La collecte des ordures à Paris fait tanguer la gauche
Publié : 08 juil. 2008
Pour info, pour les Parisiens :
Certains élus socialistes se battent au coté des agents de la propreté de la Ville de Paris et des parisiens pour éviter la privatisation de ce service public local :
=====================================LE PARISIEN
La collecte des ordures fait tanguer la gauche
Tard hier soir les élus du Conseil ont bataillé sur un dossier brûlant : la réforme de la collecte des ordures. A la suite des difficultés rencontrées dans les IIIe et XIXe depuis quelques années, la Ville voulait confier le ramassage des poubelles de ces deux arrondissements, mais aussi desIXeet XVIe , à des entreprises privées. « Les agents municipaux, libérés du ramassage, pourront ainsi se concentrer sur le nettoyage », argumenteFrançois Dagnaud, l'adjoint (PS) en charge du dossier.
Bien que tous les élus plaident pour une amélioration de la propreté, la réforme proposée n'a pas réussi à mettre d'accord les élus de gauche. Et quatre mois à peine après les élections, la majorité municipale s'est divisée. Précipitation, manque de concertation, course au libéralisme... les critiques fusaient chez les Verts et les communistes. « La collecte mixte ne fonctionne pas dans les IXe et XVIe mais pourquoi ne pas plutôt faire le choix de municipaliser le service ? » s'étonne Ian Brossat, président du groupe PC au Conseil de Paris tandis que les Verts demandaient un report du projet.
Jusque dans les rangs socialistes le dossier a fait tanguer les troupes. Malgré les pressions, Alexis Corbière (XIIe ) et Danielle Simonet (XXe ) ont voté contre le projet. « A l'heure où le président Sarkozy développe le tout libéral, la mairie de Paris devrait donner l'exemple et défendre le service public », a plaidé Danielle Simonet (XXe ).
Dans les rangs de l'UMP, les élus étaient unanimes pour dénoncer « l'improvisation de Delanoë qui municipalise un service sous une mandature pour le privatiser sous une autre ». Les tergiversations ont néanmoins perduré jusqu'à la dernière minute (avec suspension de séance) pour se solder par... une abstention du groupe.
Malgré cette ambiance électrique, les socialistes devaient réussir à rassembler une majorité pour faire adopter le projet légèrement modifié (voir ci-dessous). Les organisations syndicales, en dépit de l'échec de leur manifestation hier matin, continuent de s'opposer au projet et organisent une assemblée générale jeudi.
Marie-Anne Gairaud
Le Parisien , mardi 08 juillet 2008
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Quelques concessions
Poursuite des discussions sur les IXe et XVIe . Ces deux arrondissements devaient retomber sous l'escarcelle d'entreprises privées. Finalement, face à la levée de boucliers des éboueurs, l'adjoint chargé du dossier a décidé de laisser les discussions ouvertes.
Des contrats moins longs. Initialement, les nouveaux contrats de ramassage des ordures étaient prévus pour sept ans. Ils sont ramenés à 5 ans.
Une meilleure concertation. Des discussions locales entre agents et maires d'arrondissement sur l'amélioration de la propreté vont s'engager dès jeudi. De même, des critères seront définis avec les élus pour cibler les quartiers où les effectifs doivent être renforcés.
M.-A.G.
Le Parisien , mardi 08 juillet 2008
Certains élus socialistes se battent au coté des agents de la propreté de la Ville de Paris et des parisiens pour éviter la privatisation de ce service public local :
Privatisation de la collecte des déchets à Paris : Pourquoi nous avons voté contre !
Alexis Corbière, Conseiller de Paris socialiste et Premier Adjoint à la Maire du 12ème arrondissement
Danielle Simonnet, Conseillère de Paris socialiste du 20ème arrondissement
Le Conseil de Paris qui s’est réuni le 7 juillet a adopté une délibération portant sur la privatisation de la collecte des déchets dans les 3ème, 9ème, 16ème, et 19ème arrondissements. Le groupe des élus socialistes auquel nous appartenons a voté pour cette délibération. Mais pour notre part, malgré plusieurs débats au sein du groupe socialiste que nous avons impulsés, nous n’étions toujours pas convaincus du bien fondé de cette délibération, et nous avons décidé de voter contre, comme les élus communistes et Verts.
Pourquoi ?
Désormais à Paris, ce sont seulement 8 arrondissements qui restent sous le mode de régie directe tandis que des entreprises privées auront la responsabilité de cette collecte sur 12 arrondissements. Ainsi, c’est plus de 60% du tonnage des collectes d’ordures ménagères qui passent au secteur privé.
