Un bon commercial de l'ANPE
Publié : 13 févr. 2006
Depuis quelques mois, nous sommes sans cesse en train d’évoquer la crise des jeunes dans les banlieues. Mais qui les premiers suscitent avant tout cette violence chez les jeunes ? Par cette lettre, je tenais à témoigner d’un vécu quotidien et des réflexions que j’ai pu en tirer.
Je viens d’avoir un entretien avec un agent de l’Anpe, vous savez les personnes qui sont sensées faire du social, mais qui hélas éprouvent souvent le malin plaisir à vous renvoyer votre propre situation de chômeur à la figure au cas où vous l’auriez oubliée depuis 5 minutes.
Et bien vous savez quoi ! Il m’a proposé au sujet de ma situation, un nouveau contrat, le contrat avenir, «nouvelles mesures du gouvernement» m’a t’il dit. Formidable je me suis dit, il a l’air vraiment plus convaincant que ses collègues, un vrai commercial, un vrai vendeur, quelle force de vente, quel réel contact humain.Le chômeur a t-il encore le droit à la parole dans ce pays ? Bien sur que non il est tellement stigmatisé dans l’opinion publique, il n’est plus crédible, entendu, comme cela les arrange bien !
Vous auriez du voir: Il était tellement fier de vendre sa camelotte, je crois même l’avoir bien flatté, hélas il en avait même oublié tout ce que je venais de lui dire. Il paraît même selon ses dires, qu’en acceptant ce nouveau contrat, les personnes dans ma situation se retouvent plus rapidement sur le marché du travail en acceptant de le signer. Même si à ce moment, il a un peu douté quelques secondes de ce qu’il me proposait commercialement, oui après tout ce n’est pas sa vie qui est en jeu. C’est beau le social d’aujourd’hui vous ne trouvez pas ?
Systématiquement, malgré ma bonne présentation et mes preuves de démarches, je suis rabaissé, interrogé, intimidé, culpabilisé de pas avoir trouvé un emploi dans les temps, d’être toujours au RMI ! Alors comment voulez-vous que les gens puissent s’en sortir, voire conserver le peu de dignité, de fierté qu’il leur reste et par la même recouvrer la confiance nécessaire pour retouver un emploi. Et après ils s’étonnent que les personnes en situation de chômage en deviennent plus violentes et irrespectueuses à leur égard.
Où sont les gardes fous avec ces gens là ? Oh, ils aiment bien que vous leur rendiez des comptes, rapportez des preuves de vos démarches car de toutes façons ils ne font pas confiance, tout comme nos dirigeants. Mais quand il s’agit à votre tour de leur demander des comptes, sur tout leur bla, bla, sur les multiples incohérences et l’inefficacité manifeste de leurs procédures collectives mises en place, la réponse est stéréotypée, peu honnête :
« Je fais ce qu’on me dire de faire «
Sous entendu, il ne faut surtout pas réfléchir, car si ces gens-là commencaient à réfléchir sérieusement, ils feraient certainement un peu plus attention à leur conduite, et aux conséquences de leurs actes, mais là voyez vous c’est trop difficile pour eux, car cela leur demande de faire un certain effort individuel. Non, pour eux le mieux est de suivre bêtement collectivement toutes les directives venant d’en haut, en fait je devrais plutôt dire d’en bas !
Le problème voyez-vous c’est qu’à partir du moment où je lui ai dit que je préférais avant tout suivre ma propre démarche personnelle et que je ne croyais plus dans les nouvelles mesures du gouvernement à travers sa modeste personne, alors là il est tombé des nues sur sa chaise, et il m’a bien fait comprendre qu’en plus d’être un chômeur attardé ma démarche n’était pas conventionnelle, et il m’a bien laissé sentir que ses propositions, hors de mon champ et de mes compétences seraient plus adéquates à ma situation. Vraiment du fourre-tout, de la vente forcée, et sans aucune réelle prise en considération du parcours professionnel de la personne.
