Revenu universel
Publié : 08 févr. 2011
D'abord, une bonne nouvelle. Vendredi, nous allons, Pili et moi, rencontrer Bernard Friot pour réaliser une interview filmée sur le "salaire de vie". Ensuite, le mois prochain, nous renouvelons l'opération avec Jacques Berthillier et Yoland Bresson, de l'Association pour l'Instauration d'un Revenu d'Existence (AIRE), afin d'en comparer les formes. Car si nous sommes d'accord sur le fond — ce revenu inconditionnel et individuel, déconnecté du travail, est une idée d'avenir —, c'est sur sa conception et son financement que les avis divergent.
Ensuite, je vais vous demander de vous prêter à un petit brainstorming...
Revenu de base : financement ?
Vous connaissez certainement ce film-essai suisse réalisé par Daniel Häni et Enno Schmidt, consacré au Revenu de Base sous son «modèle bâlois» :
http://www.dailymotion.com/video/xgxhto ... -base_news
On peut le voir aussi en 8 parties sur Youtube, qui s'enchaînent automatiquement à la lecture (c'est bien pratique) :
http://www.youtube.com/view_play_list?p ... A83017651E
Vous en connaissez le début, qui explique et valorise le concept de manière tout à fait convaincante. On se marre quand, à la question «Et si vous disposiez d'un revenu de base suffisant, iriez-vous quand même travailler ?», 60% répondent que oui, 30% "oui, mais…" et 10% carrément non, alors qu'à la question «Et si les gens touchaient un revenu de base leur permettant de vivre sans travailler, pensez-vous qu'ils continueraient à aller bosser ?», 90% des sondés soupçonnent les autres d'être des fainéants qui préfèreraient rester chez eux.
Mais c'est à partir de la 58e minute (fin de la partie 5 sur Youtube) que son mode de financement est abordé, et c'est là que j'aimerais que vous le regardiez attentivement...
Le principe, c'est déconnecter le travail du revenu.
Pour ce faire, il est proposé de remettre à plat/simplifier toute la fiscalité afin d'augmenter considérablement la part de l'Etat dans le PIB afin que celui-ci joue son rôle d'intermédiaire, et de fusionner les prélèvements qui touchent le travail : l'impôt sur le revenu (qui n'est, d'ailleurs, plus vraiment progressif) et les cotisations salariales. En les reportant sur la valeur ajoutée, serait ainsi créé un impôt unique sur la consommation. (On pense à la fameuse "TVA sociale"…
)
Avantages : plus de "travail au noir", moins de lourdeurs administratives, les machines seraient imposées autant que le travail humain, plus besoin de conseillers fiscaux, etc...
La démonstration est habile, mais il y a quelques petites choses qui me gênent...
Certes, elle est adaptée à la Suisse. Mais qu'en serait-il en France ?
Chez nous, la TVA (19,6%) représente 51% des recettes fiscales de l'Etat soit 131 milliards d'euros. L'impôt sur le revenu compte pour 20% (52 milliards), l'impôt sur les sociétés pour 17% (44 milliards). Le solde d'environ 11%, soit 28 milliards, est dégagé par des taxes diverses (dont Tipp). SOURCE
Quant au niveau des cotisations patronales, il s'élève à 41% du salaire brut hors exonérations tandis que celui des cotisations salariales s'élève à 23% en moyenne. Total des recettes pour l'Urssaf et l'Unedic : 304 milliards en 2008. SOURCE (p.4)
Voilà, en gros, pour la manne financière actuelle.
Revenons à notre «modèle bâlois» :
• D'abord, on ne sait pas ce que devient l'impôt sur les sociétés. Sera-t-il maintenu afin de ne pas alourdir ce nouvel impôt fusionné ?
• Egalement, si le revenu de base se substitue à l'Unedic (chômage) et aux branches "famille" (allocations familiales, logement, RSA, AAH…) et "vieillesse" (pensions de retraite) de la Sécu, la part des branches "santé" et "accidents du travail" n'est pas évoquée.
• J'ai des doutes sur la réelle progressivité de ce nouvel impôt, générée par l'aspect restitutif du revenu de base. J'ai surtout des doutes sur le "reste à vivre" réel de ceux qui auront choisi de ne pas travailler ou qui ne peuvent pas travailler, sachant qu'il doit permettre de vivre hors autres revenus de transfert (aides sociales, pensions de retraite, etc…). Car sur un RB de 1.000 €, la charge fiscale de ce nouvel impôt s'élèverait déjà à 50%. Il faut donc que son montant soit suffisamment élevé pour que ses bénéficiaires puissent se loger, manger, se vêtir, se soigner, se déplacer, etc… et participer fiscalement au système.
