Un livre pamphlet, plein d'indignation :
les victimes sacrificielles sont mises à mort par la mentalité d'esclaves envieux de ceux qui considèrent que le système social est sans issue : ou travailler, ou mourir.
Le titre du petit livre ? « Le sang nouveau est arrivé », publié par Gallimard.
Patrick Declerck est membre de la Société psychanalytique de Paris.
Oui, son titre est en analogie avec le Beaujolais nouveaux et ses jeux apparemment innocents.
Les amoureux sur les bancs publics sont exécrés par ceux qui observent leurs furtifs baisers.
De même, ces poètes que Platon, dans sa République — parce qu'il n'est pas poète — veut couronner et exclure de la cité.
Pour le Natsiv de Volozin, Kaïn produit, et subventionne Hevel, artiste qui joue de la flûte, observe avec bonheur le pelage de ses animaux. Mais quand l'offrande de Hevel, plus sincère, est davantage agréée que la sienne, Kaïn médite de le tuer, et il le fait, effectivement.
Jeu double et dramatique du désir et de la domination, que le texte de la Genèse applique aussi bien à cette situation qu'à la relation entre la femme et l'homme.
Nietzsche, mis au ban de la vie universitaire : il osait penser autrement que le ronron « de haute tenue ».
Comme Socrate et Jésus, Jan Hus et Giordano Bruno.
Quelques idées clefs résultant des observations de Patrick Declerck.
Lionel Jospin, dans une déclaration du 18/03/02 :
« Ceux que l'on appelait les clochards qui, pour des motifs personnels, choisissaient de rester dans la rue ».
Aujourd'hui même, le premier ministre demande que les « SDF actifs » aient un domicile fixe.
Sans activité, tu ne mérites que la mort.
Et tu ne peux même être accueilli dans le si beau pays.
« La réalité, habillée, escamotée, n'engage plus personne à rien. »
« Immuable BETISE du système d'aide et d'accomplissement des SDF. »
« Gestion des limites de tolérance générale au scandale public. »
«
Il est assez salutaire que souffrent et meurent dans la rue et sous nos yeux quelques-uns de ces insupportables oisifs ».
« Voilà ce qui arrive à qui transgresse les obligations de la société, à qui tente d'en secouer l'implacable joug ».
« Des victimes sacrificielles. »
Oui, les idées tragiques de René Girard, de Moïse assassiné par les Juifs, selon Freud, sont dans l'air.
« Moderne version des suppliciés pourrissant jadis en place de Grève. »
Oui, les SDF comme Templiers, mais… Sans argent.
« Sort, consciemment ou inconsciemment, objet de la haine et de la vindicte publiques. »
« La conscience spectatrice et naïve les exècre. »
«
Echapper à l'obligation générale du travail ? Un vrai scandale. »
«
Ce privilège est, aux yeux des esclaves volontaires que sont les passants, intolérable. »
« Ils se branlent en ricanant sous nos yeux révulsés et fatigués de labeur. »
«
Le clodo jouit d'une inouïe liberté. »
«
Il fait envie. »
«
Et cette impossible envie conduit à souhaiter sa mort. »
« Le clodo illustre la terrifiante vérité de la société. »
« Rue, bordel, prison, sont cousins. »
« Il ne peut pas exister d'alternatives viables au canon de la bonne normalité. »
« D'où le viol sous les douches, en prison. »
Mais ici, il ne s'agit pas seulement d'une justice rendue…
« C'est pourquoi on continuera d'entraver les conditions de possibilité de lutte contre la mort à la rue. »
« Terrible leçon : la normalité est sans issue. »
« Une totalitaire obligation : Le citoyen sera productif ou, sinon, sans bruit, sera mis à mort. »
« Contrat social. »
« On se tape sur la gueule à chaque occasion, et on ne sait même pas pourquoi. »
Parce que l'on se déteste.
Et, accessoirement, on déteste l'autre aussi. Mais pas tellement.
« La rue est horreur, terreur, torture. »
« Crime ignoble commis à toute heure du jour et de la nuit. »
« Innocents de tout, sauf de leur malheur. »
« Crime commis dans l'indifférence générale. »
« Commis pour l'édification de tous. »
La solution ?
« Rendre illégale la mise à la rue. »
Une atténuation de la charge :
« Une critique qui s'attache aux systèmes, non à ceux qui les composent. »
Un cas particulier de la détestation de soi, à cause d'une vie sans but.
Non la misère de l'homme sans Dieu, suivant la conception naïve de Pascal.
Mais un mécanisme qui tourne à vide, et s'en prend, volontiers, à n'importe qui.
A l'étranger.
A cette manière d'être étranger.
http://www.dtext.com/raphael-cohen/onde ... b4083.html