Sarkozy et le plan des néocons
Publié : 12 déc. 2006
La mondialisation de la « tolérance zéro ».
Ce texte est extrait pour majeure partie du livre "Les Prisons de la misère" du sociologue Loïc Wacquant (Paris, Éditions Liber-Raisons d’agir, 1999).
Extraits :
Il faut dresser cette jeunesse rebelle qui ne veut plier l'échine.
Mais pas qu'eux, on peut aussi observer la criminalisation des conflits sociaux comme lors du CPE ou des faucheurs de maïs ogm.
On peut aussi s'étonner des multiples plaintes de nos dirigeants dès qu'un journaliste nous fait des révélations dérangeantes comme Denis Robert ou cette journaliste de l'AFP, interdite d'exercer parce qu'elle avait relaté les évènements de Mureaux.
Il faut dresser tout ce petit monde qui ose se mettre en travers du chemin.
Sarkozy exige plus de comparutions immédiates, plus de jeunes en prison et n'hésite pas à s'en prendre aux juges.
En parcourant ce texte de 1999, j'ai été saisie de constater que Sarkozy suivait point par point ce plan alors qu'il est au Ministère de l'Intérieur depuis 2002 avec un bref passage au Ministère de l'Economie, des Finances et de l'industrie en 2005 avant de reprendre l'Intérieur.
Les adeptes de cette rhétorique usent et re-usent odieusement de cette amalgame pour justifier les expulsions.
Ce texte est extrait pour majeure partie du livre "Les Prisons de la misère" du sociologue Loïc Wacquant (Paris, Éditions Liber-Raisons d’agir, 1999).
Extraits :
C'est exactement la politique qu'applique Sarkozy et particulièrement avec les jeunes des banlieues.Depuis le début des années 80, un réseau de think tanks néoconservateurs basés principalement sur la côte est des États-Unis mène une offensive concertée visant à saper la légitimité de l’État-providence et à lui substituer, dans les régions inférieures de l’espace social, un État-pénitence capable de « dresser » les fractions de la classe ouvrière rétives à la nouvelle discipline du salariat précaire et sous-payé, et de neutraliser ceux d’entre leurs membres qui s’avèrent par trop disruptifs.
C’est ainsi qu’après avoir mené campagne en faveur du démantèlement des programmes d’aide aux familles démunies (welfare) entamé par Ronald Reagan et parachevé par Bill Clinton, le Manhattan Institute, centre névralgique de la guerre intellectuelle à l’État social avec l’American Enterprise Institute et le Cato Institute, s’est employé à populariser une séries de mesures policières et judiciaires qui, en instaurant une véritable « chasse aux pauvres » dans la rue, reviennent à pénaliser la précarité résultant justement de la démission organisée de l’État sur le front économique et social.
Il faut dresser cette jeunesse rebelle qui ne veut plier l'échine.
Mais pas qu'eux, on peut aussi observer la criminalisation des conflits sociaux comme lors du CPE ou des faucheurs de maïs ogm.
On peut aussi s'étonner des multiples plaintes de nos dirigeants dès qu'un journaliste nous fait des révélations dérangeantes comme Denis Robert ou cette journaliste de l'AFP, interdite d'exercer parce qu'elle avait relaté les évènements de Mureaux.
Il faut dresser tout ce petit monde qui ose se mettre en travers du chemin.
Sarkozy exige plus de comparutions immédiates, plus de jeunes en prison et n'hésite pas à s'en prendre aux juges.
En parcourant ce texte de 1999, j'ai été saisie de constater que Sarkozy suivait point par point ce plan alors qu'il est au Ministère de l'Intérieur depuis 2002 avec un bref passage au Ministère de l'Economie, des Finances et de l'industrie en 2005 avant de reprendre l'Intérieur.
Le fameux nettoyage au karcher !la lutte contre la grande violence criminelle nécessite une répression sévère et tatillonne de la petite délinquance et des comportements incivils qui en seraient les signes avant-coureurs; l’impératif de « qualité de la vie », prétexte à une politique de nettoyage de classe des espaces publics dans les villes; et le slogan « la prison marche », bien fait pour justifier l’expansion exponentielle et indéfinie du système pénitentiaire dans lequel sont désormais entreposés les indésirables
Et je peux vous dire que ça marche pour tous ceux qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez.De New York, la doctrine de la « tolérance zéro », instrument de légitimation de la gestion policière et judiciaire de la pauvreté qui dérange — celle qui se voit, celle qui cause des incidents et des désagréments dans l’espace public et donc nourrit un sentiment diffus d’insécurité, voire simplement de gène tenace et d’incongruité — , va se propager à travers le globe à une vitesse foudroyante.
Et avec elle la rhétorique militaire de la « guerre » au crime et de la « reconquête » de l’espace public, qui assimile les délinquants (réels ou imaginaires), sans abris, mendiants et autres marginaux à des envahisseurs étrangers — ce qui facilite l’amalgame avec l’immigration, toujours payant électoralement dans les pays balayés par de forts courants xénophobes —, autrement dit à des éléments allogènes qu’il est impératif de purger du corps social.
Les adeptes de cette rhétorique usent et re-usent odieusement de cette amalgame pour justifier les expulsions.
Il faut bien trouver le moyen de nous faire accepter le marché du travail précaire.la ville de New York est devenu le laboratoire où s’invente un nouveau gouvernement de la misère qui marie la « main invisible » du marché du travail déqualifié et dérégulé au « poing de fer » d’un appareil policier et pénitentiaire omniprésent, intrusif et hypertrophique.