Pour alimenter la discussion sur la classe populaire et le Vote FN ou abstention de la classe populaire
"La France périphérique" : Christophe Guilluy pulvérise cinq clichés sur les classes populaires
Le géographe Christophe Guilluy explique en détail, dans La France périphérique, "comment on a sacrifié les classes populaires" aux gagnants de la mondialisation. Le divorce de cette France rurale et périurbaine avec les élites, estime-t-il, est désormais "irrémédiable". Au passage, le chercheur met en miettes quelques idées reçues. Voici (liste non exhaustive) cinq d'entre elles :
1. Non, la France n'est plus composée majoritairement de "classes moyennes"
"La géographie, ça sert d'abord à faire la guerre", rappelle l'auteur. Et c'est pourquoi il substitue à la "carte d'état-major des classes dirigeantes" - celles des "aires urbaines" de l'INSEE "centrée sur les espaces qui réussissent économiquement et les populations qui sont les véritables gagnants de la mondialisation"- une autre : celle des "fragilités sociales". Car "la question sociale n'est pas circonscrite de l'autre côté du périph, mais de l'autre côté des métropoles, dans les espaces ruraux, les villes moyennes, dans certains espaces périurbains qui rassemblent aujourd'hui près de 80% des classes populaires".
Pour l'établir, il a repéré les communes qui affichaient des fragilités sociales supérieures au reste de l'hexagone, à partir de sept indicateurs (proportion d'employés et ouvriers, de chômeurs, d'emplois précaires, logements précaires, faibles revenus ...). Et range dans cette catégorie près de 70% des communes françaises regroupant 64% de la population. Donc une part majoritaire.
2. Non, ils ne sont pas immobiles par choix
Exclus des grandes villes et des petites couronnes par le prix de l'immobilier, cette population fragilisée vit de plus en plus loin des zones dynamiques créatrices d'emplois. "Pour la première fois dans l'Histoire, note Christophe Guilluy, les classes populaires ne sont pas là où se créent les richesses : 60% de la population n'habite plus là où cela se passe".
Mais pourquoi ne partent-ils pas? s'exclame alors une élite volontiers voyageuse. L'essayiste leur répond par quelques vérités d'évidence. Dans des zones non ou mal desservies par les services publics, se déplacer en voiture sur un lieu de travail situé à 20 km de chez soi coûte 250 euros par mois . Un quart du SMIC.
Comment les dizaines de milliers de salariés ayant perdu leur emploi (Christophe Guilly liste quelques-une des villes petites ou moyennes sinistrées par des plans sociaux récents) pourraient-ils payer un trajet plus long ? D'autant qu'il ne leur reste souvent comme seul bien - au mieux- qu'un logement, par ailleurs dévalué s'il n'y a plus d'emplois alentours ?
Effet évident, les fractures s'accentuent entre "les métropoles mondialisées et gentrifiées" qui restent "celles de mobilités (par le haut pour les catégories supérieures et par le bas pour les catégories populaires immigrées)" et "une France des sédentaires contrainte par le contexte économique, social et foncier". "Les catégories populaires, déjà peu mobiles, sont désormais piégés sur des territoires éloignés des zones qui créent l'emploi".
3. Non, les Français ne sont pas plus racistes que les autres
Le Monde avait publié l'an dernier un sondage à faire frémir sur la montée du racisme en France. Christophe Guilly tient à mettre des bémols : non les Français ne sont pas plus racistes qu'ailleurs. Il cite notamment un sondage Ipsos de juin 2011 mené dans 23 pays : l'étude montre que si 54% des Français pensent qu'il y a trop d'immigrés, ce pourcentage correspond à la moyenne des pays interrogés", avec "un pourcentage beaucoup plus élevé pour les Britanniques (71%), les Belges (72%), les Italiens (67%)".
Et d'expliquer que les Français de classe populaire, y compris descendants d'immigrés de deuxième ou troisième génération, se sont parfois sentis bousculés dans leur mode de vie par l'arrivée récente d'immigrés dans les banlieues. Et qu'ils ont choisi de partir vers la périphérie pour éviter heurts ou confrontations.