La collecte des déchets est, selon nous, une activité qui doit rester dans le service public car elle relève de l’intérêt général.
D’abord, si nous voulons responsabiliser les parisiennes et les parisiens au respect de la propreté des rues, aux exigences environnementales du tri sélectif, il faut affirmer notre attachement à cette mission de service public de la propreté et de la collecte des déchets. Quiconque jette un déchet doit avoir conscience que c’est bien une autre personne qui ramasse et que le traitement des ordures ménagères représente un coût pour la société qu’il
faut apprendre à réduire. La transmission de l’éthique républicaine dans la responsabilisation individuelle des citoyennes et des citoyens est pour nous liée à la responsabilisation des collectivités elles-mêmes incarnée par le
service public.
Du coup, si nous ne nions pas les dysfonctionnements actuels, nous pensons qu’une remunicipalisation progressive liée à une refonte de l’organisation du travail en tenant compte des besoins en terme d’effectifs doit être impulsée dans le cadre d’une réelle concertation avec les organisations syndicales, associant les maires d’arrondissement, et plus largement engageant un débat démocratique et participatif avec les parisiennes et les parisiens.
Nous approuvons le choix de faire de la propreté des rues une priorité de notre mandature, mais ce choix ne doit pas être présenté comme contradictoire avec le maintien et la généralisation progressive de la collecte en régie directe.
Partout en France des expériences nombreuses ont démontrés que le recours au privé augmentait les coûts pour une qualité de services rendus moins efficace et un statut des salariés plus précaire. Ce dernier point
nous préoccupe fortement. Nous ne sommes pas indifférent au statut professionnel de ceux qui effectueront ce métier souvent ingrat et peu valorisé, mais pourtant indispensable à nos sociétés de consommation où les déchets s’accumulent de façon vertigineuse. C’est à l’honneur de Paris de tout faire pour que les travailleurs qui effectuent ces tâches ne subissent pas la précarité. A la différence de ceux du privé, les personnels de la ville sont polyvalents, ils alternent généralement les tâches (rippers, nettoiement, etc.) ce qui permet de modérer la pénibilité du travail. Ils bénéficient aujourd’hui d’une retraite à 55 ans. Avec la délibération adoptée, les personnels voient une menace pour leur statut, que ce soit en terme de rémunération, de déroulement de carrière, de prise en compte de la pénibilité dans l’âge de départ à la retraite, d’accompagnement des
reconversions… Si avantage comparatif il devait y avoir dans la privatisation, elle réside bien dans les économies réalisées par la remise en cause de ce statut.
Enfin, nous regrettons cette décision prise dans l’urgence qui ne faisait pas partie de nos engagements de campagne qui exprimaient un fort attachement aux services publics de la Ville et à une volonté de
remunicipalisation, notamment pour l’eau, ce dont nous nous félicitons.
Nous regrettons que la concertation et le dialogue social avec les organisations syndicales n’aient pas eu lieu en amont de la décision. Pourtant, dès septembre 2001, un protocole d’accord signé entre les syndicats et les représentants de l’exécutif municipal mentionnait à son article 20 : « La municipalité s’engage à ne pas transférer
au secteur privé ou associatif une mission effectuée par les services municipaux si les nouvelles modalités de gestion, à prestation égale, pouvaient s’avérer plus coûteuses pour les usagers. Avant toute décision de transfert ou d’abandon de mission réalisée par le service public municipal, une étude intégrant les conséquences pour les personnels mais aussi les implications pour l’usager en termes de coût et de qualité de la prestation est soumise 2 au CTP concerné (…) ».
Cet engagement n’a pas été respecté. Nous le regrettons vivement. Pour notre part, nous saluons la mobilisation des fonctionnaires et des organisations syndicales.
Enfin, nous regrettons que notre proposition de report de la délibération à un Conseil de Paris ultérieur, demandé également par les organisations syndicales et défendu en séance par les élus communistes et Verts,
n’ait pas été retenue par la réunion du groupe socialiste du jeudi 3 avril 2008. Ce report aurait permis de préserver l’unité de notre majorité et de reprendre le dialogue social.
Alors que le Président de la République engage depuis un an sa révolution libérale et que le gouvernement s’attaque aux services publics et au statut des fonctionnaires, le rôle de la gauche, là où elle est en responsabilité
est pour nous de défendre et d’étendre le service public et de faire progresser les conditions de travail, les rémunérations et le statut des fonctionnaires.
Voilà pourquoi, élu-e-s socialistes parisiens depuis 2001, c’est en conscience et non sans regret, que nous avons voté contre, pour la première fois, une délibération présentée par l’exécutif municipal et soutenue par notre groupe.