Le soldat Xavier Bertrand doit appliquer à la lettre le «plan sans précédent pour l'emploi» de 500 millions annoncé sur TF1 par son maître, Nicolas Sarkozy. Ce plan est axé sur deux publics cible : les jeunes, et les chômeurs de longue durée. Aux premiers, il est question de proposer des contrats d'apprentissage ou de professionnalisation. Aux seconds, des contrats aidés ou des formations qualifiantes. Des objectifs chiffrés sont donc définis, comme pour les commerciaux.
On le sait, le gouvernement fonctionne sur une logique purement comptable : il se moque du qualitatif et se focalise sur le quantitatif. (Il fait exactement pareil avec l'éducation nationale, les hôpitaux, la police, etc...)
Quand il se réjouit des créations d'emplois sur tel ou tel trimestre, il se fout de la nature des emplois créés (à 90% précaires et au Smic) : 1 emploi, même volatil (intérim) et à temps partiel, reste 1 emploi de plus dans les statistiques. C'est même un "signe de reprise".
L'objectif est de faire baisser les chiffres du chômage d'ici 2012, non de faire baisser le chômage.
Il s'agit donc de réduire le nombre d'inscrits en catégories ABC (celles dont parlent les médias) en en basculant une partie dans les catégories D ou E. Un vrai maquillage électoraliste.
A la base, l'accord AFDEF conclu début 2009 s'appuyait sur un cofinancement à 50-50 entre l'Etat et le Fonds de sécurisation des parcours professionnels, géré en partie par l'Unedic. Son budget annuel, de 160 millions, devait permettre à quelque 25.000 chômeurs de se reconvertir. Xavier Bertrand, pour un montant inchangé, veut augmenter le nombre de chômeurs éligibles à 30.000/an afin de tenir ses objectifs : d'où cette pirouette avec la RFPE.
que peut-on faire contre cette mesure injuste ?
Désolée de vous décevoir, mais on ne peut pas faire grand chose... Voici pourquoi.
Suite à cette proposition malhonnête, certains syndicats de l'Unedic — je pense à la CGT ou à FO, qui sont les moins pourris — ne manqueront pas de protester. Mais face au patronat,
aux autres syndicats traditionnellement "conciliants" (CFDT, CFTC, CGC) et à un gouvernement déterminé, les opposants à ce projet scélérat seront très minoritaires. De plus,
le gouvernement joue la montre et pratique une forme de chantage culpabilisateur (car, dans l'intérêt des chômeurs, il faut que cette prestation soit rétablie bon an mal an). Si les syndicats refusent de la rétablir dans ces conditions, ce sont les chômeurs qui vont être lésés. Alors, comme d'habitude, "contre mauvaise fortune bon cœur", un nouvel accord sera signé.
La manœuvre avait fonctionné fin 2008 quand le gouvernement a supprimé l'AFF.
L'AFF était entièrement assumée par l'Etat depuis 2002. Mais Nicolas Sarkozy — après avoir fait voter le "bouclier fiscal" et nombre d'autres largesses en faveur des plus riches… — a décidé que l'AFF coûtait trop cher et l'a fait disparaître de la loi de finances 2009 (UMP majoritaire au Parlement, la gauche n'a rien pu faire). Le but inavoué, c'était de transférer son coût sur l'assurance chômage. L'Unedic, dont les comptes étaient dans le rouge, a tenté en vain de résister. Mais il fallait bien rétablir une allocation permettant aux chômeurs en fin de droits de poursuivre leur formation : l'effet culpabilisateur jumelé au sentiment d'urgence a eu les effets escomptés, et l'Etat a ainsi réduit sa charge de moitié.
C'est un bras de fer, de la négociation commerciale dans toute sa bassesse, comme dans la grande distribution où l'Enseigne toute puissante n'a aucun mal à presser ses fournisseurs : le consommateur, lui, n'a aucune voix au chapitre et paiera au final.
qui a envie de rentrer en formation et de se mettre dans la mouise??? personne.
Le gouvernement s'en fout. Le pire, c'est que ça risque de marcher, car les adeptes du "c'est mieux que rien" prêts à se faire tondre sont légion.
Si ça prend, le bilan de Nicolas Sarkozy s'achèvera sur une touche "positive".
Si ça ne prend pas, le gouvernement s'en tape aussi : le fiasco du "plan rebond" ne lui a laissé aucun complexe... Je le répète :
lutter contre le chômage n'est pas sa priorité, bien au contraire.
Qu'il perde ou non en 2012, ce qui compte, pour Nicolas Sarkozy, c'est tout ce qu'il aura réussi à grappiller et à détruire depuis quatre ans au service des puissants et des riches. Car Nicolas Sarkozy, c'est comme Attila : là où passe son cheval, l'herbe ne repousse pas. La gloire de Nicolas Sarkozy, qu'il soit réélu ou pas, c'est d'avoir réussi à imposé des mesures drastiques quasiment irréversibles. Et ses successeurs, même les mieux intentionnés, auront toutes les peines du monde à rétablir ce qu'il a bousillé. Abroger tout ce que l'UMP a fait depuis 2007 est en soi un programme électoral.