Je comprends que Leïla quitte le NPA. On s'est retrouvés à militer assez souvent aussi bien dans le collectif droits nouveaux qu'au sein du NPA.
Comme elle j'ai rejoint le NPA lors du processus de fondation.
Ce n'est qu'une question de divergences sur la stratégie électorale...
Non. Au départ, le NPA devait prendre le meilleur du mouvement social. Mais on a essayé de nous formater, de nous transformer en militant de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR). Par exemple, le domaine de la précarité a été pris de manière secondaire. Pour les anciens de la LCR, la révolution partira des usines, pas des précaires au chômage, en stages ou en CDD. Pourtant,
Personne n'a essayé de me formater, et je ne l'ai jamais été.
La suite est plus intéressante. C'est vrai qu'un certain nombre de militants de l'ex-LCR ont la croyance que la révolution partira uniquement des entreprises.
Il y a une explication à cette croyance même si cette explication doit être relativisée.
Le cadre d'une entreprise permet de structurer collectivement les gens qui y travaillent. Elle cite la révolution tunisienne et indique que le processus a démarré suite au suicide d'un sans-emploi pauvre mais elle oublie de dire que , sauf erreur, il y avait un syndicat de travailleurs qui a permis d'amplifier et de structurer la lutte. Mais par ailleurs, Il ne faut pas surestimer les collectifs de travailleurs dans les entreprises car ils sont souvent atomisés. C'est fini l'époque où tu avais une entreprise avec des centaines de gens qui travaillaient sur le même site dans quelques ateliers. Les salariés sont de plus en souvent isolés sur leur lieu de travail.
En outre, les précaires , les chômeurs sont assimilés au lupen-prolétariat (sous-prolétariat): ils sont vus par les militants révolutionnaires comme des gens peu fiables et qui pourraient se ranger du côté de la bourgeoisie en cas de révolution.
Mais surtout, je pense qu'un certain nombre de gens (même au sein de l'extrême gauche) ne comprennent pas ce qu'est devenu le "marché de l'emploi", ils n'arrivent pas à prendre en compte que beaucoup de salariés n'appartiennent plus au salariat mais à un sous-groupe qui devient de plus en nombreux: le précariat.
C'est la zone grise entre le groupe des salariés qui travaillent à plein-temps ou presque et le groupe de ceux qui n'ont pas de travail du tout.
Les patrons, aidés par le gouvernement mangent la "banane" par les deux bouts et il ne restera plus, à peu de choses près, qu'un seul groupe : le précariat.
Il faut bien reconnaître aussi que les précaires ne se bousculent pas (il est vrai que la précarité mobilise beaucoup d'énergie psychique) pour lutter aussi bien sur le plan politique que dans d'autres secteurs (associatifs, voire syndicaux)
Et je doute qu'il faille se reposer seulement sur des salariés à plein temps pour une prise de conscience de la situation et un travail syndical/associatif/politique sur le sujet.
«secrétaire nationale à l'abolition du précariat», sympa comme titre, mais les titres seuls ne vont rien changer.
A la question, "Ce n'est qu'une question de divergences sur la stratégie électorale", l'article lui fait répondre non.
Je pense qu'il faut comprendre que le non veut dire que
ce n'est pas seulement une question de divergences sur la stratégie électorale mais ca l'est tout de même aussi.
Par delà les questions de précarité il y a la question aussi importante qui est: quelle société voulons-nous vraiment et la réponse à cette question ne peut être donnée ni par les salariés seuls, ni par les sans emploi, ni par les précaires, c'est le problème de tous ces gens (le mien aussi) !