De plus, ils ont la fâcheuse tendance à estimer à notre place ce qui est bon ou pas pour nous, comment par exemple améliorer son quotidien, sa situation matérielle. Accepter n’importe quoi, le précaire, comme l'intérim, eux ils s'en moquent bien car ce n'est pas leur propre équilibre qui est en jeu, accepter les contrats bidons et précaires mis en place, pour eux c’est normal, c’est mieux il paraît aussi pour l’homme, même s’il en perd peu à peu sa dignité, sa fierté.
Et par dessus-tout vous avez droit à ce regard désobligeant, voire vous devenez à leur yeux une chose dérangeante, une curiosité à juger, et marquer aussi de je ne sais quelle abréviation secrète derrière même le dos des personnes.
En fait voyez-vous dans leur abus de position, ces gens là ne supportent vraiment pas que vous puissiez leur répondre autre chose, avoir vos idées propres, vos propres contacts, vos propres démarches sans au préalable transiter obligatoirement par eux. C’est pourquoi m’a-t’il dit, je vous aurai dorénavant tous les mois sur le dos. Vous auriez du voir, à ce moment là, le malin plaisir qu’il a éprouvé dans ses yeux en me disant cela, j’en ai même eu froid dans le dos. Mais rassurez-vous m’a t’il dit dans notre agence on ne flique pas les gens comme dans d’autres agence…
«C’est pour votre bien que je fait cela et non pour autre chose»
Quelle prétention ! Et vous auriez du voir la façon dont il m’a raccompagné à la sortie pour à nouveau refaire son même numéro de vendeur, de commercial avec d’autres personnes ! Quel est le sens social de tout cela ? Mais où est elle la cohérence dans leur conduite ? Aimeriez-vous que l'on vous convoque de la sorte ? Que l'on vous interroge et traite systématiquement de la sorte ? Mais n'avez vous pas honte de vous mêler avec de telles personnes aussi irresponsables que bêtes ?
Pauvres demandeurs d’emploi qui auront à subir continuel rabaissement, ce même tourment moral, cette même intimidation, cette même vexation morale de la part de
gens sensés nous aider et nous soutenir, et qui hélas ne parviendront pas à l’exprimer ou à l’écrire pour en témoigner, pauvres gens.
Il est vrai que les élections approchent pour ce gouvernement, qu’il faut mettre alors les bouchées doubles, renflouer davantage les caisses, les dépenses de logement, de déplacement, ou encore de frais de bouche de nos élites. Mais pourquoi ce soudain empressement politique à vouloir mettre davantage la pression morale sur bon nombre d’agents ou de chômeurs ? Je trouve vraiment cela maladroit, et d’un total mépris envers ceux vivant une situation difficile. Pourquoi les tourmenter ? Pourquoi un tel acharnement ? Je fais le vœu que cette vaine gouvernance soit sévèrement sanctionnée en l’an 2007.
S’il vous plaît, si vous faîtes encore partie de ces personnes qui ont encore une petite parcelle d’humanité, rendez moi service: Cherchez avant tout à vous montrer plus humain à l’égard de tous ceux en réelle situation de détresse dans cette société. N’allez pas non plus leur faire subir de surcroît des traitements que vous n’aimeriez pas que l’on vous fasse. Oui avant de vous prononcer en leur faveur et leur application, commencez donc par les vous appliquer à vous mêmes.
Laissez leur le temps de se réparer, de se rencontrer, de se soutenir mutuellement, alors qu’ils se sentent tellement isolés quand vous les recevez de haut dans vos box. Tellement de bla, bla, mais en vérité si peu d'humanité. N’allez pas non plus leur imposer vos mêmes manquements pour je ne sais quel faux prétexe, soyez humains et non juges, inquisiteurs et médisants à leur égard. Soyez généreux et non avares en confiance et patience, ils n’ont pas besoin d’être davantage fichés, notés, pressés, jugés, radiés pour pouvoir retrouver confiance en eux, en l’autre, et en la société.
Un jour vous serez surpris de voir que la société fera davange l’économie d’allocations, quand les gens auront retrouvé plus de dignité et de confiance en eux.