• J'ai également des doutes sur le rééquilibrage salarial que le revenu de base devrait enclencher. Dans quelle mesure les employeurs, exemptés de cotisations sociales, n'en profiteraient pas, au contraire, pour réduire les salaires désormais considérés comme revenus d'appoint ?
Qu'en pensez-vous ?
Merci de dissiper mes doutes s'il y a lieu. J'attends vos réflexions avec impatience...
Ensuite, je vais vous demander de vous prêter à un petit brainstorming...
Revenu de base : financement ?
Vous connaissez certainement ce film-essai suisse réalisé par Daniel Häni et Enno Schmidt, consacré au Revenu de Base sous son «modèle bâlois» :
http://www.dailymotion.com/video/xgxhto ... -base_news
On peut le voir aussi en 8 parties sur Youtube, qui s'enchaînent automatiquement à la lecture (c'est bien pratique) :
http://www.youtube.com/view_play_list?p ... A83017651E
Vous en connaissez le début, qui explique et valorise le concept de manière tout à fait convaincante. On se marre quand, à la question «Et si vous disposiez d'un revenu de base suffisant, iriez-vous quand même travailler ?», 60% répondent que oui, 30% "oui, mais…" et 10% carrément non, alors qu'à la question «Et si les gens touchaient un revenu de base leur permettant de vivre sans travailler, pensez-vous qu'ils continueraient à aller bosser ?», 90% des sondés soupçonnent les autres d'être des fainéants qui préfèreraient rester chez eux.
Mais c'est à partir de la 58e minute (fin de la partie 5 sur Youtube) que son mode de financement est abordé, et c'est là que j'aimerais que vous le regardiez attentivement...
Le principe, c'est déconnecter le travail du revenu.
Pour ce faire, il est proposé de remettre à plat/simplifier toute la fiscalité afin d'augmenter considérablement la part de l'Etat dans le PIB afin que celui-ci joue son rôle d'intermédiaire, et de fusionner les prélèvements qui touchent le travail : l'impôt sur le revenu (qui n'est, d'ailleurs, plus vraiment progressif) et les cotisations salariales. En les reportant sur la valeur ajoutée, serait ainsi créé un impôt unique sur la consommation. (On pense à la fameuse "TVA sociale"…

Avantages : plus de "travail au noir", moins de lourdeurs administratives, les machines seraient imposées autant que le travail humain, plus besoin de conseillers fiscaux, etc...
La démonstration est habile, mais il y a quelques petites choses qui me gênent...

Certes, elle est adaptée à la Suisse. Mais qu'en serait-il en France ?
Chez nous, la TVA (19,6%) représente 51% des recettes fiscales de l'Etat soit 131 milliards d'euros. L'impôt sur le revenu compte pour 20% (52 milliards), l'impôt sur les sociétés pour 17% (44 milliards). Le solde d'environ 11%, soit 28 milliards, est dégagé par des taxes diverses (dont Tipp). SOURCE
Quant au niveau des cotisations patronales, il s'élève à 41% du salaire brut hors exonérations tandis que celui des cotisations salariales s'élève à 23% en moyenne. Total des recettes pour l'Urssaf et l'Unedic : 304 milliards en 2008. SOURCE (p.4)
Voilà, en gros, pour la manne financière actuelle.
Revenons à notre «modèle bâlois» :
• D'abord, on ne sait pas ce que devient l'impôt sur les sociétés. Sera-t-il maintenu afin de ne pas alourdir ce nouvel impôt fusionné ?
• Egalement, si le revenu de base se substitue à l'Unedic (chômage) et aux branches "famille" (allocations familiales, logement, RSA, AAH…) et "vieillesse" (pensions de retraite) de la Sécu, la part des branches "santé" et "accidents du travail" n'est pas évoquée.
• J'ai des doutes sur la réelle progressivité de ce nouvel impôt, générée par l'aspect restitutif du revenu de base. J'ai surtout des doutes sur le "reste à vivre" réel de ceux qui auront choisi de ne pas travailler ou qui ne peuvent pas travailler, sachant qu'il doit permettre de vivre hors autres revenus de transfert (aides sociales, pensions de retraite, etc…). Car sur un RB de 1.000 €, la charge fiscale de ce nouvel impôt s'élèverait déjà à 50%. Il faut donc que son montant soit suffisamment élevé pour que ses bénéficiaires puissent se loger, manger, se vêtir, se soigner, se déplacer, etc… et participer fiscalement au système.
• J'ai également des doutes sur le rééquilibrage salarial que le revenu de base devrait enclencher. Dans quelle mesure les employeurs, exemptés de cotisations sociales, n'en profiteraient pas, au contraire, pour réduire les salaires désormais considérés comme revenus d'appoint ?
Qu'en pensez-vous ?
Merci de dissiper mes doutes s'il y a lieu. J'attends vos réflexions avec impatience...
