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Haine des SDF

Publié : 26 déc. 2005
par gaia
http://www.nouvelobs.com/articles/p2142/a288450.html
"Patrick Declerck dénonce la « bêtise » du système d'aide et la « nécessaire mise en scène » de la souffrance des pauvres

Le Nouvel Observateur. - Après la somme des « Naufragés », pourquoi ce pamphlet, beaucoup plus violent ?
Patrick Declerck. - Je me suis aperçu, en faisant la promotion des « Naufragés », de l'ambivalence profonde de la société envers les plus pauvres. Très vite, dans des rencontres publiques, j'étais confronté à une véritable haine des SDF, au désir profond que ces gens-là soient punis de leur oisiveté."

Publié : 26 déc. 2005
par Monolecte
100% d'accord!
Il y a 2 ou 3 mois, j'ai voulu faire un article sur le Scours Populaire de mon bled!

Je me suis ramassée 30 minutes de bile par une "bénévole" sur les clodos profiteurs... Ca m'a retournée, parce que cette nana est sensée s'occuper d'eux...

Publié : 26 déc. 2005
par Patrick B.
Un livre pamphlet, plein d'indignation : les victimes sacrificielles sont mises à mort par la mentalité d'esclaves envieux de ceux qui considèrent que le système social est sans issue : ou travailler, ou mourir.

Le titre du petit livre ? « Le sang nouveau est arrivé », publié par Gallimard.

Patrick Declerck est membre de la Société psychanalytique de Paris.

Oui, son titre est en analogie avec le Beaujolais nouveaux et ses jeux apparemment innocents.

Les amoureux sur les bancs publics sont exécrés par ceux qui observent leurs furtifs baisers.

De même, ces poètes que Platon, dans sa République — parce qu'il n'est pas poète — veut couronner et exclure de la cité.

Pour le Natsiv de Volozin, Kaïn produit, et subventionne Hevel, artiste qui joue de la flûte, observe avec bonheur le pelage de ses animaux. Mais quand l'offrande de Hevel, plus sincère, est davantage agréée que la sienne, Kaïn médite de le tuer, et il le fait, effectivement.

Jeu double et dramatique du désir et de la domination, que le texte de la Genèse applique aussi bien à cette situation qu'à la relation entre la femme et l'homme.

Nietzsche, mis au ban de la vie universitaire : il osait penser autrement que le ronron « de haute tenue ».

Comme Socrate et Jésus, Jan Hus et Giordano Bruno.

Quelques idées clefs résultant des observations de Patrick Declerck.

Lionel Jospin, dans une déclaration du 18/03/02 :

« Ceux que l'on appelait les clochards qui, pour des motifs personnels, choisissaient de rester dans la rue ».

Aujourd'hui même, le premier ministre demande que les « SDF actifs » aient un domicile fixe.

Sans activité, tu ne mérites que la mort.

Et tu ne peux même être accueilli dans le si beau pays.

« La réalité, habillée, escamotée, n'engage plus personne à rien. »

« Immuable BETISE du système d'aide et d'accomplissement des SDF. »

« Gestion des limites de tolérance générale au scandale public. »

« Il est assez salutaire que souffrent et meurent dans la rue et sous nos yeux quelques-uns de ces insupportables oisifs ».

« Voilà ce qui arrive à qui transgresse les obligations de la société, à qui tente d'en secouer l'implacable joug ».

« Des victimes sacrificielles. »

Oui, les idées tragiques de René Girard, de Moïse assassiné par les Juifs, selon Freud, sont dans l'air.

« Moderne version des suppliciés pourrissant jadis en place de Grève. »

Oui, les SDF comme Templiers, mais… Sans argent.