Mais comment des gouvernants qui n’ont jamais connu le chômage de près pourraient mettre un tel programme bien plus efficace et aussi beaucoup moins couteux en place ?
Merci de laisser la parole aux chômeurs.
Nadir
Je viens d’avoir un entretien avec un agent de l’Anpe, vous savez les personnes qui sont sensées faire du social, mais qui hélas éprouvent souvent le malin plaisir à vous renvoyer votre propre situation de chômeur à la figure au cas où vous l’auriez oubliée depuis 5 minutes.
Et bien vous savez quoi ! Il m’a proposé au sujet de ma situation, un nouveau contrat, le contrat avenir, «nouvelles mesures du gouvernement» m’a t’il dit. Formidable je me suis dit, il a l’air vraiment plus convaincant que ses collègues, un vrai commercial, un vrai vendeur, quelle force de vente, quel réel contact humain.Le chômeur a t-il encore le droit à la parole dans ce pays ? Bien sur que non il est tellement stigmatisé dans l’opinion publique, il n’est plus crédible, entendu, comme cela les arrange bien !
Vous auriez du voir: Il était tellement fier de vendre sa camelotte, je crois même l’avoir bien flatté, hélas il en avait même oublié tout ce que je venais de lui dire. Il paraît même selon ses dires, qu’en acceptant ce nouveau contrat, les personnes dans ma situation se retouvent plus rapidement sur le marché du travail en acceptant de le signer. Même si à ce moment, il a un peu douté quelques secondes de ce qu’il me proposait commercialement, oui après tout ce n’est pas sa vie qui est en jeu. C’est beau le social d’aujourd’hui vous ne trouvez pas ?
Systématiquement, malgré ma bonne présentation et mes preuves de démarches, je suis rabaissé, interrogé, intimidé, culpabilisé de pas avoir trouvé un emploi dans les temps, d’être toujours au RMI ! Alors comment voulez-vous que les gens puissent s’en sortir, voire conserver le peu de dignité, de fierté qu’il leur reste et par la même recouvrer la confiance nécessaire pour retouver un emploi. Et après ils s’étonnent que les personnes en situation de chômage en deviennent plus violentes et irrespectueuses à leur égard.
Où sont les gardes fous avec ces gens là ? Oh, ils aiment bien que vous leur rendiez des comptes, rapportez des preuves de vos démarches car de toutes façons ils ne font pas confiance, tout comme nos dirigeants. Mais quand il s’agit à votre tour de leur demander des comptes, sur tout leur bla, bla, sur les multiples incohérences et l’inefficacité manifeste de leurs procédures collectives mises en place, la réponse est stéréotypée, peu honnête :
« Je fais ce qu’on me dire de faire «
Sous entendu, il ne faut surtout pas réfléchir, car si ces gens-là commencaient à réfléchir sérieusement, ils feraient certainement un peu plus attention à leur conduite, et aux conséquences de leurs actes, mais là voyez vous c’est trop difficile pour eux, car cela leur demande de faire un certain effort individuel. Non, pour eux le mieux est de suivre bêtement collectivement toutes les directives venant d’en haut, en fait je devrais plutôt dire d’en bas !
Le problème voyez-vous c’est qu’à partir du moment où je lui ai dit que je préférais avant tout suivre ma propre démarche personnelle et que je ne croyais plus dans les nouvelles mesures du gouvernement à travers sa modeste personne, alors là il est tombé des nues sur sa chaise, et il m’a bien fait comprendre qu’en plus d’être un chômeur attardé ma démarche n’était pas conventionnelle, et il m’a bien laissé sentir que ses propositions, hors de mon champ et de mes compétences seraient plus adéquates à ma situation. Vraiment du fourre-tout, de la vente forcée, et sans aucune réelle prise en considération du parcours professionnel de la personne.
De plus, ils ont la fâcheuse tendance à estimer à notre place ce qui est bon ou pas pour nous, comment par exemple améliorer son quotidien, sa situation matérielle. Accepter n’importe quoi, le précaire, comme l'intérim, eux ils s'en moquent bien car ce n'est pas leur propre équilibre qui est en jeu, accepter les contrats bidons et précaires mis en place, pour eux c’est normal, c’est mieux il paraît aussi pour l’homme, même s’il en perd peu à peu sa dignité, sa fierté.
