Pour rappel, la chronique de Dominique Seux du 16/12/2009
http://blogs.lesechos.fr/article.php?id_article=3351
Un page savoureuse.....
Le conseil des ministres entérine ce matin la hausse du Smic au 1er janvier et cette hausse mérite que l’on s’y arrête parce qu’elle met en évidence des vraies évolutions en cours autour du salaire minimum. La première est tout simplement la date de la revalorisation. Depuis toujours, la hausse avait lieu le 1er juillet. Cela sera désormais en janvier. Le but est de permettre aux branches professionnelles de négocier les salaires en connaissance de cause.
Quelle que soit la date, cette augmentation du Smic intéressera toujours autant. Elle concerne directement 2,6 millions de salariés dans les entreprises, les associations et les administrations. Leur profil de ces salariés est archi-connu : ils sont souvent à temps partiel dans le commerce et les services et travaillent dans des PME.
Comme depuis 2007, le gouvernement a décidé de ne pas donner de coup de pouce au-delà de la revalorisation automatique de 0,5%. Pour un salarié à plein temps, le Smic passera donc à 1.344 euros par mois, soit 6 euros en plus. Les syndicats ont dénoncé hier ce quasi-gel. Le gouvernement, lui, le justifie en disant que l’inflation est très basse, qu’il y a eu une hausse du Smic de 1,3% en juillet, et en expliquant que la crise et un coût du travail trop élevé font peser des risques énormes sur l’emploi. Toute la difficulté sur ce sujet est que l’on a en tête la santé parfois mirobolante des grands groupes qui n’ont pas de smicards alors que celle des TPE – très petites entreprises – est infiniment plus fragile.
Hausse au 1er janvier, pas de coup de pouce, au final ce ne sont pas de grosses nouveautés... La vraie nouveauté c’est que, de même que les allègements de cotisations patronales aident considérablement les entreprises, un certain nombre de dispositifs nouveaux augmentent sensiblement, désormais, le revenu net des salariés très peu payés. Avec deux enfants, un couple où seul l’un des deux travaille et seulement au Smic perçoit 1.044 euros en revenu salarial. Mais avec le Revenu de solidarité active (RSA), la prime pour l’emploi (PPE) et quelques allocations familiales banales, le revenu global du foyer passe depuis cette année à 1.820 euros, soit 250 de plus qu’en 2008. Le résultat, c’est qu’un salarié « ordinaire » peut avoir près de la moitié de son revenu en prestations. Pour un mi-temps, pour une personne seule, les hausses sont aussi sensibles.
Tout cela permet de constater que l’ensemble représente des milliards d’euros, qui maintiennent sous perfusion le travail peu qualifié. On subventionne les entreprises pour que ce travail ne continue pas de s’enfuir ou d’être mécanisé ; On subventionne les salariés parce que le revenu du travail ne suffit pas pour vivre.
Cela veut dire que le travail n’a plus de prix, au sens propre. C’est malsain. Jusqu’où peut-on aller dans cette direction ? Nul ne le sait mais c’est sûrement un des débats cachés de l’après-crise.
Commentaires
MADEF.
Le premier E du sigle MEDEF ne semble là que pour faciliter la diction : je propose de le remplacer par une lettre significative, le A, ce qui donnerait MADEF, Mouvement Assisté Des Entreprises Françaises … et puis, ça fait un peu Madoff,
asinus asinum fricat. Pourquoi cette importante novation ? Parce que, directement par des allègements de charges ou indirectement par des aides et prestations diverses à leurs salariés, les entreprises françaises sont de plus en plus assistées.
Cépajust : avec l’euro, les Allemands ont encore une fois gagné la guerre et les pays aux économies moins performantes en sont réduits à la dette causée en grande partie par les subventions tous azimuts de (presque) toutes leurs activités … lorsque l’Allemagne perdra à nouveau la guerre, par exemple avec un euro à deux dollars, donc à 15 yuans, vivrons-nous la même apocalypse qu’en 1945 ?
Lorsque j’étais à mon compte, je me prenais la tête pour imaginer de nouveaux produits ou prestations et, comme les affaires n’allaient pas encore trop mal, je pouvais me contenter de surveiller de loin ma trésorerie, mon compte d’exploitation, et encore de plus loin mon bilan. Les entreprises d’aujourd’hui doivent passer plus de temps à gratter le moindre petit avantage financier, telles celles du CAC 40 qui externalisent leurs bénéfices, qu’à imaginer l’UMO (Unique Marketing Offer) qui les rendrait invincibles sur les marchés.
J’espère au moins que ces acrobaties financières ne donnent pas droit au crédit impôt recherche … mais je ne serais pas étonné de l’apprendre. Alors, par rapport à ces mouvements de fond, la non revalorisation du SMIC n’est importante que pour ceux qui en dépendent, ce qui fait quand même du monde, peut-être 10 millions de personnes si on tient compte de la composition des ménages.
Toujours avec le même mode de calcul, une quinzaine de millions de personnes dépendent du chômage ou de situations analogues, une dizaine du SMIC, voilà le pays « fort » que nous avaient promis nos gouvernants : honte à eux. Seul un petit village gaulois : Neuilly, résiste encore à l’invasion de la précarité, sans compter la diaspora qui est allée planquer son fric à l’étranger et qui ne l’investira pas chez nous.
Serais-je devenu complètement fou ? Le dernier des Mohicans à croire encore aux bienfaits de l’activité payée à son juste prix ? Il y a des moments où je me pose sérieusement la question ! Je pense aussi que le fait de maintenir « sous perfusion le travail peu qualifié » conduit finalement à étouffer le travail qualifié … Le travail mental (à dessein, je n’ai pas écrit intellectuel) qui consiste à tenter d’innover en recherchant la validation du concret n’est pas reposant, j’en sais quelque chose … alors, tous à la chasse aux subventions !
J’ai vu récemment sur une chaîne allemande une émission sur l’art baroque qui expliquait que le stuc s’était répandu à une époque où la matière, marbre ou granit, était chère, ne serait-ce qu’à cause du transport, et la main-d’œuvre bon marché, d’où tout ce temps passé à imiter un matériau noble. Je savais que nous avions une économie baroque, mais si, en plus, elle est en stuc …
Rédigé par Blackstream | mercredi 16 décembre 2009