Coucou, me revoilou !
Allez, je fais un break dans mon "rattrapage" sur Actuchomage pour vous faire partager un instant ma semaine berlinoise.
Ça faisait 5 ans que je n'étais pas partie en vacances !!! J'ai profité d'une occasion financière (et amicale) pour découvrir cette ville peu prisée, défigurée, mais pleine d'âme et très accueillante.
Au début, on se demande où on est tombé : comparée à Paris, qui est une "ville-musée", Berlin est un mélange incroyable d'architectures. Des monuments anciens qui ont été détruits pendant la guerre et refaits à l'identique (et comme c'est neuf, ça fait toc), des constructions modernes affreuses et d'autres plus audacieuses. Tout se mélange de façon iconoclaste et à première vue c'est parfois choquant, voire laid (surtout à l'Est, notamment vers Ahrensfelde où c'est pire que la Courneuve), et on se dit que ça manque vraiment de cachet.
Puis, au gré des promenades on sent une âme, une intelligence créative. Le passé se dévoile, et c'est parfois très émouvant.
J'ai eu un choc devant l'Eglise du Souvenir (les restes réaménagés de Kaiser Wilhelm Gedächtniskirche à Zoo, dont il ne reste qu'une partie après un bombardement) : les cartes postales la montrent avant, puis détruite. Même chose dans le quartier Nikolaï refait à l'ancienne (de loin ça jette, mais de près ça fait toc et c'est bien triste…) avec son église : à l'intérieur y sont exposés des restes retrouvés sous les décombres avec les photos d'avant, et là on se rend compte des multiples conséquences de la destruction de Berlin. Un vaste gâchis culturel et humain. On ne peut pas s'empêcher de frissonner quand on songe qu'en 1945 des gens affamés faisaient pousser des patates dans le Tiergaten (le poumon de la ville) totalement rasé.
Même chose dans certains lieux où passait le Mur, notamment dans le quartier de Bernauer Strasse où les gens ont été expropriés, les fenêtres murées pour éviter les fuites, et une église démollie parce qu'elle "génait" le parcours du Mur.
Le peuple berlinois a méchamment souffert, on s'en rend compte. L'Histoire est bien là, peu visible au départ, mais révélée quand on se penche. Beaucoup d'émotion aussi à la galerie Topographie des Terrors (angle Wilhelmstrasse et Zimmerstrasse, ancien siège de la Gestapo, près du Checkpoint Charlie) où est exposé tout le processus nazi, un mea-culpa humble et précis qui suscite l'admiration. Je crois que Berlin assume vraiment son passé et désire la paix.
Berlin aujourd'hui est une ville où le taux de chômage est à 20% malgré des travaux constants et des emplois multiples que nous n'avons plus ici (je pense au métro qui, chez nous, s'est déshumanisé avec l'automatisation alors qu'à Berlin il y a beaucoup de personnel). Enormément de SDF ou de musiciens de rue font la manche ou vendent le "Lampadaire" local dans les rames. Pourtant, on n'a pas comme à Paris un sentiment d'agressivité et de misère crue. Les gens sont calmes, courtois et respectueux, même le nez dans la merde. Combien de temps cela va-t-il durer ?
Pourtant, la vie y est bien moins onéreuse : pour manger, se loger, les tarifs sont presque deux fois moins chers qu'ici et il n'y a pas de crise du logement. Mais il faut aussi savoir que Berlin est moins chère que Francfort ou Munich. D'ici quelques années, quand sa "modernisation" sera complète, l'ambiance va changer et les prix grimper...
Comme elle se reconstruit depuis 60 ans, Berlin a aménagé ses espaces : beaucoup de verdure peu domestiquée (ici, on taille les arbres et les haies à outrance alors que là-bas on laisse la nature tranquille), quatre poubelles différentes pour le tri dans tous les lieux publics, de remarquables circuits pour les vélos (à noter que les cyclistes peuvent prendre le métro et le RER avec, c'est prévu, il n'y a pas de tourniquets qui font chier les mamans avec poussettes), et je n'ai jamais vu autant d'handicapés se déplacer partout, sortir de chez eux alors qu'à Paris c'est le parcours du combattant, donc on ne les voit pas.
J'y ai vu peu de Noirs, quelques croates, et pas mal d'asiatiques et de russes. La communauté turque semble parfaitement intégrée. Je n'ai pas ressenti d'agressivité raciste et d'effet ghetto comme ici.
Berlin n'est pas belle, mais elle respire l'ouverture et le savoir-vivre (les piétons et les voitures sont archi-disciplinés !). Elle a réveillé mon sentiment européen - mais pas de regret pour mon vote "Non" au TCE - et j'ai même vu dans Kreuzberg des affiches pour un rassemblement politique alternatif de gauche où la lutte anti-CPE française était prise en exemple !
Si cette capitale est attachante, c'est aussi parce qu'elle n'est pas surpeuplée. En IDF, nous sommes 12 millions à nous entasser alors que sur une surface plus grande Berlin et son Land comptent 3,5 millions d'habitants. Ça change les choses, je pense : l'espace, et une discipline innée qui font que les gens respirent mieux et se respectent.
Quand Sarkozy passera en 2007, pas question que je reste en France : malgré son chômage, Berlin me tente beaucoup. Il faudra que l'ANPE m'offre quelques cours d'allemand !
MERCI pour vos encouragements : je suis regonflée à bloc !