Et par dessus-tout vous avez droit à ce regard désobligeant, voire vous devenez à leur yeux une chose dérangeante, une curiosité à juger, et marquer aussi de je ne sais quelle abréviation secrète derrière même le dos des personnes.
En fait voyez-vous dans leur abus de position, ces gens là ne supportent vraiment pas que vous puissiez leur répondre autre chose, avoir vos idées propres, vos propres contacts, vos propres démarches sans au préalable transiter obligatoirement par eux. C’est pourquoi m’a-t’il dit, je vous aurai dorénavant tous les mois sur le dos. Vous auriez du voir, à ce moment là, le malin plaisir qu’il a éprouvé dans ses yeux en me disant cela, j’en ai même eu froid dans le dos. Mais rassurez-vous m’a t’il dit dans notre agence on ne flique pas les gens comme dans d’autres agence…
«C’est pour votre bien que je fait cela et non pour autre chose»
Quelle prétention ! Et vous auriez du voir la façon dont il m’a raccompagné à la sortie pour à nouveau refaire son même numéro de vendeur, de commercial avec d’autres personnes ! Quel est le sens social de tout cela ? Mais où est elle la cohérence dans leur conduite ? Aimeriez-vous que l'on vous convoque de la sorte ? Que l'on vous interroge et traite systématiquement de la sorte ? Mais n'avez vous pas honte de vous mêler avec de telles personnes aussi irresponsables que bêtes ?
Pauvres demandeurs d’emploi qui auront à subir continuel rabaissement, ce même tourment moral, cette même intimidation, cette même vexation morale de la part de
gens sensés nous aider et nous soutenir, et qui hélas ne parviendront pas à l’exprimer ou à l’écrire pour en témoigner, pauvres gens.
Il est vrai que les élections approchent pour ce gouvernement, qu’il faut mettre alors les bouchées doubles, renflouer davantage les caisses, les dépenses de logement, de déplacement, ou encore de frais de bouche de nos élites. Mais pourquoi ce soudain empressement politique à vouloir mettre davantage la pression morale sur bon nombre d’agents ou de chômeurs ? Je trouve vraiment cela maladroit, et d’un total mépris envers ceux vivant une situation difficile. Pourquoi les tourmenter ? Pourquoi un tel acharnement ? Je fais le vœu que cette vaine gouvernance soit sévèrement sanctionnée en l’an 2007.
S’il vous plaît, si vous faîtes encore partie de ces personnes qui ont encore une petite parcelle d’humanité, rendez moi service: Cherchez avant tout à vous montrer plus humain à l’égard de tous ceux en réelle situation de détresse dans cette société. N’allez pas non plus leur faire subir de surcroît des traitements que vous n’aimeriez pas que l’on vous fasse. Oui avant de vous prononcer en leur faveur et leur application, commencez donc par les vous appliquer à vous mêmes.
Laissez leur le temps de se réparer, de se rencontrer, de se soutenir mutuellement, alors qu’ils se sentent tellement isolés quand vous les recevez de haut dans vos box. Tellement de bla, bla, mais en vérité si peu d'humanité. N’allez pas non plus leur imposer vos mêmes manquements pour je ne sais quel faux prétexe, soyez humains et non juges, inquisiteurs et médisants à leur égard. Soyez généreux et non avares en confiance et patience, ils n’ont pas besoin d’être davantage fichés, notés, pressés, jugés, radiés pour pouvoir retrouver confiance en eux, en l’autre, et en la société.
Un jour vous serez surpris de voir que la société fera davange l’économie d’allocations, quand les gens auront retrouvé plus de dignité et de confiance en eux.
Mais comment des gouvernants qui n’ont jamais connu le chômage de près pourraient mettre un tel programme bien plus efficace et aussi beaucoup moins couteux en place ?
Merci de laisser la parole aux chômeurs.
Nadir