Les salarié(e)s résigné(e)s ? Pas sûr
Publié : 20 août 2011
Après lecture de ce qui suit, les apparatchiks syndicaux ne pourront plus dire que »la base n’est pas prête »
Elle est bien faite la loi, non ?
Pour ceux qui le désirent, je peux leur adresser la liste des grèves du 01/02 au 20/06.
NAO = Négociation Annuelle Obligatoire. Petite précision : si la loi pose aux employeurs une obligation de négocier il n’y a pas obligation de conclure des accords. Si les négociations ont été menées de bonne foi sans parvenir à un accord, l’obligation annuelle de négocier est respectée.France: un vaste mouvement de grèves invisibles
La statistique ci-jointe recense 4 mois et demi de grèves en France de début février à mi juin. Ce recensement a été établi à partir des informations parues dans la presse. Les renseignements publiés par les journaux sont partiels. Ils ne donnent que très rarement la durée de la grève, la participation et surtout ses résultats. Malgré cela, les chiffres obtenus, 777 grèves en quatre mois et demi, sont suffisamment significatifs pour pouvoir dire que nous assistons à un large mouvement de grève. Bien sûr, il ne s'agit pas d'un mouvement au sens où ses acteurs ont conscience d'agir ensemble pour un même but. Il faudrait pour cela que ce mouvement soit visible et perceptible, ce qui n'est pas le cas. Il ne s'agit probablement pas non plus d'un mouvement susceptible de généralisation. Par contre l'ampleur des grèves au même moment, sur des préoccupations communes, dénote aujourd'hui d'un état d'esprit de protestation commun à la classe ouvrière. Et cela d'autant plus que les journaux sont loin de faire état de tous les mouvements et encore moins des débrayages de durée inférieure à un jour. Combien y a-t-il eu de grèves exactement dans cette période ? On ne peut pas le savoir. Mais on doit pouvoir multiplier les chiffres obtenus par deux, trois ou même quatre sans risquer de beaucoup se tromper. D'autant plus encore que ne sont pas comptées dans cette statistique les multiples grèves d'un même groupe; par exemple pour Carrefour, on ne compte qu'une grève, alors que de très nombreux centres commerciaux de ce groupe ont été touchés.
Pour autant qu'on puisse se fier aux journaux, le nombre de grèves semble augmenter puisqu'on en comptait 96 en février, 143 en mars, 154 en avril, 231 en mai et 153 pour les trois premières semaines de juin.
Près de 40% des mouvements portent sur les salaires. Cette proportion se maintient chaque mois, ce qui dénote une augmentation relative de cette particularité, parce que ces grèves sont le plus souvent liées aux NAO et que le nombre de ces négociations diminue au fur et à mesure qu'on avance dans le temps. On remarque justement que des négociations s'ouvrent à nouveau sur le sujet, alors que les NAO ont déjà été tenues.
La plupart des grèves sur les salaires semblent toucher des secteurs à bas salaires, aux effectifs peu nombreux, proches du Smic, avec des revendications assez modestes autour de 3% ou 50 euros, parfois moins. Ce sont les secteurs du commerce, des transports par bus ou du nettoyage qui sont le plus significativement en mouvement. On note souvent la revendication du 13ème mois et l'idée du partage des bénéfices ( peut-être induit par la promesse de la prime de Sarkozy). On peut se dire qu'avec la hausse du Smic début juillet, bien des bas salaires seront à nouveau rattrapés par le Smic, ce qui peut donner un second souffle et une simultanéité plus perceptible à cette contestation en septembre.
La durée des grèves, quand elle est donnée, semble le plus souvent assez courte, voire très courte. Associé à la faible augmentation exigée, cela semble dénoter que les grévistes protestent plus qu'ils ne revendiquent, comme s'ils tenaient plus à dire un ras le bol général qu'à se battre pour une revendication précise. Un peu comme si les grévistes avaient conscience de la difficulté de la tâche, bien conscients que seuls et sans mouvement d'ampleur qu'aucune organisation syndicale ne veut organiser, ils ne peuvent pas grand chose, sinon protester. Par contre, s'il y a un nombre important de mouvements, les journées d'action nationales organisées par les syndicats sont relativement peu suivies. Comme si les salariés disaient là, comme en Espagne ou en Grèce, le peu de confiance qu'ils ont dans ces organisations pour mener ces combats jusqu'au bout. Enfin, toujours dans ce domaine des salaires, il semble que les grévistes qui obtiennent satisfaction soient rares, la plupart se contentant de très peu, mais sans que les grévistes ne soient pas spécialement démoralisés: un peu comme si ce n'étaient que des préambules ou des avertissements.
Une deuxième chose notable, c'est le nombre considérable de grèves dans les écoles contre les fermetures de classes, avec la participation des parents d'élèves, ce qui pourrait prendre un caractère plus général et visible au moment de la rentrée. Ce que pressent peut-être Sarkozy en annonçant le gel des fermetures des classes à la rentrée 2012 ( même s'il déplace le problème sur les collèges, puisqu'il maintient la baisse des effectifs globaux).Nombre considérable de grèves également à la Poste, surtout chez les facteurs, sur les conditions de travail et l'emploi, avec des grèves qui sont là souvent très longues. Enfin un nombre important aussi de grèves pour les conditions de travail et l'emploi dans les hôpitaux publics.
Pour le moment, ce mouvement tout à la fois synchrone et émietté, ne peut trouver de visibilité et, peut-être, à partir de là, un développement différent, que si les principales organisations politiques et syndicales, avaient la volonté de lui donner cette conscience de lui-même. Il n'y a pas à s'étonner qu'elles ne le veuillent pas alors qu'elles mettent tous leurs efforts dans les élections présidentielles. Quel décalage !
Cela aiderait pourtant chaque travailleur à faire face à la propagande patronale et gouvernementale, à comprendre ce qui se passe, à se sentir moins seul à partir de ce qu'il fait, ressent ou pense, à être plus lié aux luttes de Grèce, d'Espagne ou aux révolutions arabes et par là, peut-être, à passer à une autre étape de conscience. Cela donnerait aussi aux organisations les outils indispensables pour mesurer l'état d'esprit du monde du travail et à partir de là, leur permettre d'élaborer une politique. Cela permettrait enfin à chaque militant, d'être mieux armé sur ce qui se passe en cas de grève sur son lieu de travail.
Jacques Chastaing
http://www.ccr4.org/France-un-vaste-mouvement-de
Elle est bien faite la loi, non ?
Pour ceux qui le désirent, je peux leur adresser la liste des grèves du 01/02 au 20/06.