Une discrimination de plus?
Publié : 23 juin 2006
Source, edition du 23 juin 2006Mieux vaut bien se porter quand on fait partie des plus démunis. 41 % des médecins spécialistes et 39 % des dentistes refuseraient de prendre en charge les bénéficiaires
de la couverture maladie universelle (CMU). Tel est, en tout cas, le résultat d’une enquête menée par le Fonds CMU, selon la méthode “testing”. Elle consiste à se faire passer auprès des praticiens, au téléphone, pour un bénéficiaire de la
CMU ou un assuré ordinaire et tenter d’obtenir un rendez-vous. L’objectif étant clairement de démontrer s’il y a discrimination ou pas. Or, selon ce test, “les médecins ne respectent pas la loi CMU de 1999, qui garantit la gratuité
des soins aux personnes sans ressources, ni leur déontologie qui impose de soigner n’importe quel patient”, s’insurge Jean-François Chadelat, directeur du Fonds CMU. Si 1,6 %
seulement des généralistes de secteur 1 (ceux qui appliquent les tarifs de la Sécurité sociale) n’acceptent pas les patients les plus pauvres, le chiffre grimpe à 4,8 % pour leurs confrères de secteur 2, aux honoraires libres. La palme
des refus revient aux gynécologues et aux psychiatres,
avec des taux respectifs de 44 % et 50 %. Le Fonds CMU invoque le manque à gagner des praticiens pour expliquer ces comportements. Un patient CMU n’avance rien, et la Sécurité sociale ne rembourse pas les dépassements d’honoraires. “Faux”, rétorque Jean- Claude Michel, président de la Confédération nationale des syndicats dentaires, qui impute
ces pratiques aux “problèmes règlementaires et informatiques” imposés par les caisses d’assurance maladie. Il dénonce aussi les “incivilités” dont font preuve certains de ces patients, qui abusent des consultations. Les médecins
remettent en cause le principe de l’enquête, réalisée seulement sur six départements, qui, selon eux, ne reflète pas la réalité. Alerté, le ministre de la Santé, Xavier Bertrand, a
demandé des sanctions dès hier soir. L’Ordre des médecins a adressé un rappel à ses troupes. Plus de 4,8 millions de personnes bénéficiaient de la CMU en 2005. Il en coûte 1,4 milliard d’euros par an à la Sécu.