« Sort, consciemment ou inconsciemment, objet de la haine et de la vindicte publiques. »

« La conscience spectatrice et naïve les exècre. »

« Echapper à l'obligation générale du travail ? Un vrai scandale. »

« Ce privilège est, aux yeux des esclaves volontaires que sont les passants, intolérable. »

« Ils se branlent en ricanant sous nos yeux révulsés et fatigués de labeur. »

« Le clodo jouit d'une inouïe liberté. »

« Il fait envie. »

« Et cette impossible envie conduit à souhaiter sa mort. »

« Le clodo illustre la terrifiante vérité de la société. »

« Rue, bordel, prison, sont cousins. »

« Il ne peut pas exister d'alternatives viables au canon de la bonne normalité. »

« D'où le viol sous les douches, en prison. »

Mais ici, il ne s'agit pas seulement d'une justice rendue…

« C'est pourquoi on continuera d'entraver les conditions de possibilité de lutte contre la mort à la rue. »

« Terrible leçon : la normalité est sans issue. »

« Une totalitaire obligation : Le citoyen sera productif ou, sinon, sans bruit, sera mis à mort. »

« Contrat social. »

« On se tape sur la gueule à chaque occasion, et on ne sait même pas pourquoi. »

Parce que l'on se déteste.

Et, accessoirement, on déteste l'autre aussi. Mais pas tellement.

« La rue est horreur, terreur, torture. »

« Crime ignoble commis à toute heure du jour et de la nuit. »

« Innocents de tout, sauf de leur malheur. »

« Crime commis dans l'indifférence générale. »

« Commis pour l'édification de tous. »

La solution ?
« Rendre illégale la mise à la rue. »

Une atténuation de la charge :
« Une critique qui s'attache aux systèmes, non à ceux qui les composent. »

Un cas particulier de la détestation de soi, à cause d'une vie sans but.

Non la misère de l'homme sans Dieu, suivant la conception naïve de Pascal.

Mais un mécanisme qui tourne à vide, et s'en prend, volontiers, à n'importe qui.

A l'étranger.

A cette manière d'être étranger.

http://www.dtext.com/raphael-cohen/onde ... b4083.html

Publié : 26 déc. 2005
par victorine83
Dans la rue, il y a aussi bon nombre de personnes atteintes de maladies mentales (schizophrènes, psychotiques... ) que la société ne veut prendre en charge et laisse démunis et livrés à eux-même sous le prétexte qu'ils ne sont pas dangereux pour autrui mais qui auraient besoin de soins particuliers liés à leur maladie.

Publié : 26 déc. 2005
par tristesir
Ce livre a l air interessant et ...pas trop cher.
je crois que cela sera ma prochaine lecture.
merci de m avoir fait decouvrir cet auteur.

Publié : 28 déc. 2005
par tristesir
Je viens d acheter "pas de pitie pour les gueux" et "le sang nouveau est arrive" je pense les lire dans cet ordre la

Publié : 29 déc. 2005
par Monolecte
"Pas de pitié pour les gueux" est vraiment très bien foutu : accessible, pas cher, il résume rapidement et efficacement les théories du chômage libérales et finit par une bien belle mise en perspective du NAIRU, même s'il ne dit pas son nom...

Là, j'attaque "Fonds de pension, piège à cons?" de Frédéric Lordon, un économiste qui passe de temp en temps chez Mermet.

Et je vais finir avec "les nouveaux chiens de garde" de Serge Halimi.

Le tout vient d'une petite collection pas chère "raisons d'agir", chez le Seuil!

Bonne lecture à tous!

Publié : 29 déc. 2005
par tristesir
"Fonds de pension, piège à cons?": indisponible à la RNAC
je risque de pas pouvoir le lire tout de suite.

Publié : 29 déc. 2005
par tristesir
Mais peut etre disponible chez "bebert" saint michel, paris
affaire à suivre.

Publié : 29 déc. 2005
par Monolecte
Dispo chez Amazon

Publié : 29 déc. 2005
par tristesir
Je viens de le trouver chez "bebert" odeon paris
à un prix "special precaire": ils l avaient en occasion.
Prix indique: 2.74 euro .prix lu par le scanner de la caissiere: 1.80 euro. Il en reste 3 exemplaires (meme tarif sur l etiquette, j ignore si l erreur dans le code barre est presente ou non) au rayon 'Economie du travail" troisieme etage (faut chercher un peu le rayonnage, il est un peu caché).
J'espere qu il n y a qu une edition :)
(celle que j ai a ete imprimee en 2000, c'est la premiere edition)

torture

Publié : 30 déc. 2005
par superuser
Ces SDF qui nous font si peur.

