depuis 1997", continue le responsable fédéral du syndicat. En clair, à part pour la direction et les cadres, la grille de salaires est en dessous du SMIC, et encore en francs ! Une rémunération d’autant plus réduite que, selon une étude de l’INSEE de 2003, un salarié de la restauration sur deux travaille à temps partiel. Enfin, également à cause d’une demande de main-d’oeuvre ponctuelle ou saisonnière, la rotation du personnel est très forte. Sur les 800.000 salariés de l’hôtellerie et de la restauration, plus de la moitié travaillent depuis moins de six mois chez le même employeur. Ce qui, analyse la CFDT, "constitue un frein pour l’action syndicale car les gens considèrent ces métiers comme des jobs en attendant mieux".

Christelle Chabaud
Yves
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Chômeurs, précaires, on se moque de nous !

Message par Yves »

Ces articles de L'Huma confirment "l'impression" que nous avions au mois de mars dernier : "Chômeurs, on se moque de nous !"

À relire :

http://www.actuchomage.org/modules.php? ... le&sid=822

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