Il ajoute que les leçons de racisme venant de classes aisées leur sont particulièrement insupportables. Dans La République des bobos, l'éditorialiste Thomas Legrand décrit à merveille les stratégies de contournement de la carte scolaire des "bourgeois-bohèmes". La mixité sociale en classe pour les enfants ? Jusqu'au collège maximum. Après direction le privé, ou, via quelques options artistiques ou linguistiques judicieusement choisies, des lycées publics cotés de centre-ville.
4. Non ils ne choisissent pas l'abstention ou le FN par ignorance
Oui, les Français des classes populaires savent ce qu'ils font quand ils boudent les urnes (60% d'abstention aux dernières européennes) ou choisissent le vote protestataire du Front national. Pourquoi participeraient-ils à des élections où plus personne ne les représente ? "Le sentiment d'une classe politique "hors sol", écrit Christophe Guilluy, est d'autant plus fort que désormais plus aucun représentant, l'exemple est frappant pour les députés ,n'est issu des catégories populaires, pourtant majoritaires". Le mal gagne puisque le Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof) "révèle ainsi que les maires de villes de plus de 30.000 habitants issus de catégorie ouvriers ou employés sont passés de 12,8% à 0,4% en 2014".
5. Non, ils ne se reconnaissent pas dans le clivage droite-gauche
Les classes populaires de cette France périphérique, martèle Christophe Giully, savent qu'elles ont été sacrifiées par les partis de gouvernement de droite et de gauche "sur l'autel d'une mondialisation volontiers communautariste et inégalitaire", dont elles sont les grandes perdantes.
Conséquence : "En milieu populaire, la référence gauche-droite n'est plus opérante depuis au moins deux décennies : une tendance encore plus marquée chez les jeunes générations". Seul le vieillissement du corps électoral permet de "maintenir artificiellement un système électoral peu représentatif, les plus de 60 ans étant en effet ceux qui portent massivement leurs suffrages vers les partis de gouvernement." Ce qui fait d'ailleurs du vote des retraités pauvres une question-clé.
Logique du coup de pied donné du fond de la piscine ? De cette France qui n'intéresse plus les décideurs surgissent des initiatives de "relocalisations de la production" ou des voies nouvelles explorées par des "alterentrepreneurs", bien décrites par le journaliste Eric Dupin dans son dernier ouvrage (Les défricheurs, Voyage dans la France qui innove vraiment).
Des tentatives qui n'ont pu encore porter tous leurs fruits, et qui s'appuient souvent sur les conseils généraux. Dans ce cadre, affirme Christophe Guilluy, "la disparition programmée des départements, c'est à dire des seules collectivités visibles pour les citoyens et qui pèsent politiquement, est un très mauvais signe pour cette France périphérique". Le signal sera-t-il entendu, ou une fois encore, méconnu ?
http://blog.francetvinfo.fr/livres-actu ... aires.html
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Christophe Guilluy, géographe sort un bouquin La France périphérique, comment on a sacrifié les classes populaires (Flammarion, 18 euros)
http://www.franceculture.fr/emission-l- ... 2014-09-16
http://www.franceculture.fr/emission-le ... -se-redess
=> cliquer sur la video
Il décape les clichés sur la classe populaire!
Il nous explique comment la classe politique est à coté de la plaque !
Pour lui, les classes populaires ne sont plus dans les villes mais dans les zones périphériques !
Il explique que l'abstention et le vote FN des classes populaires sont avant tout concentrés dans les zones périphériques des grandes métropoles, dans les territoires qui sont exclus des pôles économiques! Les classes populaires sont sacrifiées par la Mondialisation et ne participent plus à la production des richesses!
Il avance que ce n'est pas le Front National qui manipule la classe populaire mais les classes populaires !
Voici du grain à moudre contre les idées reçues sur les classes populaires et le vote des classes populaires
Il rejoint notre pensée sur l'essoufflement du mouvement social classique !