Patrick Declerck est l’auteur d’un pamphlet au vitriol sur notre attitude vis-à-vis des marginaux et des sans abri.

L’hiver est de retour. Des «spécialistes», dont on ne vantera jamais assez l’esprit scientifique, ont redécouvert cette évidence. Les mois allant de novembre à mars sont généralement moins cléments au nord de la Loire qu’à la hauteur de Bamako. Il fait froid, il neige, il gèle à pierre fendre et les populations d’exclus, qui vivent dans la rue, sont sujettes à une étrange hausse des cas de mortalité. Chaque année, c’est la même chose. L’on déclenche, à grands renforts de publicité, des plans d’urgence, on augmente les places dans les centres d’accueil et le bon peuple est appelé à manifester sa sollicitude envers ces damnés de la terre d’un genre nouveau.

Il y faut un certain courage. Clodos et SDF n’inspirent pas toujours, loin de là, la sympathie. Avinés, ils encombrent les trottoirs, sollicitant, parfois de manière hargneuse, la générosité des passants et n’hésitent pas à agonir d’insulte les pingres ou les indifférents. Il n’empêche. Un vieux reste de christianisme nous oblige à la charité, à une charité très ordonnée. On prend des mesures. Mais on veille aussi à ce que cette charité ne soit pas facteur de gêne. C’est ainsi qu’on s’arrange pour que le nouveau mobilier urbain de la RATP soit conçu de telle manière que les SDF ne puissent y dormir dans la journée. Quant aux centres d’accueil, ils n’ouvrent leurs portes qu’en fin de journée et renvoient leurs pensionnaires dès les premières lueurs de l’aube. Entre 6h du matin et 6h du soir, ils n’ont qu’à se débrouiller…

C’est cette réalité que décrit Patrick Declerck dans son nouveau livre. En n’hésitant pas à forcer sur le détail. De la difficulté de la défécation en public du SDF, les lignes qu’il consacre à ce sujet sont un véritable morceau d’anthologie.

Par delà ce cri, c’est toute une remise en cause de notre système d’assistance qui est au cœur de ce livre, un système vieillot, inadapté, profondément influencé par les vieilles peurs bourgeoises d’antan. Parce que le SDF nous nargue, nous fait honte de notre prétendue normalité. La conclusion de Declerck est superbe : «La rue est une horreur. La rue est une terreur. La rue est une torture. La rue est un crime ignoble commis à chaque heure du jour et de la nuit contre des faibles et des innocents. Innocents de tout, sauf de leur malheur. Un crime commis dans et par l’indifférence générale. Un crime sacrificiel et barbare répété pour l’édification de tous… Il faut que cela cesse. Il faut appeler le crime par son nom. Il faut, par la loi, rendre illégale la mise à la rue». Voilà une bonne nouvelle qui mérite bien qu’on reprenne un peu de foie gras et de champagne ! Les grandes indignations sont rarement indigestes…

Patrick Declerck, Le sang nouveau est arrivé. L’horreur SDF - Gallimard, 98 p. - 5,50 €

Source : Marianne


«A l'inconfort, aux douleurs, aux insomnies chroniques s'ajoutent quelques autres réjouissances. L'angoisse à bas bruit, mais constante, de dormir exposé et vulnérable à tout. Les rats comme les voleurs. Les voyous qui se défoulent pour rigoler. Et les violeurs qui se repaissent des deux sexes. Et les flics et la pluie. Et la boue. Et les crachats gluants. Et l'urine des chiens.»

Se laver, pisser et chier sont un problème.

Quand on veut torturer ses prisonniers en temps de guerre, on utilise les mêmes méthodes : «À propos de la torture dans les prisons en Irak, on a pu lire les techniques d’interrogatoires musclés, de torture "acceptable". De quoi s’agit-il ? De privation de sommeil, de privation de nourriture, d’hypothermie, d’isolement... Autant de mesures qui conduisent le sujet à être désorienté dans le temps et l’espace, à être affaibli, écrasé pour qu’il n’ait plus de système de défense personnel. Nous sommes là, terme à terme, dans ce qu’est le quotidien de la vie à la rue.»