Allons-nous perdre la guerre ?
Publié : 05 janv. 2006
Nous pensions avoir gagné quelques batailles. Mais nous allons perdre la guerre !
Malgré le vent de défiance qui balaie la France depuis un certain 21 avril 2002, les dernières poches de résistance à la toute-puissante «pensée unique mondialisée» semblent l’une après l’autre rendre les armes et abdiquer.
En moins de 4 ans, nous sommes passés par toutes les transitions, même les plus improbables. Le 21 avril 2002, Lionel Jospin était écarté de la course finale des présidentielles au profit d’un Jean-Marie Le Pen qui, même dans ses rêves les plus audacieux, n’aurait osé en caresser l’éventualité.
Et voilà comment Jacques Chirac fut réélu à la Présidence de la République avec 82% des suffrages provenant de tous les horizons politiques, extrême gauche comprise. Pourtant, le «ras de marée frontiste» levé par plus de 6 millions d’électeurs n’accoucha que d’une vaguelette imperceptible. Pas un seul député FN ne s’installa dans les travées de l’Assemblée nationale à l’occasion des élections législatives qui suivirent (ils furent 35 à être élus en 1986… avec l’aval de François Mitterrand).
Et nous nous retrouvâmes avec une UMP disposant d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale alors que son candidat officiel - Jacques Chirac - n’avait recueilli que 19% des suffrages exprimés au premier tour des présidentielles (moins de 12% des Français en âge de voter !).
S’en suivit une période marquée par un accroissement du chômage, de la précarité et des inégalités sociales, sous la houlette du Premier ministre de l’époque : Jean-Pierre Raffarin. Cette amplification de la «fracture sociale» allait être fermement sanctionnée par les électeurs à l’occasion des élections régionales de 2004. Vingt régions sur vingt-deux s’affichèrent à gauche ! Mais le gouvernement et le chef de l’État n’étaient pas au bout de leurs mauvaises surprises.
Le 29 mai 2005, les électeurs frondeurs administrèrent une sévère déculottée aux partis de l’establishment politique (UMP, UDF, PS), ainsi qu’aux grands médias qui soutenaient leurs vues. Le «NON» au référendum portant sur le projet de constitution européenne mobilisa 55% des suffrages.
La claque fut retentissante… mais finalement vite oubliée grâce à l’intervention d’un duo d’hommes providentiels : Dominique de Villepin, fervent défenseur du «nouvel ordre social» et Nicolas Sarkozy, farouche partisan du «nouvel ordre sécuritaire». Ainsi après la succession de séismes enregistrés depuis avril 2002, assistions-nous à cette déconcertante redistribution des cartes.
Mais l’affaire n’allait pas en rester-là ! Car 5 mois après la déconfiture européenne, les banlieues s’embrasaient pendant plusieurs semaines, mises à feu par quelques «dérapages contrôlés» amorcés par celui qui est sensé incarner l’ordre : le ministre de l’Intérieur lui-même.
C’est curieux. À l’entame de cette nouvelle année, tous ces événements «anodins» paraissent déjà loin. Les soubresauts de ces derniers mois, de ces dernières années, ont déjà été digérés par le grand livre de l’Histoire contemporaine.
À droite, l’unique question qui se pose est de savoir qui de Sarkozy ou de Villepin sera candidat en 2007. Et qui joue le rôle d’arbitre de cette primaire d’un genre nouveau ? Jacques Chirac lui-même. Gag !
Au PS, tous les «opposants» à la ligne officielle adoptée pour le référendum - le «OUI» sanctionné par 55% des Français - sont aujourd’hui marginalisés, réduits au silence, alors que s’annonce une bataille pour l’investiture à la présidentielle de 2007 réunissant… tous les «perdants» du 29 mai (excepté Laurent Fabius) !
Et à gauche du PS ? Le front du «NON» a implosé aussi vite qu’il s’était constitué, renvoyant chacun, communistes, trotskystes, maoïstes… et autres dissidents à leurs chères vieilles querelles de clocher.
Et pendant tout ce temps, le tissu des revendications sociales s’étiole : les syndicats peinent à mobiliser leurs troupes sur les grands dossiers du moment (Contrat nouvel embauche, précarisation des statuts, baisse ou stagnation du pouvoir d’achat, temps de travail…). Pire, ils semblent s’arc-bouter sur leurs derniers petits privilèges, eux qui chaque année voient fondre leur influence qui culmine aujourd’hui à… moins de 9% des salariés de ce pays.
Et pendant ce temps, les affaires, le business, les bénéfices des entreprises… n’ont jamais été aussi florissants. Le nombre d’arrêts de travail (les jours de grève) n’a jamais été aussi faible. Et la pression sur ceux qui bossent et sur ceux qui ne trouvent pas de boulot n’a jamais été aussi forte.
Et pendant ce temps aussi, la police patrouille. Le moindre rassemblement est immédiatement «encadré» par des déploiements de forces de l’ordre impressionnants…
Et pendant ce temps enfin, les médias nous projettent vers ce que sera la France de demain, celle de 2007, quand nous aurons à choisir entre Ségolène Royal, Jack Lang ou Dominique Strauss-Kahn, Nicolas Sarkozy ou Dominique de Villepin… Comme si rien ne s’était passé depuis le 21 avril 2002 !
Même François Bayrou, le «dangereux révolutionnaire» de l’UDF, est aujourd’hui marginalisé par un système qui, depuis 4 ans, ne fait que perdre la main et réussit finalement à la reprendre grâce au soutien de ses réseaux financiers et médiatiques.
