3.1. Trop-perçus déclenchés par les flux informatiques de la Carsat
Début 2023, les médiateurs ont commencé à recevoir des demandes de médiation, à propos de trop-perçus déclenchés par la transmission vers Pôle emploi de flux informatiques de la Caisse d'assurance retraite et de santé au travail (Carsat). Embarquant un nombre de trimestres actualisé, ces données sont entrées en conflit avec celles détenues par Pôle emploi et ont remis en cause des dates de départ en retraite. Il en est alors résulté l’apparition de trop perçus pour des mois, voire des années, de versement à tort del ’Allocation d’Aide au Retour à l’Emploi (ARE). Les montants
réclamés atteignent couramment des dizaines de milliers d’euros.
• Des flux informatiques conflictuels
Depuis 2022, Pôle emploi a donc intégré dans son système d’information les flux LURA de la Carsat (Liquidation Unique des Régimes Alignés), qui portent sur la date prévisionnelle de la retraite à taux plein des demandeurs d’emploi.
C’est l’information qui permet aux agences de définir la date à partir de laquelle Pôle emploi est susceptible d’interrompre le versement
de l’ARE pour laisser place à une pension de retraite à taux plein. Mais lorsque Pôle emploi croise les données qu’il avait antérieurement enregistrées avec celles issues des flux de la Carsat, les dates d’interruption du versement de l’ARE peuvent présenter des décalages importants, de quelques mois jusqu’à plusieurs années, ce qui déclenche des trop-perçus allant de 5 000,00 à 100 000,00 € et plus. Cela génère évidemment des situations critiques, d’autant plus que les Carsat ne prévoient pas de rétroactivité dans le versement des pensions de retraite.
Pôle emploi avait notifié le maintien du versement de l’ARE à un demandeur d’emploi jusqu’à 67 ans, conformément aux dispositions
réglementaires applicables. Mais les flux informatiques de la Carsat l’ont remis en cause, arrêtant la date de retraite à taux plein à 65 ans,
déclenchant un trop-perçu de deux ans d’indemnisation.
La cause principale de ce décalage tient au fait que les agences avaient pour pratique de retenir un simple relevé de carrière fourni par les demandeurs d’emploi pour enregistrer la date prévisionnelle de leur retraite à taux plein, au lieu d’exiger le justificatif officiel délivré par les Carsat intitulé
« Chômage indemnisé : régularisation de carrière ». Le relevé de carrière incomplet avait pour effet de faire enregistrer par les conseillers une date prévisionnelle erronée. On peut aussi noter l’impact lié au délai de délivrance du justificatif officiel, les écarts de saisie et le taux de retour de la CNAV au flux informatique envoyé par Pôle emploi en amont de la retraite, destiné à déclencher des opérations de régularisation de carrière auprès des demandeurs d’emploi. Dans ces situations, ces derniers peuvent se trouver pris en tenaille, entre les informations dont ils disposent et celles qui circulent entre institutions.
À cet égard, on reconnaitra que les chemins de la reconstitution de carrière sont parfois complexes et que les délais de traitement et d’obtention de justificatifs peuvent être très longs.
• Le rôle des Instances Paritaires
Les demandes de médiation relatives à ces trop-perçus se sont progressivement étendues à toutes les régions, nombre d’entre elles étant portées par les Délégués du Défenseur des droits. En fonction des situations, les médiateurs peuvent parfois engager un processus de médiation avec les Directions des Opérations Régionales de Pôle emploi et les médiateurs de la Carsat, afin de rechercher des solutions de régularisation.
Mais, in fine, les cas de trop-perçus fondés restent soumis à la décision des Instances Paritaires Régionales/Territoriales (IPR/IPT).
• Le positionnement du Médiateur National Pôle emploi.
Le Médiateur Régional ne peut et ne doit pas être l’amortisseur d’un dysfonctionnement aussi important et bien identifié, dont la portée est nationale et la sensibilité extrême. Dans l’attente d’un règlement de la situation entre les institutions concernées, le médiateur ne doit donc plus être destinataire de demandes de médiations liées aux « trop-perçus Carsat ». Celles-ci doivent faire l’objet d’un traitement spécifique par Pôle emploi qui, au cas par cas devra trouver avec les autres acteurs concernés des solutions adaptées à chaque situation.
C’est pourquoi, le 30 août 2023, le Médiateur National a adressé une note d’alerte au Directeur Général de Pôle emploi, préconisant un traitement rapide du sujet au niveau national entre les différents acteurs concernés : Pôle emploi, Cnav et Unedic. Depuis, Pôle emploi a saisi la Cnav afin qu’un travail en commun puisse s’engager entre les équipes dans l’objectif de définir ensemble un mode opératoire national opposable aux deux réseaux et d’assurer une communication coordonnée vers les Carsat. Le sujet a fait l’objet d’un point à l’ordre du jour du « Comité national de coordination métier d’accompagnement vers la retraite », le 12 décembre 2023, en présence de la Cnav, de l’Unédic et de Pôle emploi.
https://www.francetravail.org/files/liv ... 202023.pdf