« Ramener la durée moyenne du chômage à trois mois »
Publié : 07 déc. 2007
JEAN-LUC BÉRARD - LE DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L'UNEDIC
« Ramener la durée moyenne du chômage à trois mois »
Jean-Luc Bérard.
Jean-Luc Bérard a occupé la fonction de DRH de l'Unedic de 1992 à 2002. Agé de quarante-sept ans, il était DRH de Snecma Moteurs jusqu'à sa nomination à la tête de l'assurance-chômage, en mars dernier. Il a débuté sa carrière en tant que juriste, au sein du Groupe des industries métallurgiques d'Ile-de-France.
Quel impact la fusion des Asse- dic et de l'ANPE aura-t-elle sur le niveau de chômage ?
L'évolution du chômage ne dépend pas d'un seul paramètre. Mais cette réforme est une opportunité qui va permettre de réduire la durée nécessaire aux chômeurs pour retrouver un emploi. En France, il faut neuf mois, en moyenne, aux chômeurs indemnisés pour revenir sur le marché du travail. Au Danemark ou au Royaume-Uni, cette durée a été ramenée à près de trois mois grâce à la réforme des services de l'emploi. La fusion de l'ANPE et des Assedic doit nous permettre de parvenir, à terme, à cette performance.
Les salariés des Assedic ont été plus de 60 % à faire grève, la semaine dernière, contre cette fusion. Le projet est donc loin d'être accepté sur le terrain...
C'est beaucoup moins un refus de la fusion que l'expression d'inquiétudes normales. Mais je tiens à rassurer les agents des Assedic : leur convention collective va subsister pour une période transitoire, le temps de négocier un nouvel accord. Dans ces conditions, les organisations syndicales n'auront aucun intérêt à approuver une convention collective qui soit moins favorable que la précédente.
Quelle sera la logique d'implantation du nouvel organisme ? Le gouvernement va-t-il privilégier les sites de l'ANPE ou des Assedic ?
L'ANPE dispose de 900 sites d'accueil. Les Assedic en ont 650. L'objectif probable est de parvenir à terme à environ 1.200 agences communes. La logique actuelle d'implantation de l'ANPE et des Assedic est pratiquement symétrique. Le fait que l'Unedic soit majoritairement propriétaire de ses agences, alors que l'ANPE en est le plus souvent locataire, va certainement jouer. L'opportunité de la fusion va, en tout cas, permettre de rationaliser ce réseau pour simplifier les démarches des demandeurs d'emploi.
Cela a-t-il un sens de fusionner l'ANPE et les Assedic, sans y associer les autres acteurs de l'emploi (Afpa, missions locales) ?
C'est une première étape. A terme, je pense nécessaire que tous ces acteurs soient effectivement associés au nouvel organisme.
Chaque agent est-il appelé à exercer le suivi et l'indemnisation des chômeurs, quel que soit le bassin d'emploi et quelles que soient ses qualifications ?
Tous les agents ne sont pas faits pour être polyvalents. Je pense donc préférable que ceux qui le souhaitent puissent exercer leur activité d'origine sans être contraints de faire un nouveau métier s'ils n'en ont pas les compétences. La polyvalence n'est pas simple : à titre d'exemple, il faudra, au minimum, trois mois de formation pour qu'un agent des Assedic, chargé de l'indemnisation des chômeurs, puisse assurer correctement leur accompagnement.
Pouvez-vous tirer un bilan, ne serait-ce que provisoire, de l'expérimentation du placement des chômeurs par des opérateurs privés ?
Le bilan officiel sera tiré au début de l'année 2008. Ce que nous observons, c'est que la durée d'indemnisation du chômage est réduite d'environ quatre mois, en moyenne, grâce à l'action des opérateurs privés.
Souhaitez-vous jouer un rôle au sein du nouvel organisme ? Le nom de l'organisme fusionné est-il fixé ?
La première question n'est pas d'actualité. Aujourd'hui, je fais en sorte de mener, au mieux, cette opération de fusion, en tant que directeur général de l'Unedic. Le nom du nouvel organisme n'est pas décidé non plus. Personnellement, j'aime bien la dénomination de « France Emploi », mais elle ne fait pas consensus. Il faut, dans tous les cas, un nom qui traduise pleinement le dynamisme de la nouvelle maison.
PROPOS RECUEILLIS PAR LUCIE ROBEQUAIN
Source : Les Echos.frCoup d'envoi officiel à la fusion des Assedic et de l'ANPE
Amendé par le Conseil d'Etat, le projet de fusion ANPE-Assedic doit être adopté ce matin en Conseil des ministres. Un dixième des cotisations Unedic, soit environ 2,7 milliards d'euros par an, sera attribué au financement du nouvel organisme.
En présentant le projet de fusion ANPE-Assedic, ce matin en Conseil des ministres, Christine Lagarde a bien conscience que le plus dur reste à faire. La réforme a un seul et unique objectif : celui de faciliter les démarches des entreprises et des chômeurs qui disposeront « en tout point d'un réseau polyvalent assurant l'ensemble des prestations nécessaires au recrutement et au placement ». Mais il reste à convaincre les acteurs locaux de jouer le jeu.
A sa sortie de l'Elysée, la ministre de l'Economie se rendra à Issy-les-Moulineaux pour entamer le « service après-vente » et vanter le mérite des guichets uniques déjà mis en place. Elle enverra un courrier à chacun des agents des Assedic et de l'ANPE, dans la journée, pour répondre à leurs inquiétudes sur l'emploi et leurs salaires. « La nouvelle convention collective empruntera au meilleur des deux organismes fusionnés », a-t-elle assuré aux syndicats, le 19 novembre, en promettant qu'il n'y « aurait pas de réduction d'effectifs », pas plus que de « mobilité géographique imposée ». Le projet continue de provoquer des tensions au niveau local. Après un mouvement de grèves suivi dans les Assedic, le 27 novembre, c'est au tour des associations de chômeurs (MNCP, AC !, Apeis, CGT-chômeurs) d'organiser une manifestation, samedi, pour faire barrage à la fusion.
Un statut clairement défini
Le projet a pourtant été largement amendé pour satisfaire les organisations syndicales en charge de l'assurance-chômage. Au rang des dernières concessions figure la possibilité, pour les partenaires sociaux, de décider du niveau de cotisations Unedic attribué au financement du nouvel organisme (en dehors des 30 milliards d'euros d'allocations versés aux chômeurs). A l'origine, celui-ci devait être fixé par décret. Le niveau plancher s'établira à 10 % des cotisations dans un premier temps, ce qui correspond à environ 2,7 milliards par an. L'Etat apportera une contribution équivalente. Les ministères du Budget et de l'Emploi ont perdu, quant à eux, la possibilité d'exercer un droit d'opposition, y compris en matière financière. Rien ne pourra donc être décidé sans l'aval des partenaires sociaux, qui disposent de la majorité au sein du nouvel organisme.
Le Conseil d'Etat a également imposé quelques modifications : conformément aux règles de l'Organisation internationale du travail, il demande que soit clairement défini le statut du nouvel organisme. Comme la Banque de France, il devrait s'agir d'un établissement chargé d'une mission de service public mais dont les salariés seront soumis au droit du travail (privé). Le projet de loi sera soumis le 8 janvier aux députés, pour un vote définitif au cours du premier trimestre. « Avec le vote de la loi, les choses ne feront que commencer », insiste Christine Lagarde.