L'Emploi et le Chômage en Débats

Je suis née le jour où j'ai été licenciée.

Heuuuuu

Licenciée de l'utérus maternel ????

Un nouveau départ qui lui fait voir la vie autrement, après son licenciement, je suppose. Une renaissance

Exactement !!! Un licenciement qui fait voir la vie autrement... un aveugle qui recouvre la vue... un paraplégique qui marche de nouveau ...

Un peu "courte" comme renaissance !

Peut-on en savoir un peu plus ?

Raconte-nous !

C’est étrange comme tout change, évolue, se transforme. Hier j’étais pleine d’ambition ; ma vie professionnelle était au centre de tout. C’est par elle que j’existais, que je me réalisais. J’étais schizophrène, comme nombre de mes congénères ; Je pestais contre ce système ultra-libéral qui aliène, assomme, détruit tout sur son passage, et je participais activement à sa marche en avant en mettant tout mon cœur à l’ouvrage dans un métier que j’aimais.
Et puis un jour tout bascule. Le vide prend toute la place. On réalise que cette vie de travail, de bons et loyaux services n’était qu’un leurre, qu’on a donné le meilleur de soi à un système qui broie tout dans ses mâchoires d’acier. Alors tout s’effondre. La vie ne semble plus avoir aucun sens. On crie. On pleure. On dépose les armes. On n’a même plus la force de se révolter. On veut juste rester là, renfermé chez soi, derrière les murs de son appartement, cette dernière bulle de chaleur qui nous protège du monde extérieur. On fuit la vie qui résonne dehors. On ne veut plus d’elle. On se recroqueville dans sa coquille, le temps de mourir ou de se reconstruire.
Je suis née le jour où j’ai été licenciée. Je remercie mon ex-employeur et la crise pour cet inestimable cadeau ! Libérée de mes chaînes, je suis enfin en accord avec moi-même. Le temps m’appartient, et jamais je ne me suis sentie aussi libre qu’aujourd’hui. Cette liberté retrouvée suffit à mon bien être. Je n’ai besoin de rien d’autre. J’ai juste envie de profiter de l’air du temps, du soleil ou de la pluie. Débarrassée des envies matérielles et matérialistes que la société de consommation crée de toutes pièces, que l’aliénation au système alimente, que la frustration engendrée par le mal être amplifie, je n’ai plus envie d’avoir ; j’ai juste envie d’être, de respirer, de marcher, de vivre, simplement de vivre !

Très intéressant ce cheminement.

On l'a à peu près tous connu ici, la colère, l'incompréhension, le désarroi, le sentiment de s'être fait avoir, pressé comme un citron qu'on jette après usage.

Et puis on se réveille, on réfléchit, on se pose, on observe, on lit, on se pose les bonnes et les vraies questions, celles qui sont fondamentales.

Je n'ose te dire bienvenue au club

Il y a longtemps ???

Si si !! Dites moi "bienvenue" au club !
Quand la crise financière a éclaté en septembre 2008, j'étais encore pleine d'énergie. Mon employeur faisait pression sur mes collègues et moi pour nous forcer la main et réduire notre temps de travail (et donc notre salaire) sans avoir recours au chomage partiel (trop de paperasse à remplir pour lui ! Pauvre petit chou !!! ). J'ai toujours été une "élève" assez indisciplinée au travail ... mon travail était irréprochable, mais en contre partie je n'ai jamais laissé qui que ce soit, et surtout pas mon patron, imposer son diktat sans me battre. Alors je me suis battue. J'ai mis toutes mes forces et tout mon temps libre dans cette bataille... recherches juridiques, jurisprudentielles, rencontres avec des syndicalistes ... Mais le monde de l'entreprise est une jungle... encore plus quand la menace de licenciements plâne ... Alors chacun défend son bout de gras, la solidarité devient un vain mot , on n'hésite pas à écraser son voisin pour sauver sa tête. Je me croyais solide, capable de faire face à l'absurde, à l'injuste, à la bétise. C'était bien utopique de ma part. Un matin de décembre j'ai craqué... La pression psychologique était devenue trop forte, mes nerfs ont lâché, et ce jour là j'ai rendu les armes. Je suis devenue un zombie, me rendant au travail tous les jours comme un robot. Je faisais acte de présence. Je n'avais plus goût à rien. J'éffectuais ma tâche de manière automatique, sans y trouver aucune satisfaction. J'étais totalement désabusée, plus rien ne m'importait, et le licenciement ne m'effrayait plus du tout... au contraire, je voyais en lui la délivrance.
Cette délivrance est arrivée en septembre 2009 (licenciement pour motif économique). Et là j'ai pris ce temps que je ne prenais plus; le temps de me poser, de lire, de m'informer, de comprendre, d'analyser, et j'ai compris que j'avais passé dix ans à perdre ma vie en essayant de la gagner.
Aujourd'hui je me sens libre, vivante. Cette nouvelle liberté et cette joie de vivre retrouvée sont toutefois gâchées par un sbire à la solde du régime qui me "coach" dans ma recherche active d'emploi. Le pôle emploi m'a "délocalisée" (oui eux aussi ils délocalisent !!) vers une boîte partenaire privée...