Ainsi, pensions-nous avoir gagné quelques batailles, mais nous sommes en passe de perdre la guerre.
Malgré le vent de défiance qui balaie la France depuis un certain 21 avril 2002, les dernières poches de résistance à la toute-puissante «pensée unique mondialisée» semblent l’une après l’autre rendre les armes et abdiquer.
En moins de 4 ans, nous sommes passés par toutes les transitions, même les plus improbables. Le 21 avril 2002, Lionel Jospin était écarté de la course finale des présidentielles au profit d’un Jean-Marie Le Pen qui, même dans ses rêves les plus audacieux, n’aurait osé en caresser l’éventualité.
Et voilà comment Jacques Chirac fut réélu à la Présidence de la République avec 82% des suffrages provenant de tous les horizons politiques, extrême gauche comprise. Pourtant, le «ras de marée frontiste» levé par plus de 6 millions d’électeurs n’accoucha que d’une vaguelette imperceptible. Pas un seul député FN ne s’installa dans les travées de l’Assemblée nationale à l’occasion des élections législatives qui suivirent (ils furent 35 à être élus en 1986… avec l’aval de François Mitterrand).
Et nous nous retrouvâmes avec une UMP disposant d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale alors que son candidat officiel - Jacques Chirac - n’avait recueilli que 19% des suffrages exprimés au premier tour des présidentielles (moins de 12% des Français en âge de voter !).
S’en suivit une période marquée par un accroissement du chômage, de la précarité et des inégalités sociales, sous la houlette du Premier ministre de l’époque : Jean-Pierre Raffarin. Cette amplification de la «fracture sociale» allait être fermement sanctionnée par les électeurs à l’occasion des élections régionales de 2004. Vingt régions sur vingt-deux s’affichèrent à gauche ! Mais le gouvernement et le chef de l’État n’étaient pas au bout de leurs mauvaises surprises.
Le 29 mai 2005, les électeurs frondeurs administrèrent une sévère déculottée aux partis de l’establishment politique (UMP, UDF, PS), ainsi qu’aux grands médias qui soutenaient leurs vues. Le «NON» au référendum portant sur le projet de constitution européenne mobilisa 55% des suffrages.
La claque fut retentissante… mais finalement vite oubliée grâce à l’intervention d’un duo d’hommes providentiels : Dominique de Villepin, fervent défenseur du «nouvel ordre social» et Nicolas Sarkozy, farouche partisan du «nouvel ordre sécuritaire». Ainsi après la succession de séismes enregistrés depuis avril 2002, assistions-nous à cette déconcertante redistribution des cartes.
Mais l’affaire n’allait pas en rester-là ! Car 5 mois après la déconfiture européenne, les banlieues s’embrasaient pendant plusieurs semaines, mises à feu par quelques «dérapages contrôlés» amorcés par celui qui est sensé incarner l’ordre : le ministre de l’Intérieur lui-même.
C’est curieux. À l’entame de cette nouvelle année, tous ces événements «anodins» paraissent déjà loin. Les soubresauts de ces derniers mois, de ces dernières années, ont déjà été digérés par le grand livre de l’Histoire contemporaine.
À droite, l’unique question qui se pose est de savoir qui de Sarkozy ou de Villepin sera candidat en 2007. Et qui joue le rôle d’arbitre de cette primaire d’un genre nouveau ? Jacques Chirac lui-même. Gag !
Au PS, tous les «opposants» à la ligne officielle adoptée pour le référendum - le «OUI» sanctionné par 55% des Français - sont aujourd’hui marginalisés, réduits au silence, alors que s’annonce une bataille pour l’investiture à la présidentielle de 2007 réunissant… tous les «perdants» du 29 mai (excepté Laurent Fabius) !
Et à gauche du PS ? Le front du «NON» a implosé aussi vite qu’il s’était constitué, renvoyant chacun, communistes, trotskystes, maoïstes… et autres dissidents à leurs chères vieilles querelles de clocher.
Et pendant tout ce temps, le tissu des revendications sociales s’étiole : les syndicats peinent à mobiliser leurs troupes sur les grands dossiers du moment (Contrat nouvel embauche, précarisation des statuts, baisse ou stagnation du pouvoir d’achat, temps de travail…). Pire, ils semblent s’arc-bouter sur leurs derniers petits privilèges, eux qui chaque année voient fondre leur influence qui culmine aujourd’hui à… moins de 9% des salariés de ce pays.
Et pendant ce temps, les affaires, le business, les bénéfices des entreprises… n’ont jamais été aussi florissants. Le nombre d’arrêts de travail (les jours de grève) n’a jamais été aussi faible. Et la pression sur ceux qui bossent et sur ceux qui ne trouvent pas de boulot n’a jamais été aussi forte.
Et pendant ce temps aussi, la police patrouille. Le moindre rassemblement est immédiatement «encadré» par des déploiements de forces de l’ordre impressionnants…
Et pendant ce temps enfin, les médias nous projettent vers ce que sera la France de demain, celle de 2007, quand nous aurons à choisir entre Ségolène Royal, Jack Lang ou Dominique Strauss-Kahn, Nicolas Sarkozy ou Dominique de Villepin… Comme si rien ne s’était passé depuis le 21 avril 2002 !
Même François Bayrou, le «dangereux révolutionnaire» de l’UDF, est aujourd’hui marginalisé par un système qui, depuis 4 ans, ne fait que perdre la main et réussit finalement à la reprendre grâce au soutien de ses réseaux financiers et médiatiques.
Ainsi, pensions-nous avoir gagné quelques batailles, mais nous sommes en passe de perdre la guerre.