Voilà...mais vous savez de quoi je parle

bienvenue alors

tu as trouvé le bon endroit pour continuer à t'éveiller....

Nous en avons longuement parlé, entre autres, dans ce topic

http://www.actuchomage.org/forum/index. ... =viewtopic

Tu as "découvert" la lâcheté et la sans-pitié de tes ex-collègues, prêts à toutes les bassesses, compromissions, trahisons.

Plus besoin de contremaitres, les gens font le sale boulot de kapos tout seuls. Je comprends que cela fasse mal au coeur de voir ça de la part de gens à qui on serrait la main depuis des années, à qui on racontait ses petites joies ou peines, on tombe de haut.

Dis-toi bien qu'une entreprise ce n'est pas une famille ni une secte, contrairement à certains discours hypocrites militaro-mafieux (je pense à certains termes : vous êtes des killers, des winners mouarf). C'est un lieu où on échange quelques heures de notre temps contre de l'argent et basta !

Je me permets de te conseiller ce lire ce topic en haut où on échange nos expériences, je dois en être à 12 ou 14. Leur seule "formation" est d'essayer de te déstabiliser afin de te forcer à accepter n'importe quel job merdique. Pour les déstabiliser à leur tour, un truc : pose leur plein de questions sur leur propre formation, sur leur légitimité à te j(a)uger, ils n'aiment pas du tout.

Arrive avec un grand sourire, ça les énerve, éclate de rire à chaque proposition farfelue, ils préfèrent de beaucoup les gens qui arrivent la queue basse, le regard baissé et le cheveu triste, l'attitude du coupable ou du vaincu d'avance. Ne leur fais jamais ce plaisir, ni de confidences d'ailleurs, même si tu ressens un mal-être profond ou que tu te débats avec les problèmes financiers.

Je ne sais pas où tu habites, mais à Paris, ils ont tendance, devant les cas difficiles à t'envoyer vers des prestataires... psy ou pseudo-psy !

Courage, et raconte-nous tes expériences avec ce prestataire. Rappelle-leur qu'ils ne créent pas d'emplois à part le leur et qu'ils ont un salaire grâce à nous. Ils n'aiment pas non plus, je sais j'aime assez la provoc

J'ai toujours pensé que la meilleure défense face à ces abrutis pareils était de cacher ses faiblesses et ses moments de doute.

Bienvenue au club !

Les conseils de Maguy sont frappés au coin du bon sens.
On devrait rédiger un petit manuel de défense passive à l'usage du chômeur jeté dans l'arène de Pôle emploi, où rôdent les prestataires cupides.
Effectivement la règle n°1 : ne prenez jamais votre prestataire ni votre conseiller du pôle pour un ami, ne lui racontez rien de vous qui ne soit strictement professionnel. Ne parlez jamais de vos inquiétudes ou fragilités etc...
Tout le monde est fragile, mais il est plus efficace de le cacher.
règle n°2 : si vous avez assez de force en vous, vous pouvez effectivement vous amuser à jouer au ping-pong avec votre prestataire, démonter ses arguments, pousser ses raisonnements jusqu'à l'absurde, lui demander "pourquoi?" chaque fois qu'il vous dit un truc.

Merci ...

@MEmmanuelle

Tiens bon la barre !

Serabeth a bien résumé : on cache ce qui ne va pas, on serre les fesses, les dents et ... tout ce qui tient.
Tu n'as pas d'amis ni de soutien en dehors de gens comme nous, ne te fais pas d'illusions (je ne parle pas que d'Actu)

Surtout ne pas se culpabiliser, ce n'est pas ta faute. Il y a douze ans '!) j'ai aussi été lourdée, après être passée .d'assistante de direction à directeur d'entreprise avec les vraies responsabilités et les soucis pendant des années.

Je tiens bon (pour le moment ... ), et je ne culpabilise pas le moins du monde... Si on compare les quelques millions d'euros qui sont versés au titre des indemnités chômage à tous les privés d'emploi aux milliards d'euros qui sont généreusement alloués par le système aux plus riches pour leur permettre de continuer à exploiter leurs congénères (preuve en sont les sommes colossales données aux banques fin 2008 pour sauver le système financier mondial ... système qui nous conduit tout droit dans le mur !!), il n'y a vraiment aucune raison de culpabiliser... Quand on infantilise, quand on humilie les chômeurs en leur demandant de rendre des comptes sur leurs recherches d'emplois (c'est bien beau de chercher un emploi... encore faut-il que la société soit en mesure de proposer des emplois décents, justement rémunérés), et que dans le même temps on fait des chèques en blanc aux banques, aux entreprises sans aucune contre-partie... il faudrait être vraiment sot ou maso pour culpabiliser.

C'est sans doute ce sentiment d'injustice globale qui me fait tenir bon.